AVERTISSEMENT
Vous êtes ici sur un blog d'un type un peu particulier. J'y expose une thèse sur le mouvement qui en est à ses balbutiements, et je vous invite à la développer avec moi sur ce forum
. Le principe que je mets de l'avant est facile à comprendre, il explique la résistance à l'accélération des corps et le mouvement que cette accélération induit chez eux, mais aussi notre résistance au changement à tous et les changements que nous subissons malgré tout. Si vous êtes curieux et que vous arrivez à surmonter cette résistance naturelle que nous offrons tous au changement, comme moi, vous pourrez sans doute utiliser ce que vous aurez appris pour mieux appréhender votre existence. J'ai nommé ma thèse "La Reptation" par analogie au type de mécanisme qui permet à la Chenille arpente use d'avancer: en voici la description.

 

LA REPTATION
En essayant d'imaginer comment deux atomes identiques pouvaient se percevoir et agir en fonction de cette perception, j'ai d'abord dû supposer
#1 qu'ils émettaient continuellement de la lumière, #2 qu'ils émettaient tous deux leurs impulsions à la même fréquence, et #3 qu'ils pouvaient les comparer entre elles, ce qui signifiait pour moi #4 qu'ils devaient être synchronisés à l'origine, et #5 qu'ils avaient dû agir pour le demeurer depuis. Puis je me suis mis à la place d'un des deux atomes d'une molécule, et j'ai observé ce qui se passerait si l'autre atome subissait une brève poussée dans ma direction. En avançant vers moi, cet atome perdrait son synchronisme à cause de l'effet Doppler, de sorte que, pour pouvoir le retrouver, il devrait non seulement résister à sa poussée, mais aussi s'arrêter dès que cette dernière aurait cessé. À mesure que les impulsions lumineuses issues de cette poussée m'atteindraient, elles sembleraient raccourcies à cause du même effet Doppler, et je devrais accélérer dans la même direction qu'elles pour les allonger, donc en m'éloignant de l'autre atome, puis m'arrêter dès qu'il n'y aurait plus d'effet Doppler, de manière à toujours y demeurer synchronisé. Ce faisant, mes propres impulsions s'allongeraient en direction de l'autre atome et, quand elles l'atteindraient, lui aussi devrait accélérer pour y demeurer synchronisé mais cette fois, en direction contraire à chacune d'elles, donc pour les raccourcir en se rapprochant de moi, et il devrait lui aussi finir par s'arrêter. À cause de la non instantanéité de notre interaction, et pour pouvoir conserver notre synchronisme, nous devrions donc nous poursuivre indéfiniment en avançant dans la même direction que notre poussée originelle. Vus de loin, nous aurions l'air d'être en mouvement constant, mais vus de près et au ralenti, nous avancerions pas à pas l'un derrière l'autre à la manière de la chenille arpenteuse. L'animation rudimentaire qui suit donne un aperçu du mouvement en question.


 
 
 

La Reptation

 

Une thèse sur le mouvement

par

Raymond Potvin

 

 

 

 

Introduction

Cet essai est basé sur le principe selon lequel la masse des particules microscopiques serait induite1 par l’"Effet Doppler" qu’elles perçoivent entre elles, effet qui nous sert justement à mesurer le mouvement radial entre deux corps, dont celui entre les étoiles et nous, ou celui entre un véhicule et un radar routier. Puisque cette masse se traduit par la résistance à l’accélération, je devrais pouvoir la comparer à ma propre réticence à changer d’idée et, si le mouvement constant issu de cette accélération dépend effectivement du fait que l’échange de lumière entre les atomes n’est pas instantané, nos propres échanges d’information ne l’étant pas d’avantage, ils devraient induire un véritable mouvement intellectuel constant entre nous, une "reptation intellectuelle". D’innombrables termes sont déjà dédiés à cette incontournable résistance entre les humains même si elle reste encore aussi fondamentalement inexpliquée que la masse : ego, égoïsme, égocentrisme2, individualisme, orgueil, fierté, arrogance, pouvoir, domination, autorité, dictature, culpabilité, faute, infraction, délit, crime, péché, mal, volonté, détermination, accusation, défaut, ...etc. Tous ces termes s’appliquent seulement à la résistance des autres parce que personne n’a jamais l’impression d’en offrir toutefois, en constatant que nous fonctionnons vraisemblablement tous ainsi, cette impression pourrait bien n’être qu’une illusion due au fait que nos nombreux automatismes3, qui s’effectuent déjà de manière subconsciente4, résistent au changement de la même manière. Mais alors, comment améliorer mon propre comportement si je dois nécessairement me confronter à la résistance subconsciente des autres pour y arriver et que, en plus, je résiste moi-même involontairement au moindre changement ?

 

Puisque la Reptation explique autant le mouvement constant d’une molécule que l’importance et la direction de ses accélérations, je devrais pouvoir l’appliquer à ma propre constance et mes propres changements intellectuels, ce qui signifie que, pour mieux me comprendre, je pourrais d’abord distinguer mes différentes fonctions intellectuelles les unes des autres et imaginer comment elles pourraient fonctionner ensembles par reptation. Comme les atomes entre eux, j’aurais la capacité innée d’interagir avec mes semblables selon trois composantes distinctes qui, parce qu’elles sont indépendantes les unes des autres, pourraient agir simultanément sans interférer entre elles : mes automatismes, mon imagination, et mes sens. Premièrement, mon cerveau aurait la capacité innée de réitérer un geste virtuel en boucle pour le retenir de manière subconsciente, d’où ses automatismes. Deuxièmement, il aurait la capacité de manipuler consciemment cette boucle virtuelle au hasard pour tenter de l’améliorer, donc aussi celle de la vérifier concrètement, de sorte qu’il pourrait finir par automatiser cette amélioration en la réitérant, d’où mon imagination. Troisièmement, il aurait conscience des impulsions sensorielles appartenant à un automatisme donné quand elles sont inhabituelles, parce que chaque neurone concerné résisterait spontanément à ce qu’il perçoit comme un changement, que cet automatisme soit inné, acquis, en voie d’acquisition, ou virtuel, d’où mes différents niveaux de perception: sensations, émotions, sentiments, intuitions. Va pour mes automatismes, mais comment ce mécanisme me permet-t-il de développer des idées, de les vérifier, ou de les conserver ?

 

Avec la Reptation, personne ne peut prévoir l’avenir, mais seulement imaginer un futur geste au cas où il fonctionnerait. Pour s’adapter au changement, mon imagination modifierait virtuellement au hasard la partie d’un geste qui ne fonctionne plus très bien jusqu’à ce qu’elle perçoive cette agréable sensation que nous appelons une intuition, puis elle exécuterait ce nouveau geste pour pouvoir en comparer la sensation réelle à celle qu’elle vient d’imaginer. Une coïncidence des deux sensations l’inviterait à réitérer le geste et, si elle le réitérait suffisamment souvent, elle finirait par l’automatiser, de sorte qu’elle n’aurait ainsi plus besoin de l’imaginer avant de l’effectuer. Sa fonction serait donc double : en premier lieu, elle aurait la capacité de faire des modifications virtuelles au hasard sur un ancien geste, d’où l’image virtuelle du futur geste et son impression de pouvoir le prévoir puis, en deuxième lieu, dès qu’une modification semblerait fonctionner virtuellement, elle pourrait l’exécuter concrètement pour la vérifier, mais elle ne pourrait rien vérifier si son milieu changeait entre chaque tentative, voilà pourquoi elle se tromperait si souvent quand la réponse à ses tentatives prendrait trop de temps à se manifester soit, quand elle s’engagerait dans un futur trop lointain. Même si elle semble cohérente, cette idée selon laquelle l’imagination arriverait à imaginer son propre fonctionnement, pour ensuite le vérifier, et finir par se comprendre elle-même, étant on ne peut plus circulaire, se pourrait-il que toutes mes idées le soient aussi ?

 

Même si le nom propre Homme5 désigne l’ensemble de l’humanité depuis toujours, avec l’avènement du féminisme, cette appellation est devenue ambiguë et est appelée à évoluer. Nos mots évoluent avec le temps, soit ils changent de signification, soit il en apparaît de nouveaux pour désigner de nouveaux concepts, soit ils ont simultanément différentes signification. J’aurais pu inventer un nouveau mot pour souligner ce nouveau rapport entre l’accélération et le mouvement constant, mais certains mots usuels le décrivaient déjà dont la marche, le vol, la nage, et la reptation entre l’avant et l’arrière de la chenille arpenteuse, laquelle me semblait particulièrement évocatrice. Si le terme Reptation finissait par désigner le mouvement constant en général, l’expression Reptation intellectuelle finirait peut-être par désigner un rapport intellectuel constant entre deux personnes ou deux groupes, l’amitié et l’association par exemple, mais les autres types de reptation intellectuelle possèdent déjà leur vocabulaire propre puisque les comportements qui y correspondent ont toujours été explicites. Une reptation stationnaire entre nous se nomme déjà discussion, prise de bec, engueulade …etc. ; une reptation cyclique englobe les règles, les lois, les traités …etc. ; une reptation transitoire concerne les sensations, les goûts, les valeurs sociales …etc. Mais comment l’ensemble du vocabulaire désignant nos différents comportements se rattache-t-il à ma thèse sur le mouvement ?

 

 

 

 

 

Notes à propos de certains termes utilisés dans ce document :

 

1 Comme en Électromagnétique, le terme "induction" signifie ici "interaction réciproque entre deux composants distincts".

 

2 Les termes "égocentrisme" et "empathie" concernent ici l’intention d’autrui : je trouve l’autre empathique si j’imagine qu’il me veut du bien, et égocentrique sinon.

 

3 Le terme "automatismes" englobe ici nos comportements instinctifs et nos apprentissages, gestuels ou intellectuels.

 

4 Le terme "subconscient" résume ici "la manière dont s’effectuent tous nos automatismes", afin de bien le distinguer de "l’état  inconscient" où le cerveau est coupé de toute sensation externe, et de "l’Inconscient" de la psychanalyse.

 

5 Contrairement à l’usage, les termes en majuscules Homme et Femme sont ici de même poids, le premier excluant les femmes et le deuxième excluant les hommes.

 

 

 

 

 Table des matière

 

  1. La Reptation lumineuse

  2. La Reptation intellectuelle

  3. De ce que je perçois à ce que j’imagine

  4. Mon comportement

  5. L’empathie et l’égocentrisme

  6. L’instinct sexuel et son tabou social

  7. Les règles et les valeurs

  8. Le synchronisme et l’improvisation

  9. La mutation et l’intuition

10. La spontanéité et la créativité

11. L’imagination et nos croyances

12. Le hasard et la coïncidence

13. Les différents types de hasard

14. Les différents types de plaisir

15. La croissance et la spéculation

16. La gravitation et l’inflation

17. La Loi du plus égocentrique

18. La reptation intellectuelle homme/femme

19. La mondialisation

20. L’immigration

21. L’imagination et la liberté

22. La Conscience religieuse et l’imagination

23. La naissance de l’imagination

24. L’imagination et l’espoir

25. L’imagination et la concurrence

26. La liberté d’expression

27. L’imagination et la volonté

28. De mon caractère à mon comportement

29. La culpabilité

30. L’évolution de l’imagination

31. Ça et nous

 

1. La reptation lumineuse

Le principe de la Reptation vient de l’intuition suivante : puisque, selon les observations, une lumière de spectre spécifique et parfaitement constant provient déjà des atomes depuis des milliards d’années, le synchronisme entre le mécanisme qui produit et perçoit leurs impulsions lumineuses pourrait justifier leurs différents types de liaisons, et puisque chaque impulsion prend nécessairement un certain temps pour traverser d’un atome à l’autre, ce synchronisme pourrait aussi justifier leur masse. Je prends l’exemple de deux atomes qui forment une molécule : si j’accélérais un des deux atomes de cette molécule alors que ses impulsions sont déjà synchronisées aux impulsions de l'autre, cet atome devrait d’abord résister à son accélération pour essayer de rester synchronisé aux impulsions de l'autre, puis finir par accélérer puisqu’il y est forcé de sorte que, si je cessais de l’accélérer, il devrait finir par s’arrêter alors que, pour rester synchronisé lui aussi au moment où les impulsions issues de l’accélération de l’autre viennent tout juste de lui parvenir, le deuxième atome commencerait seulement à accélérer. Les deux atomes ainsi que tous leurs composants étant soumis au même délai lumineux, la vitesse limitée de leur interaction devrait donc provoquer un incessant mouvement de va et viens entre eux qui les entraînerait indéfiniment dans la direction de mon accélération originelle, d’où le mouvement constant de la molécule à laquelle ils appartiennent.

 

En voici la définition :

"Pour que deux sources de lumière identiques et immobiles l'une par rapport à l'autre se perçoivent comme synchronisées, il suffit qu’elles se situent à un multiple entier de la longueur d’onde qu’elles échangent de sorte que, si j’accélérais l’une d’elles dans une direction donnée, pour continuer à paraître synchronisées l’une à l’autre alors que leur lumière n’est pas instantanée, elles devraient se déplacer par bonds l’une à la suite de l’autre dans la même direction que mon accélération, accélérer puis décélérer à chacune des impulsions lumineuses incidentes de manière à constamment annuler l’effet Doppler que mon accélération originelle y a provoqué."

 

Avec la Reptation, la résistance à l’accélération d’une source de lumière, sa masse, provient principalement de la reptation entre ses propres composants puisqu’ils accélèrent plus souvent et que leur lumière est plus intense mais aussi, et dans une mesure non négligeable, de sa reptation avec ses semblables, d’où leur moindre résistance à l’accélération commune quand elles forment une liaison, leur perte de masse au profit de la liaison, car c’est la lumière échappée de la reptation entre les composants qui provoque plus loin celle entre les sources, que cette lumière ne sert plus à la liaison entre les composants, et qu’elle perd beaucoup d’intensité en traversant d’une source à l’autre. Quand j’accélère une source vers une autre, l’effet Doppler qu’elle p rovoque  sur la lumière de l’autre l’empêche d’avancer, je dois donc la forcer à avancer et elle résiste, d’où sa masse, mais son mouvement a déjà produit de l'effet doppler sur la lumière qu'elle émet en direction de l'autre source, d’où la reptation ultérieure entre les deux sources. En voulant combler, par leurs accélérations, un décalage lumineux issu de ces mêmes accélérations, deux atomes ainsi que tous leurs composants entretiendraient inévitablement ce décalage entre eux au lieu de le combler, ils avanceraient l’un à la suite de l’autre comme l’avant et l’arrière d’une chenille, d’où le rapprochement entre la reptation qui permet à cet animal d’avancer à vitesse constante, et l’accélération répétée entre ses atomes dont dépend le mouvement constant d’une molécule.

 

Par ailleurs, selon ce principe, même en mouvement constant, tous les composants appartenant à chacune des sources devraient accélérer des millions de fois les uns envers les autres pour justifier une seule des accélérations entre les sources, ce qui devrait provoquer un décalage progressif entre les accélérations des composants et la lumière dont ces accélérations dépendent. En effet si, de mon point de vue instantané, les accélérations successives entre deux atomes paraîtraient identiques entre elles, au cœur de chaque atome, la distance entre les innombrables accélérations de leurs composants varierait de manière progressive pour justifier une seule des accélérations entre les atomes. Quand, du point de vue d'un des atomes, l’accélération de l’autre atome paraîtrait terminée, chacun de ses composants serait encore en train d’accélérer selon l’ancienne accélération de l’autre puisque (1) l’interaction qui justifie leur propre liaison n’est pas instantanée et que (2) chacun d’eux accélère séparément par rapport à l’autre atome, ce qui devrait provoquer un infime décalage des accélérations entre les atomes, décalage que leurs composants devraient absolument combler par leurs accélérations, mais sans jamais y parvenir puisqu’il induirait chez eux une reptation . (Il y a ici un rapprochement intéressant à faire avec le décalage du plan de rotation et l’avance du périgée terre/lune : tous deux s’effectuent de manière si progressive que, sans la Reptation, leur nécessaire mais imperceptible accélération est difficile à imaginer). Si je comparais deux atomes côte à côte, je ne pourrais pas mesurer ce décalage car il serait trop mince mais, plus les atomes seraient éloignés, plus il deviendrait perceptible, d’où la gravitation universelle où chaque particule serait forcée d'accélérer pour annuler l’effet Doppler cosmique, ce qui implique que les galaxies n’accéléreraient pas en se distançant les unes des autres, mais que l’univers serait plutôt en mouvement constant, donc en mouvement orbital constant puisqu’il s’agit de gravitation.

 

Si j’admets que chaque atome accélère simultanément par rapport à toutes les lumières incidentes à la fois, je peux en déduire que la direction de l’accélération résultante pourrait changer la direction d’une lumière qui n’y serait pas alignée, ce qui rendrait l’aberration ainsi que la courbure lumineuse d’Einstein un peu plus concrètes qu’une formulation mathématique. Pour ce qui est de l’aberration : les accélérations que les atomes effectuent entre eux pour conserver la rotation propre et les mouvements orbitaux de la terre, interféreraient avec celles qu’ils doivent simultanément effectuer envers la lumière des étoiles pour demeurer en mouvement orbital avec elles, de sorte que ces accélérations pointeraient dans une direction différente de celle des rayons qui les produisent. Alors que l’effet Doppler entretiendrait le mouvement inertiel, l’aberration entretiendrait le mouvement orbital.

 

Pour ce qui est de la courbure lumineuse : quand j’observe le ciel avec un télescope, les atomes du télescope accélèrent simultanément par rapport aux étoiles et au soleil, alors pour les mêmes étoiles observées de la terre à six mois d’intervalle alors que le soleil se trouve, soit devant, soit derrière la terre, l’alignement soleil←terre→étoiles devrait rapprocher les étoiles du soleil sur la cartographie de nuit, et l’alignement terre→soleil→étoiles devrait les y éloigner sur la cartographie de jour de sorte que, puisque le diamètre apparent du soleil serait lui-même agrandi par cette accélération, si je le dessine sur la carte de nuit selon le même diamètre qu’il possède sur la carte de jour, il y couvrira d’avantage d’étoiles. Par ailleurs, Einstein aurait lui aussi pu considérer que son espace-temps courbe agrandissait son soleil sur la cartographie de jour, et qu’il devait par conséquent le rapetisser sur la cartographie de nuit, ce qui aurait finalement caché les mêmes étoiles la nuit que le jour, et l’aurait peut-être amené à revoir son hypothèse. Mais il y a aussi un problème avec mon hypothèse: l'accélération dirigée vers les étoiles le jour devrait les rapprocher du soleil, et celle dirigée en sens contraire la nuit devrait les en éloigner, le contraire de ce que j'ai décris et de ce que donnent les observations. Alors, soit je me trompe, soit il y a une autre manière de considérer cette hypothèse, ce que Einstein aurait dû conclure lui aussi. Il est impossible que les phénomènes que nous observons ne servent qu'à nos observations, et c'est ce qui se passe présentement avec l'effet doppler et l'aberration. J'ai montré comment l'effet doppler pouvait produire le mouvement inertiel, et je crois que l'aberration devrait produire le mouvement orbital. Reste à découvrir comment.

 

 

2. La Reptation intellectuelle

La Reptation intellectuelle la plus courante est la discussion : comme pour la lumière entre deux atomes, l’interaction entre deux personnes n’est pas instantanée, ce qui nous oblige à résister aux idées des autres pour pouvoir avancer les nôtres, mais qui nous permet de développer ensembles de nouvelles idées. Sans masse il n’y aurait pas de mouvement entre les corps donc, sans résistance au changement il n’y aurait pas de changement intellectuel entre nous. Mais ce type de reptation serait toutefois plus complexe que celle entre les atomes car nos interactions et notre subjectivité sont plus sophistiquées que les leurs. Déjà plus variés que ceux des atomes, nos différents modes de perception et d’expression varient aussi en qualité chez chacun de nous. Déjà aussi subjectives que celles des atomes, nos interactions le deviennent encore d’avantage quand notre imagination commence à prêter une intention aux autres car, en croyant pouvoir se mettre à la place de l’autre alors qu’elle ne peut absolument pas, elle peut naviguer longtemps contre vents et marées avant de découvrir qu’elle tenait un mauvais cap.

 

Par exemple, les termes symétriques introverti ou extroverti, ouvert ou fermé, égocentrique ou empathique, désignent respectivement un type d’expression, de perception, ou de résistance intellectuelle que nous attribuons aux autres : il ne s’agit pas de la comparaison entre deux objets concrets, mais bien de la manière dont nous imaginons nos rapports intellectuels. Puisque le point de vue d’un autre est inaccessible, pour échanger des idées avec lui, je dois d’abord imaginer ce qu’il veut dire, puis ajouter cette intention à mon discours pour pouvoir la vérifier, alors qu’il est justement en train de faire la même chose ce qui, même si nous sommes sincères, peut provoquer une véritable dérive intellectuelle entre nous si le sujet nous tient à cœur. Par ailleurs, qu’il soit perçu ou exprimé, ou que j’y résiste plus ou moins, avec la Reptation, tout changement devrait demeurer, soit direct, soit indirect, entretenant ainsi entre nous, soit un mouvement constant analogue à celui que cause l’accélération entre les atomes, soit un cycle constant analogue à celui que cause l’accélération entre les astres.

 

Malgré la difficulté évidente, je vais tenter d’utiliser la Reptation pour décrire certains de nos mouvements intellectuels en utilisant le langage courant mais, ce faisant, je devrai continuellement me méfier de mon imagination en me rappelant qu’elle imagine constamment pouvoir se mettre à la place des autres alors qu’elle ne peut pas, et que l’humanité procède ainsi depuis toujours y compris pour développer son langage. Avec la Reptation, pour évoluer intellectuellement par rapport aux autres, je dois combler le décalage causé par la vitesse limitée de nos échanges intellectuels, ce qui cause d’abord ma résistance au changement, et entraîne irrésistiblement plus tard mon propre dépassement, nous forçant les uns les autres à nous suivre dans ce va et viens intellectuel par la suite puisque, inévitablement, nous procédons tous ainsi. Impossible de ne pas spéculer malgré ma vigilance : plus le changement est grand, plus cette spéculation devrait être importante, et plus elle devrait provoquer à sa suite une résistance importante. Si décrié quand il sert à ne jamais changer d’idée, le préjugé serait absolument nécessaire à son développement, et il s’ajouterait à la dérive intellectuelle si je dois la défendre.

 

Ce serait donc l’inertie de mes propres idées qui induirait leur dépassement, ce qui y entraînerait celles des autres et vice-versa, continuellement. À cause de cette inertie, si je répond à un argument, je ne pourrai jamais clore le débat, mais seulement l’alimenter. Naturellement, je ne peux pas non plus m’empêcher de développer cette thèse, j’espère qu’elle aidera à solutionner nos problèmes actuels alors que je soupçonne qu’elle en causera de nouveaux, la cause et l’effet en même temps, exactement comme pour l’effet Doppler lors de la Reptation. Ce constat explique de manière étonnamment simple un phénomène social que peu de chercheurs cherchent à comprendre même si, visiblement, il menace déjà l’écosystème planétaire : la propension à la croissance de toutes nos activités humaines, y compris celle de l’économie. Belle illusion que cet espoir de solution, de toute évidence, c’est de mon propre avenir dont je me préoccupe le plus. Pourtant, je sais déjà qu’il est imprévisible, comme celui de l’humanité d’ailleurs, à tel point que tout finit un jour par paraître périmé tellement le sens et l’importance de l’évolution sociale varie sans raison avec le temps.

 

En attendant mieux, je dois continuer car, même s’il s’agit uniquement d’une idée, son inertie m’entraîne : à plus tard la survie de l’espèce ! Comme moi, j’espère qu’elle aura suffisamment de temps pour s’en tirer malgré sa propre inertie, et je tente sans tarder le rapprochement entre la Reptation lumineuse et intellectuelle. De toutes façons, la carotte est trop tentante, la liberté totale, aucune contrainte sauf de ne pas me raconter d’histoire, qui dit mieux ? Le bâton, c’est pour quand je publierai mais, pour l’instant, je peux prendre mon temps, aucune menace en vue sinon le néant qui guette tout ce qui existe ! Comme certains, pour me disculper, je pourrais toujours prétendre que « si ce n’est pas moi ce sera quelqu’un d’autre alors, aussi bien que ce soit moi » : quelle féconde réflexion ! Contrairement à ceux qui veulent visiblement que ce soit eux, tant mieux si d’autres pensent comme moi, plus on est de fous plus le résultat risque d’être passionnant.

 

Même si je suis incapable d’y adhérer, je vois clairement tous les jours à la télé la cruauté que provoque ce genre de point de vue égocentrique quand il envahit l’économie, la politique, ou la religion alors que, d’instinct, des hordes d’êtres humains s’agglutinent immédiatement derrière sans réfléchir, exactement comme des bêtes. Après avoir renié Dieu à l’adolescence, j’ai ensuite renié allègrement toutes les institutions, y compris la famille, dont celle qui s’est formée autour d’une invention que j'ai commise, et je crois que ma thèse tient principalement son originalité de cette téméraire intransigeance mais, même avec l’aide de la Reptation, je n’ai pas encore pu déterminer quelle portion était acquise ou innée. Chose certaine, autant je questionne ceux qui se servent de leur imagination pour appuyer aveuglément leurs automatismes, autant je suis d’accord avec ceux qui ne le font pas, mais je n'ai pas besoin d'une organisation pour me sentir solidaire.

 

 

3. De ce que je perçois à ce que j’imagine

En partant de l’idée que mon cerveau possède et utilise ses trois composantes intellectuelles tel que décrit dans mon introduction, je vais maintenant imaginer la manière dont ces dernières pourraient entretenir une reptation entre elles et analyser les comportements qui en découlent. La fig. 1 montre comment les différents domaines du cerveau pourraient interagir entre eux, chaque domaine possédant sa propre fonction et son propre câblage afin qu’il puisse entretenir une reptation distincte avec chacun des autres (flèches rouges), tout en étant câblé à l’interne pour que ses propres composants puissent aussi entretenir une reptation entre eux (boucles noires). Provenant d’une interaction avec le milieu extérieur, une sensation spécifique s’échappe d’abord du domaine du geste, puis remonte vers les autres domaines du cerveau en provoquant des sensations d’importances différentes. Comme pour la lumière que les différentes sources de lumière échangent entre elles, chaque domaine utilise la sensation incidente selon sa propre fonction, ce qui induit chez lui une réponse particulière d’où s’échappe, au profit des autres domaines, une sensation trop faible pour lui. Quand je pose un geste, au propre ou au figuré, je l’enchaîne de manière subconsciente, sans pouvoir le modifier, si la sensation perçue lors de son exécution est identique à celle qui était attendue, ou consciente, en pouvant le modifier, si elle ne l’est pas.

 

Fig. 1

 

 

Quand cette réponse est inattendue et suffisamment forte, elle induit immédiatement à rebours un réflexe subconscient d’acceptation ou de rejet d’où s’échappe une émotion. Une émotion agréable ou désagréable suffisamment forte induit immédiatement à rebours un geste subconscient de curiosité ou de crainte d’où s’échappe un sentiment. Un bon ou mauvais sentiment suffisamment fort induit à rebours l’enchaînement ou l’arrêt subconscient d’un automatisme d’où s’échappe une intuition. Une intuition agréable suffisamment forte induit à rebours la réitération subconsciente du geste dans le but de l’apprendre, et une intuition désagréable induit des modifications au hasard sur le geste jusqu’à ce qu’une bonne intuition suffisamment forte survienne, ce qui induit à rebours un geste subconscient inédit dont j’ai conscience de la réponse si je suis éveillé, mais un rêve agréable ou un cauchemar si je suis inconscient ou si je dors. Le niveau de perception d’une réponse dépendrait donc de son intensité et de sa nouveauté de sorte que, si la première réponse avait été moins forte mais tout aussi inattendue, je n’aurais pas perçu d’émotion mais un sentiment puis une intuition, et si elle avait été encore moins forte, j’aurais seulement perçu une bonne ou une mauvaise intuition qui m’aurait incité, soit à réitérer le geste pour l’apprendre, soit à le modifier jusqu’à ce qu’une bonne intuition survienne.

 

Ma conscience venant de la perception d’une réponse, réelle ou virtuelle, mais dans le but d’améliorer un geste dont je n’ai normalement pas conscience, j’ai donc conscience de la désagréable réponse d’un ancien geste dont le milieu a subitement changé, mais aussi de l’agréable réponse imaginaire du geste destiné à remplacer l’ancien. Comme je l’explique un peu plus loin, avec la Reptation, ma Conscience avec un grand C se situerait dans la résistance au changement de chacun des neurones de mon cerveau, et l’imagination dans le jeu de hasard que l’imprécision de mes synapses entretiendrait avec leurs neurones. En utilisant cette imprécision, mon cerveau aurait acquis la capacité de changer un automatisme au hasard dans le but de l’améliorer et ce, dès que sa réponse varierait, essai imaginaire dont je retiendrais la réponse imaginaire, que je pourrais comparer plus tard avec sa réponse effective.

 

Si l’interaction entre deux atomes doit nécessairement être perceptible et réciproque pour induire leur mouvement, il devrait en être ainsi de l’évolution entre les être humains. Quand je démontre de l’empathie, je devrais donc m’attendre à une récompense palpable cependant, puisque nous pouvons facilement imaginer une interaction impalpable et que la religion nous y encourage fortement, beaucoup d’entre nous croient au contraire qu’un pareil geste ne nécessite aucune réciprocité. Malheureusement, plusieurs arrivent tout aussi facilement à croire qu’un geste égocentrique n’en nécessite pas non plus au point où, en imaginant le même genre de récompense impalpable et éternelle, certains se font exploser pour justifier leur croyance. De la folie dirait-on dans ce dernier cas, pourtant, c’est exactement la même croyance invérifiable dans les deux cas : selon moi, autant l’imagination a induit chez nous une évolution sociale plus rapide que celle des autres animaux, autant elle a toujours ralentit cette évolution en nous permettant trop facilement d’imaginer n’importe quoi, …dit-il en sourcillant.

 

Quoiqu’il en soit, en prenant pour acquis que toute interaction doit demeurer palpable, mon imagination peut quand même vérifier si, en s’appliquant le même principe, elle n’arriverait pas à mieux se comprendre elle-même, ce qui devrait l’aider à mieux comprendre ses semblables, mais qui signifie aussi qu'elle pourrait arriver à mieux se faire comprendre d’elles, y compris en avançant que les croyances qu'elles avancent nuisent peut-être à leur évolution commune, ce qui n’est pas chose faite, …croit-elle pour l’instant.

 

 

 

4. Mon comportement

La manière avec laquelle chacune de mes molécules perçoit, résiste et répond à son propre milieu, induit celle avec laquelle j’interagis avec chacun de mes semblables : ce que nous appelons nos comportements seraient en fait de véritables reptations, mais intellectuelles. Comme pour tout mouvement, le comportement entre les êtres humains dépendrait des trois seules propriétés fondamentales de la Reptation :

 

    4.1 Sa résistance au changement (équivalent de la masse).

    4.2 Son décalage direct (équivalent du mouvement constant).

    4.3 Son décalage indirect (équivalent du mouvement gravitationnel).

 

Analysée séparément chez moi, chacune de ces propriétés devrait pouvoir m’aider à définir nos comportements. Cependant, il existe une multitude de manières d’agencer les mêmes molécules entre elles, dont découle une grande diversité de textures matérielles et intellectuelles, chacune d’elles possédant une manière propre d’interagir avec chacune des autres, d’où la difficulté de définir tous les comportements des autres en me basant uniquement sur les miens, ou encore d’accorder les miens à ceux de tous les autres soit, de m’entendre parfaitement avec tous mes semblables.

 

4.1 La résistance au changement

D’une part, ma principale résistance au changement viendrait du temps qu’il me faut pour décider d’améliorer un ancien geste parce qu’il ne fonctionne plus, et d’autre part, pour tenter de l’améliorer en procédant par essai et erreur : plus le geste est ancien, mieux il a fonctionné, et plus il résiste au changement, mais le jeu induit par mon imagination dès qu’il commence à ne plus fonctionner me permettrait d’en apprendre un nouveau très rapidement, d’où l’évolution plus rapide de l’espèce humaine. En effet, bien qu’elle procède au hasard et ne soit jamais certaine du résultat, en imaginant d’avance un nouveau geste, mon imagination s’ajusterait quand même plus rapidement au changement que mon instinct : elle pourrait certes imaginer toutes sortes de manières de défendre un ancien automatisme même s’il ne lui procurait plus le même plaisir, mais elle pourrait surtout rapidement l’améliorer si une légère modification lui en procurait suffisamment.

 

Comme nos gestes, une fois acquises, nos idées deviennent aussi des automatismes de sorte que, quand elles sont confrontées à celles des autres, à leurs yeux nous paraissons, soit égocentriques si nous ne les changeons jamais, soit empathiques si nous les changeons toujours, deux différents comportements mais réductibles à une seule fonction : assurer sa propre survie le plus efficacement possible, y compris de manière subconsciente. Par conséquent, si quelqu’un me semble empathique lors d’une discussion, c’est qu’il tient tout simplement moins que moi à promouvoir ses idées : qui sait, un ami peut parfois devenir plus utile à la survie qu’une idée ! Par contre, si je n’ai aucun ami même si j’ai de bonnes intentions, c’est probablement parce que, sans pouvoir le percevoir, je me comporte de façon trop égocentrique, fermée ou introvertie. Impossible en effet de jauger mon propre comportement, je suis juge et parti : malgré ma bonne volonté, j’assure d’abord instinctivement ma survie, raison pour laquelle les autres doivent se méfier de moi. Inversement, impossible de jauger le comportement d’autrui car je ne connais pas son intention de plus, malgré sa bonne volonté, il assure d’abord instinctivement sa survie, raison pour laquelle je dois aussi me méfier de lui.

 

Cette méfiance vraisemblablement incontournable qui, de manière subconsciente, me force continuellement à garder mes distances, viendrait donc de l’insurmontable résistance au changement de mon instinct de conservation, lui-même issu de la nécessité, pour toute source de lumière, de conserver sa propre fréquence, donc son intégrité, en accélérant sur la lumière de ses semblables, ce qui lui permet aussi de conserver sa distance lumineuse. Mon imagination perçoit cette distance car elle essaye constamment de se rapprocher des autres au point de s’imaginer capable d’en percevoir le point de vue mais, naturellement, sans jamais y parvenir, exercice réciproque qui définirait progressivement notre ego, cette résistance imaginaire essentielle à notre évolution intellectuelle commune puisque, de quelque nature qu’elle soit, la résistance serait inhérente au changement.

 

Je peux aussi me servir de mon imagination pour composer un nouveau sentiment ou une nouvelle émotion à partir de ceux que j’ai déjà ressenti, et jouer ainsi la comédie de deux manières opposées, pour divertir ou pour tromper : un seul comportement cachottier dans ce cas, mais toujours les deux mêmes pôles auxquels je peux rattacher ma survie soit, être empathique ou égocentrique, risquer de me faire des amis ou des ennemis. Avec mon imagination, je peux même prendre conscience de certains de mes comportements instinctifs que je peux ainsi bloquer à volonté, y compris ceux de l’instinct sexuel, mais mes instincts doivent absolument s’exprimer quand je les ignore, ce qui signifie qu’ils doivent influencer mes pensées sans que j’en aie conscience, d’où cette nécessaire méfiance réciproque car notre instinct de conservation ne sert qu’à notre propre survie.

 

Par ailleurs, nous inciter à contrôler consciemment nos comportements subconscients constitue justement la vocation première de toutes les religions, comme s’il était toujours avantageux d’utiliser son imagination pour mieux se comporter cependant, contradiction évidente, honni soit qui s’en sert pour questionner les comportements subconscients induits par sa propre religion. J’aimerais pouvoir me servir de la Reptation pour mieux définir mes comportements cependant, s’ils se sont développés progressivement en même temps que mes idées, les deux auraient vraisemblablement pu se développer autrement dans un milieu différent de celui où j’ai vécu, ce qui ajoute à la difficulté puisque j’ai justement besoin de mes idées pour les définir. Sans repère commun stable, comment se situer par rapport aux autres ?

 

 

4.2 Le décalage direct

a.   Le décalage radial constant, que la reptation constante entre deux atomes caractérise, devrait entretenir une reptation intellectuelle constante entre nous. Deux individus ou deux groupes ont besoin l’un de l’autre pour progresser : si l’un est forcé de changer, l’autre change aussi, et ils progressent ensuite ensembles dans une nouvelle direction et à un nouveau rythme.

 

Ex. : attachement, amitié, affection, fidélité, affinité, patriotisme, loyauté, constance, …etc.

 

b.  Le décalage radial stationnaire, que la vibration entre deux atomes caractérise, devrait entretenir une reptation intellectuelle stationnaire entre deux individus ou deux groupes, mais sans affecter leur reptation constante. Nous avons des affinités mais aussi des différences importantes entre nous : selon les circonstances, nous pouvons interagir ensembles sans pour autant avancer par rapport aux autres, d’où la divergence de point de vue simultanée provoquant parfois rivalité, concurrence, ou même hostilité entre individus, familles, communautés, ou pays.

 

Ex. : attaque/défend, menace/protège, agit/réagit, force/résiste, provoque/réplique, ordonne/rétorque, allègue/réfute, …etc.

 

4.3 Le décalage indirect

a.    Le décalage transversal constant, que le mouvement orbital entre deux corps caractérise, devrait entretenir une reptation intellectuelle indirecte entre deux individus ou deux groupes, mais sans affecter leurs deux premières reptations. Instinctivement, nous nous regroupons pour assurer notre survie individuelle, ce qui nous oblige à transposer entre nous le même genre de règles que celles du mouvement orbital, mais qui assure indirectement un fonctionnement commun durable.

 

Ex. : compromis, coopération, collaboration, participation, association, organisation, coordination, harmonisation, …etc.

 

Le tableau suivant montre comment l’intention participe au comportement quand il s’agit de développer ou de respecter des règles communes.

Tableau I

Reptation intellectuelle indirecte

Feinte/esquive

Mauvaise intention

Bonne intention

Menteur, fraudeur, voleur

Comédien, prétexte, raison

Exigeant, sévère

Indulgent, clément

Égocentrique, malveillant

Altruiste, bienveillant

Rusé, astucieux

Discret, cachottier

Rancunier, mesquin

Charitable, généreux

Sournois, hypocrite

Franc, loyal

b.    Le décalage transversal transitoire, que les mouvements orbitaux entre eux caractérisent, devrait entretenir une reptation intellectuelle transitoire entre deux individus ou deux groupes, mais toujours sans affecter directement leurs trois autres reptations. En développant une nouveauté pour satisfaire mes propres besoins, elle risque de satisfaire toute la population : un comportement créatif utile à la survie individuelle induit celle d’un groupe.

 

Ex. : créatif, imaginatif, original, différent, inventif, novateur, …etc.

 

Le tableau suivant montre comment, pour répondre à leurs besoins essentiels, l’originalité de certains finit par induire l'évolution sociale.

 

Tableau II

Reptation intellectuelle transitoire

Variation individuelle

Évolution collective

M’instruire

Du mimétisme… à internet

Me vêtir

De la fourrure… aux fibres synthétiques

Communiquer

Du cri… aux satellites

Me loger

De la belle étoile… aux condos

Me nourrir

De la cueillette… à l’industrie agricole

Me déplacer

De la marche… à l’aérospatiale

Collaborer

Du clan… à l’ONU

Dans le tableau suivant, j’ai comparé les quatre principaux types de reptation physique aux quatre reptations intellectuelles correspondantes, ce qui devrait m’aider à mieux les analyser par la suite. J’ai aussi voulu vérifier jusqu’à quel point, dans le cas des reptations inter-nations et inter-personnes, les termes qui correspondent déjà à nos principaux déséquilibres intellectuels coïncident à ces quatre principales reptations.

 

Tableau III

 

 

Mouvement

Direct (radial)

Indirect (transversal)

Constant

Stationnaire

Cyclique

Transitoire

Les quatre principales

reptations

Reptation

constante

Reptation

stationnaire

Reptation

cyclique

Reptation

transitoire

Mouvement physique

correspondant

Mouvement

constant

Vibration

constante

Mouvement

orbital simple

Mouvement

orbital composite

Reptation intellectuelle

correspondante

Entraide

Accord direct

Opposition

Désaccord direct

Compromis

Accord indirect

Adhésion

Accord transitoire

Reptation

inter-

personnes

Équilibre

intellectuel

Égocentrisme

Priorité à

l’automatisme

Empathie

Priorité à

l’imagination

Règle

Entente

interpersonnelle

Goûts

personnels

Déséquilibre

intellectuel

Paranoïa

Repli sur

l’automatisme

Schizophrénie

Repli sur

l’imagination

Mensonge

Repli sur ses

propres règles

Cyclothymie

Repli sur ses

propres goûts

Reptation

inter-

nations

Équilibre

intellectuel

Nationalisme

Priorité au

conservatisme

Démocratie

Priorité au

changement

Traité

Entente

internationale

Valeurs

sociales

Déséquilibre

intellectuel

Paranoïa sociale

Repli sur le

conservatisme

Schizophrénie sociale 

Repli sur

le changement

Magouille sociale

Repli sur

ses propres règles

Cyclothymie sociale

Repli sur

ses propres valeurs

 

 

 

 

 

5. L’empathie et l’égocentrisme

Sans ses organisations, l’espèce humaine n’aurait pas pu évoluer si rapidement, mais puisqu’il est impossible de lire la pensée des autres, on ne pourra jamais connaître leurs intentions non plus, d’où cette méfiance à surmonter entre nous. Pour collaborer ensembles, il a donc fallu que les êtres humains acceptent, de bonne foi, de baisser leur garde sans pouvoir s’assurer de la bonne foi des autres, ce qui leur a souvent permis de se rapprocher suffisamment pour négocier un compromis, cet accommodement qui permet de réduire les variations individuelles au même dénominateur commun et d’établir des règles de fonctionnement durables. Même si aucune règle ne pourra jamais satisfaire pleinement tout un groupe, chacun devra toutefois pouvoir s’y conformer facilement sinon la confrontation sera inévitable et le groupe ne pourra durer longtemps.

 

Parce qu’il permet à chacun de bénéficier des autres, le compromis se trouve vraisemblablement lié à l’empathie, cette possibilité de s’imaginer que les autres ont la même bonne intention que soi, mais il s’agit tout de même d’une cachotterie car, après avoir négocié une entente, chacun conserve secrètement un certain désaccord. Une fois l’entente bien rodée, pour y déroger volontairement sans risquer d’être exclu d’un groupe dont je profite, je dois mentir même si je n’ai pas l’intention de nuire, une autre cachotterie bien intentionnée mais, puisque je convoite ainsi en secret un gain dont le risque est assumé par le groupe, ma sincérité est une illusion et, si mon geste est découvert, il sera considéré comme une menace. Par ailleurs, si celui qui déroge à la règle ne fait pas partie du groupe, ou si son geste est tel qu’il risque d’en être exclu, son intention est alors interprétée comme de la malveillance, comme s’il avait eu conscience de nuire, ce dont j’ai l’impression quand je suis victime de vol, de fraude ou de mensonge, ou même quand j’ai seulement connaissance que quelqu’un de mon groupe en est victime.

 

En croyant avoir été consciemment lésé, toute personne normale devrait vouloir se venger mais, personnellement, quand ça m’arrive, je veux seulement me protéger ou protéger ma communauté parce que je considère que nous sommes menacés, et je constate que, plus la société évolue, moins la vengeance est valorisée, ce qui appuie mon intuition selon laquelle personne ne pourrait se sentir malveillant en transgressant une règle car, avec ou sans sincérité, ce geste exclut l’empathie, de sorte que personne ne pourrait non plus regretter sincèrement un pareil geste s’il se fait prendre, mais seulement en mentant. Une règle juste permet la stabilité d’une entente, une sanction juste permet de conserver cette stabilité, mais l’idée de malfaisance induit celle de la vengeance : de la même manière dont le malfaiteur transgresse une règle commune, ce genre d’idée permet d’imposer unilatéralement sa propre règle, et elle induit nécessairement une riposte semblable. Décrit comme bienveillant, il me semble qu’un certain Dieu devrait pourtant se sentir malveillant en nous jetant consciemment en enfer pour l’éternité et ce, sans possibilité de riposte : un autre de ses contradictions surhumaines je suppose ! Encore aujourd’hui, certains croyants tuent ceux qu’ils considèrent comme hérétiques, pas nécessairement par vengeance mais simplement par cruauté animale, cruauté dont ils ne peuvent pas prendre conscience non plus puisqu’ils agissent instinctivement.

 

Selon moi, la cruauté vient de la nature même de la Reptation : s’accorder d’abord à la règle la moins restrictive, donc la plus récente, quitte à se rabattre sur une plus restrictive au besoin, donc plus ancienne. Je peux dissocier une molécule sans affecter ses atomes parce que, une fois isolés, chacun d’eux se replie spontanément sur l’ancienne interaction beaucoup plus restrictive entre ses propres composants. Quand l’imagination n’a pas le temps de développer un nouvel automatisme, elle se rabat sur les anciens, et quand ces derniers sont dépassés, elle se rabat sur l’instinct : du point de vue de celui qui utilise son imagination pour se mettre à la place de l’autre, celui qui ne le fait pas est inhumain alors que, du point de vue de celui qui s’en sert pour appuyer son instinct, l’autre n’est pas de la même nature, il ne répond pas à la même règle, ce n’est qu’un sous-humain. Pour un tortionnaire, je ne suis que de la vermine alors que, pour moi, tout être humain devrait finir par comprendre, mais comprendre quoi au juste ?

 

Avec la Reptation, nos comportements sont tout à fait naturels, mais notre imagination a l’impression d’être artificielle, d’être libre d’agir comme bon lui semble, quitte à se rattraper si elle se trompe, ou à mentir si elle se fait prendre à déroger aux règles. La raison fondamentale pour laquelle les êtres humains s’entre-tuent, c’est donc que leur imagination se croit libre de transgresser une règle si elle s’imagine pouvoir s’en passer, ce dont un atome ou un animal est incapable. Les animaux d’une même espèce ne s’entre-tuent pas car ils se reconnaissent entre eux, mais certains humains peuvent facilement s’imaginer qu’ils sont dans une classe à part et qu’ils n’ont pas à respecter la vie des autres. Respecter la vie de ses semblables a deux avantages pour une espèce animale, une prolifération et une diversité génétique plus importantes : cette règle est immuable et s’affine chez nous avec le temps. Puisque l’avenir est imprévisible, tant qu’il demeure en vie, chaque être humain participe aux possibilités d’évolution biologique de son espèce et sociale de sa société, d’où la réclusion et non la mort pour les tortionnaire, les meurtriers, les erreurs génétiques, ou tout autre individu jugé irrécupérable, mais seulement dans les sociétés les plus développées soit, celles où les règles sociales ont pu se raffiner parce qu’elles disposaient de temps pour en risquer de moins restrictives.

 

Fondement même de l’anthropocentrisme, l’espèce humaine s’imagine déjà au-dessus des règles naturelles depuis des lustres et fondement de l’égocentrisme, en s’imaginant différents de leurs semblables, certains d’entre nous se croient parfois au-dessus des règles humaines pourtant, jamais l’humanité ne devrait transgresser la règle première parce qu’elle régit toute existence, y compris la sienne. Cette croyance néfaste a vraisemblablement permis l’avènement de la démocratie car elle affaiblit nécessairement les populations qui la pratiquent. De nos jours, ce genre de croyance se retrouve justement chez les sociétés qui appuient la peine de mort, chez les organisations cruelles comme les dictatures, les groupes criminalisés et les armées, chez les psychopathes et les extrémistes de toutes sortes, une croyance meurtrière où l’imagination essaie de trouver de nouvelles manières de transgresser la règle la plus universelle qui soit. Pour un Croyant, vouloir le bien d’autrui, c’est lui imposer ses croyances, et s’il résiste, c’est qu’il n’a pas d’âme, donc qu’il n’est pas humain. Vouloir son propre bien au point de tuer des gens, c’est utiliser son imagination pour appuyer un instinct qui, sans elle, se débrouillait déjà très bien, d’où les contradictions qu’elle invente pour s’en laver les mains, ses fameuses raisons, terme qu’elle devrait toujours remplacer par prétextes quand leur échéance est trop éloignée pour être vérifiable.

 

Un bonne sensation me sert à continuer de réitérer un automatisme, une mauvaise à en imaginer un meilleur. Si un tortionnaire pouvait se sentir méchant devant sa victime, ce mauvais sentiment devrait le révulser, alors qu’il est au contraire heureux de se débarrasser d’une nuisance. Personne ne peut se sentir méchant de cette manière d’ailleurs, à ce que je sache, aucun tortionnaire n’a jamais exprimé de remord. Avec la Reptation, au même titre que nos perversions sexuelles, la méchanceté serait une idée perverse qui inciterait notre imagination à appuyer son instinct de conservation sans tergiverser. Même quand il ne s’agit pas d’un instinct, appuyer n’importe quel automatisme produit invariablement ce genre de pulsion perverse : plus l’automatisme est ancien, plus la pulsion est importante. Parce que la résistance subconsciente est inévitable, souvent, celle d’autrui induit chez moi l’idée qu’il n’essaie pas de me comprendre et, simultanément, celle que j’ai envers lui induit chez moi l’idée que j’ai raison, et vice-versa pour l’autre, c’est pourquoi, malgré toutes les meilleures intentions du monde, il est très difficile de demeurer calme en échangeant des idées, surtout si elles sont anciennes, car nos idées sont toutes des automatismes et que, plus elles sont anciennes plus elles dépendent les unes des autres, et plus elles s’appuient les unes sur les autres pour résister au changement.

 

Il arrive donc assez souvent que cette pulsion subconsciente me force à vouloir égoïstement imposer mon point de vue au lieu d’en discuter, toutefois, si je suis devenu convaincu d’une idée au point de ne jamais la questionner, je n’ai forcément jamais utilisé mon imagination pour l’acquérir car sa seule fonction est le doute. Ce genre d’acquisition ne requiert pas de questionnement, mais une soumission à l’autorité semblable à celle des enfants. Avec la Reptation, les idées qui résistent autant proviennent de la certitude des autres, elles sont inculquées, et elles induisent subconsciemment la conviction de ne pas pouvoir se tromper. Celui qui me trouve méchant veut peut-être que je change d’idée parce qu’il est convaincu que j’ai tord mais, jusqu’à nouvel ordre, celui que je trouve méchant veut simplement garder une idée qu’il n’a jamais pu remettre en cause, l’idée de méchanceté survenant chez moi quand l’autre utilise son imagination pour me menacer, et de bonté quand il l’utilise pour ne jamais s’opposer à moi.

 

Toutefois, si jamais je n’ose utiliser mon imagination pour vérifier mes propres idées auprès des autres, je ne l’utiliserai pas d’avantage pour vérifier les leurs, de sorte que je risque ne jamais développer d’opinion personnelle sur quoi que ce soit : aux yeux des autres, je parais empathique mais, à mes yeux, il m’est tout simplement impossible de leur déplaire. Selon moi, les femmes paraissent justement empathiques parce que, dans une discussion, elles utilisent surtout leur imagination pour s’assurer d’être appréciées, mais moins pour débattre d’idées, ce qui me donne parfois l’impression qu’elles n’en ont pas car, naturellement, elles refusent d’en débattre dès qu’elles ont l’impression que je ne les apprécie pas, ce qui survient inévitablement dans un échange d’idées à cause de la nécessaire résistance qu’elles induisent, mais non dans les discours destinés à divertir ou à informer que nous tenons souvent entre nous. Incapables de s’opposer ainsi aux hommes malgré leur capacité intellectuelle semblable, les femmes se restreignent peut-être encore elles-mêmes à occuper des fonctions dites « féminines » dans les sociétés où elles se sont pourtant émancipées.

 

Se tromper est un geste involontaire, une erreur, mais tromper autrui serait un geste volontaire, un mensonge. Encore une fois, la mauvaise volonté semble toujours venir des autres pourtant, je peux facilement me mentir en développant une idée, il me suffit simplement d’en réprimer le doute, comme je le fais présentement, pour commencer à y croire,… m’enfin, il faut bien croire un moment sinon, comment progresser ? Quand commencer à douter d’une idée et quand arrêter de vouloir la changer, voilà un questionnement inabordable pour qui croit posséder la Vérité ! Alors que pour moi, toute idée évolue avec le temps, pour un Croyant, il ne faut surtout pas en changer. Avec ou sans mensonge, autant le hasard de l’imagination peut servir directement à développer une future idée, autant il peut servir indirectement à en conserver une ancienne, quitte à développer une nouvelle idée à partir de l’ancienne mais qui en contredit le sens, impasse intellectuelle à laquelle nous avons donné le nom de paradoxe ou de mystère, et qui nous permet de supporter indéfiniment deux idées contradictoires sans jamais les questionner. Que les religions enrobent leur croyance de mystères va de soi, mais que les scientifiques acceptent des contradictions sans en questionner les fondements, dont le fameux « Paradoxe des jumeaux » de la Relativité, relève selon moi du même genre d’aveuglement collectif.

 

Pourtant, en développant ses idées, mon imagination doit atteindre ses limites et, puisque le hasard y est toujours en cause, elle peut facilement se tromper, deux excellentes raisons de toujours douter d’elles, ce que n’envisage jamais aucun Croyant. Mon doute est justement issu de la perception de cette limite, chez moi ou chez autrui mais, unique façon de ne jamais y percevoir de limite, pervertissant ainsi sa fonction première, le Croyant se sert uniquement de son imagination pour conserver et non pour questionner sa Croyance, ce qui lui permet de croire qu’il peut corriger ses comportements instinctifs en les traitant comme des fautes et curieusement, qu’il peut aussi, soi disant par bonté d’âme, corriger celles des autres. Ce genre d’empathie où je crois aider l’autre à se corriger alors que, visiblement, je n’arrive jamais à me corriger moi-même, s’appelle de l’hypocrisie, mais ce faisant, paradoxalement, un Croyant a seulement l’impression de ne jamais pouvoir se tromper !

 

 

 

6. L’instinct sexuel et son tabou social

 

AVERTISSEMENT

Ce chapitre traite de sexe de manière à ne pas exciter l’instinct

mais qui risque malgré tout de créer un important malaise chez la plupart !

 

En leur déclarant leur amour, ce comportement féminin inné, les femmes incitent les hommes à rester fidèles, donc à faire un compromis sur leur égocentrisme, toutefois, l’égocentrisme masculin oblige les femmes à demander la fidélité, donc à faire elles aussi un compromis, mais sur leur empathie, en n’accordant pas leur amour gratuitement, boucle rétroactive qui a pour résultat de réduire les pulsions sexuelles d’un couple à ses propres ébats. Selon moi, sans cette boucle subconsciente qui favorise effectivement une indéniable réclusion sexuelle, la propagation trop rapide de MTS n’aurait sans doute jamais permis la survie de l’humanité, ce qui la relie directement au tabou sexuel humain. Ce tabou concerne une fonction subconsciente dont l’espèce seule bénéficie, sa reproduction, mais dont les deux partis impliqués préfèrent ne pas discuter ensembles parce qu’elle induit chez chacun des pensées contradictoires différentes : nos fantasmes et nos perversions sexuelles. Pour simplifier, disons qu’il s’agirait d’une cachotterie intersexuelle mais, à l’ère du sexe virtuel, nous ne pourrons plus nous en cacher encore très longtemps alors, aussi bien nous la dévoiler ici : « discuter sans malaise de copulation est impossible tout simplement parce qu’elle allie contradictoirement plaisir et malpropreté, d’où la partie consciente du tabou qui nous empêche de le questionner, et la copulation à volonté est impossible aussi parce qu’elle allie dangereusement plaisir et épidémie, d’où sa fonction subconsciente qui nous empêche de copuler à volonté. »

 

Afin de procurer le plus de diversité génétique possible à l’espèce, l’instinct sexuel de chacun incite fortement leur imagination réitérer un plaisir qu’elle sait malpropre, d’où nos fantasmes, mais l’instinct de conservation inhérent à l’espèce en régule la manière pour éviter les épidémies de MTS, d’où l’instinct sexuel de certains mammifères régulé par des rituels sociaux particuliers qui induisent leur hiérarchie sociale, et la fonction sexuelle humaine régulée par le tabou et la morale qui induisent nos différents niveaux d’organisation sociale. Que ce soit pour un homme ou pour une femme, sans plaisir instinctif, un simple attouchement sexuel serait considéré comme déplacé par leur imagination, avec lui, se pourlécher l’arrière train est considéré comme une possibilité jusqu’à ce que les deux s’aperçoivent qu’ils ne peuvent pas en discuter parce qu’ils n’ont pas du tout les mêmes fantasmes.

 

Si je me fie aux miens, l’Homme a des fantasmes malpropres et il apprend que les femmes considèrent justement le sexe comme tel, mais il voit que les femmes sont généreuses et il aime le risque, ce qui lui permet de tenter des attouchements. Si je me fie à mes déductions, la Femme apprend qu’elle provoque chez l’Homme des pulsions qui la gênent, mais elle a des fantasmes de générosité tout en étant fondamentalement prudente, ce qui lui permet d’accepter des attouchements sous certaines conditions. Selon moi, cette prudence typiquement féminine sert justement à contrer les MTS, à preuve, le VIH joyeusement transmis entre gays, une variété sexuelle exclusivement masculine dont le goût du risque n’est pas freiné par la prudence féminine et qui, dernièrement, a subrepticement associé l’amour à sa perversion pour la rendre plus acceptable alors que, pour une femme, accorder par amour une faveur qu’elle sait malpropre est en soi une perversion.

 

Peu importe la manière dont leur imagination s’y prends pour accorder sa faveur, la fonction sexuelle des femmes ne vise que leur reproduction subconsciente toutefois, cette fonction touche aussi leur imagination par le plaisir qu’elle perçoit or, pour elles comme pour moi, le plaisir perçu empêche l’imagination de faire son travail et de questionner ce geste car elle ne veut pas risquer que cet irrésistible plaisir lui soir refusé. Par ailleurs, ce plaisir semble toujours plus irrésistible quand il concerne un nouveau partenaire, comme pour nous inciter à le vérifier de temps à autre quand on est en couple et, là encore, aucun questionnement à l’horizon, seulement la crainte d’être débusqué. Autrement nuisible à la stabilité des ménages, se pourrait-il que cette universelle transgression de la fidélité procure elle aussi un avantage évolutif ? La fidélité a beau empêcher les épidémies, elle réduit la nécessaire diversité génétique aussi de sorte que, sans trop augmenter le risque de MTS, avoir quelques partenaires sexuels différents durant sa vie permettrait nécessairement de la diversifier un peu plus et, preuve qu’il s’agit bien de comportements normaux, beaucoup de couples finissent par s’en accommoder. Toutefois, avec la prolifération d’internet et la tolérance qui est apparue récemment chez nous, copuler à volonté c’est risquer gros car, sans tabou ni morale, comme chez les gays, l’imagination n’a plus aucune restriction.

 

Preuve que le tabou sexuel est indiscutable, les femmes s’offusquent dès que j’aborde la fonction instinctive de leur amour pourtant, ce sentiment leur sert indéniablement à s’accoupler. Quand un animal est en rut, la pulsion qui l’envahit ne vient pas de son imagination puisqu'il n’en possède pas, elle s’exerce donc de manière subconsciente : induction des conditions chez la femelle et réponse aux conditions chez le mâle. Encore une fois, nos perversions humaines viendraient d’un conflit entre conscient et subconscient, entre imagination et instincts, de cette manière perverse que prennent ces derniers pour insidieusement envahir notre imagination d’idées inavouables. Appelées péchés ou fautes imaginaires par les religions, ces idées sont inavouables parce que l’imagination les trouve perverses, mais elle ne peut pas les empêcher de se manifester parce qu’elles lui procurent du plaisir, et elle est incitée à les mettre en œuvre parce que sa seule façon de fonctionner est de réitérer le plaisir perçu. Malheureusement, en réitérant un plaisir inscrit dans un cycle instinctif, elle risque de s’embourber dans une dépendance, ce que la morale des religions permettait justement de contrer en proscrivant ce genre de réitération, mais que seul le tabou peut maintenant contrer chez ceux qui ne croient plus.

 

L’instinct sexuel entre en si grande contradiction avec l’imagination que, malgré tout ce qu’internet exhibe, il est toujours gênant de parler sérieusement de sexualité, donc impossible d’expliquer simplement à ses propres enfants pourquoi des gestes malpropres et dangereux sont utiles à la reproduction. Internet leur montrant l’acte sexuel dans toute sa splendeur contradictoire afin de le stimuler, ils n’y trouveront pas d’explication non plus. C’est justement de cette contradiction que proviendraient à la fois nos fantasmes et nos perversions, les premiers étant considérés « normaux » parce qu’ils sont utiles à la reproduction, et les deuxièmes « anormales » parce qu’elles sont nuisibles à la survie de l’espèce. Pour assurer cette survie, un acte sexuel doit procurer le maximum de diversité génétique, ne pas propager trop rapidement les virus, et ne pas reproduire de tares de sorte que, sans morale, c’est uniquement l’instinct sexuel social qui peut dicter la bonne conduite, le tabou : jusqu'à maintenant, issue d’une imagination qui ignorait encore son propre fonctionnement, la morale ne faisait qu’appuyer aveuglément ce tabou.

 

La pédophilie serait donc encore considérée comme une perversion pour que la Femme puisse empêcher l’Homme de féconder ses propres filles, limitant ainsi la reproduction de tares et procurant d’avantage de diversité génétique, mais aussi pour que la société puisse l’empêcher d’abuser sexuellement de son pouvoir sur les jeunes et les femmes, limitant ainsi la propagation de MTS, fonction évolutive pour laquelle nous résisterions autant à libéraliser la prostitution. Toutefois, elle demeurerait imaginable pour l’Homme parce qu’une conjointe jeune est meilleure génitrice qu’une vieille, ce qui coïncide au mariage entre hommes mûrs et jeunes femmes accepté depuis toujours et dans toutes les cultures de sorte que, pour réguler efficacement cette propension subconsciente, la conduite à suivre consciemment d’ici à ce que l’imagination se soit comprise, la vieillissante morale, doit encore appuyer l’instinct social, le tabou. Curieusement, malgré le danger évident d’épidémie, outre le fait qu’elle est maintenant considérée comme innée au lieu de perverse, la sexualité gay est maintenant acceptée parce que, parait-il, la sexualité c’est de l’amour et que, sans abus de pouvoir, l’amour est nécessairement toujours une bonne chose, au point où, partout sur la planète, « Copuler sans restriction et sans intention de procréer » devient mystérieusement « Faire l’amour », y compris quand il s’agit de la dangereuse sodomie !

 

Avec la Reptation, l’amalgame sexe/amour est justement une contradiction instinct/imagination, mais c’est des femmes que provient cet amalgame particulier de sorte que, contrairement aux hommes, elles n’y ont jamais perçu de contradiction, ni chez elles ni chez les gays. Peut-être le rapprochement gays/femmes est-il dû au fait que ces derniers empruntent les manières des femmes, ou peut-être ces dernières sont-elle innée, mais de là à amalgamer eux aussi copulation et amour, il n’y avait qu’un pas ! De toute évidence, avec le déclin des religions et la montée de la tolérance en occident, cesser d’ostraciser les gays augmente les possibilités d’évolution sociale, mais croire que l’amour vaccine contre les virus et se retirer du dossier parce que, après tout, c’est à eux de se protéger, en plus de rayer cette population de la carte à mesure qu’elle apparaît, nous met tous à risque !

 

Preuve de notre négligence, dans la plupart des pays, aucune loi n’oblige encore les médecins à déclarer aux partenaires sexuels d’un patient que ce dernier a le SIDA de sorte que, contrairement à ce qu’il aurait fallu, les organisations gays soutiennent que ces derniers n’ont pas à le déclarer non plus à leurs partenaires et que c’est à chacun de se protéger, ce qui pourrait être applicable s’il était possible, pour celui qui la subit, de se protéger d’une sodomie sinon, il faudrait que tous refusent de copuler avec quiconque ne porte pas de condom, ce qui irait à l’encontre des fantasmes que doit provoquer l’imagination pour appuyer l’instinct sexuel. En effet, bien qu’on ait oublié cet avertissement que la religion affichait avec force, le but ultime de l’instinct sexuel n’est pas le plaisir mais la reproduction et, comme tous les plaisir, l’imagination de chacun veut réitérer celui-là de toutes les manières possibles, mais le condom n’en fait pas partie puisqu’il nuit à la reproduction ! La propagation du VIH chez les gays le démontre, malgré le danger évident d’une permissivité devenue si importante, ils ne peuvent pas se restreindre, parce que ce sont tous des hommes et que, contrairement aux femmes, ils n’ont aucune prudence instinctive. Jusqu’à maintenant, l’imagination n’a jamais rien pu contre ses instinct alors, quand elle prétend pouvoir s’en protéger, elle s’illusionne : d’ici à ce qu’elle se comprenne, elle devrait à tout prix éviter de s’y frotter. Les religions avaient compris que la conscience humaine pouvait parfois être dangereuse mais non qu’elle provenait de l’imagination, elles ont donc dû se contenter de freiner ses prétentions mais la Reptation pourrait peut-être faire mieux, …qui sait.

 

Le salaire est aux entreprises ce que le plaisir est aux couples : un avantage collectif pousse instinctivement les gens à travailler ensembles, mais leurs besoins individuels les obligent tout aussi instinctivement à négocier une juste part du gâteau. Dans le cas d’une entreprise, un morceau de cette part concerne le partage des bénéfices, dans le cas d’un couple, il concerne le partage du plaisir : ce plaisir est accordé à l’homme en échange du compromis sur son égocentrisme, et à la femme en échange du compromis sur son empathie. Instinctivement, les femmes demandent l’engagement avant de s’accoupler et, instinctivement aussi, les hommes se compromettent : « Tu m’aimes ? …  Ça ne se voit pas ? Tiens, voici des fleurs, preuve de mes bonnes intentions ». Voilà, c’est fait, le contrat est conforme même s’il est invérifiable : au diable la contradiction, le plaisir est plus impérieux. Pas surprenant que le tabou soit toujours actif malgré l’explosion sexuelle, quelle que soit l’époque, l’instinct veille toujours mais, avec internet, il est un peu dépassé par son imagination comme si, sans l’avoir cherché, celle-ci s’était offert un formidable outil pour observer son subconscient à l’œuvre. Dépassée elle-même par ses innovations, l’imagination a maintenant trois choix : soit elle laisse son instinct se réguler et éliminer lui-même les contrefaçons, ce qu’elle a toujours fait, soit elle cherche une potion pour contrôler son instinct, pour se contrôler elle-même, ou pour contrôler les virus, ce qu’elle fait déjà depuis peu, soit elle en profite pour mieux comprendre son propre fonctionnement, ce qu’elle tente de faire ici !

 

Avec leur émancipation, les femmes ont de moins en moins besoin des hommes pour élever des enfants, de sorte que leur contrat commun tient de moins en moins longtemps, ce qui multiplie inévitablement les échanges sexuels sans protection puisque « Mais quel hasard ! » c’est justement ce dont cet instinct a besoin et que « Quelle coïncidence ! » c’est devenu si facile de s’accoupler avec internet. Le danger de transmission virale augmentant avec l’usage et la reproduction artificielle étant capable de maintenir et même d’augmenter la nécessaire diversité génétique de l’espèce tout en écartant les virus et les tares, l’instinct sexuel serait-il appelé à disparaître ? Malgré l’apparente incongruité de cette intuition, puisqu’il s’agirait de la disparition d’un instinct qu’elle trouve tout aussi incongru, mon imagination comprend que, tout en multipliant les possibilités d’évolution de l’espèce humaine, cette disparition pourrait aussi multiplier les siennes, nous distinguant encore d’avantage des autres espèces. À quand la disparition de mon instinct de conservation …se demande-t-elle sarcastiquement ?

 

Moins d’instinct de conservation signifierait moins d’émotions incontrôlables, des sentiments et des intuitions plus subtils car issus d’empathie et d’égocentrisme moins extrêmes et, au final, une meilleure compréhension de nos comportements : quel soulagement mais malheureusement, quelle illusion de croire que ce genre de compréhension puisse nous aider à régler définitivement nos différents ! Avec la Reptation, la compréhension a trait aux liens que l’imagination tisse avec son milieu, donc aussi à ceux qu’elle tisse entre nous. Ce genre de liens aide à découvrir les règles qui régissent nos comportement pour en tirer un profit commun, donc aide à imaginer la bonne idée ou le bon sentiment favorable au compromis. Malheureusement la société évolue, et nos comportements évoluent avec elle, de sorte qu’il faut sans cesse s’y adapter en faisant de nouveaux compromis, et en y essayant de nouvelles règles.

 

De la même manière, essayer de comprendre la vie, c’est lui tisser de nouveaux liens, donc lui accorder de nouveaux sens mais, contrairement aux religions, en les vérifiant à mesure que nous les empruntons et en découvrant à mesure les règles qui les régissent, une quête dont nous ne devrions jamais trouver la fin sans quoi la vie n’aurait soudain plus de sens, ce qui implique qu’il n’y aurait soudainement jamais rien eu à tisser. Être dépressif, c’est avoir de la difficulté à imaginer un seul nouveau sens à sa vie, être exalté, c’est en imaginer trop facilement de nouveaux. Emprunter régulièrement de nouveaux sens sans vérifier que je suis suivi devrait m’amener là où personne ne se trouve, et ne plus trouver de sens à ma vie alors que je suis visiblement entouré de gens qui en trouvent devrait m’indiquer que j’ai emprunté un des leurs sans avoir régulièrement vérifié s’il me satisfaisait, donc si je le comprenais.

 

 

 

7. Les règles et les valeurs

Si je veux faire partie d’une communauté, je dois respecter ses règles, en échange, je profite de ses avantages. Avec ses règles, cette communauté m’empêche parfois de faire comme bon me semble mais, avec ses avantages, elle facilite quand même ma survie. Emboîtées l’une dans l’autre comme celles de toute Reptation, ces deux composantes intellectuelles s’expriment simultanément chez toutes les communautés, toutes leurs organisations, et tous leurs membres : il faut nécessairement à la fois des restrictions et des avantages pour se regrouper, que ce soit entre atomes ou entre nations. Parce que nous sommes tous différents, une restriction applicable à tous permet de niveler nos différences, et parce que nos fonctions individuelles sont toutes identiques, se regrouper permet de développer des fonctions communes, et il en va de même pour nos atomes.

 

Les restrictions que les individus d’un même groupe acceptent d’observer répondent à leur fonction première : survivre. En ce sens, l’existence d’un individu n’est pas juste une idée, mais bien un objet interactif dont la fonction première est la survie, fonction que ses atomes induisent chez lui, et qu’il induit lui-même chez les groupes dont il fait partie. Je ne peux pas tuer un membre de mon clan sans me désavantager parce que j’affaiblirais ainsi mon propre clan, mais je peux s’il fait partie d’un autre clan que le mien. Ce genre d’objet possède une masse durant son existence, ce qui n’est pas le cas de mes idées mêmes si je constate que, probablement pour survivre elles aussi, elles résistent visiblement au changement.

 

Comme elle le fait pour mes gestes, pour développer une nouvelle idée, mon imagination en modifie progressivement une ancienne et, à plus grande échelle, une société développe ses nouvelles valeurs de la même manière. Ayant déjà permis notre évolution, les règles favorisant notre survie sont immuables, mais les valeurs auxquelles nous adhérons en choisissant selon nos goûts résistent au changement à la manière de nos idées : elles changent progressivement. En multipliant ses possibilités d’évolution, les choix qui s’offrent à une société respectent tout de même la première règle : favoriser sa propre survie à tout prix, quitte à changer de valeurs pour y arriver. J’adhère aux valeurs politiques, éthiques, économiques, de ma famille, de mon milieu, de ma nation, et je les transmets à mes propres enfants, mais ils ne sont pas forcés de les conserver car elles ne sont pas nécessaires à leur survie. Autant nos règles ne doivent pas changer si elles doivent réguler le changement social, autant la diversité de ses valeurs permet à la société de changer de direction au besoin, voilà en gros pourquoi, sans menacer leur fonction originelle mais au contraire pour pouvoir la maintenir, une idée pourrait acquérir un nouveau sens, un individu pourrait exercer un nouvel emploi, une entreprise développer un nouveau produit, et un état opter pour une nouvelle orientation politique.

 

Pour que ma société puisse durer, ses règles devraient être issues d'un consensus collectif, donc pouvoir être facilement respectées par tout individu qui y adhère volontairement. Nécessairement transitoires, nos valeurs se développent par choix subconscient et collent involontairement aux individus qui font les mêmes. Un groupe idéologique politique, religieux, ou économique, qui s’impose de force à sa propre communauté finit toujours par appliquer ses propres valeurs comme si elles étaient incontournables, comme s’il s’agissait de règles, ce qui diminue inévitablement les possibilités d’évolution de cette communauté, et puisque ce genre de règle concerne seulement la survie du groupe en question, elle finit fatalement par diviser cette communauté en deux clans irréconciliables. Deux nations se donnent une identité commune en s’imposant une réglementation commune, mais les valeurs que ces nations possédaient déjà doivent pouvoir changer afin de diversifier leurs futures possibilités d’évolution commune. Le principal devoir d’un gouvernement serait de préserver la vie de ses commettants, il ne devrait la risquer que si elle était menacée, et non pour justifier ses propres valeurs. Un éventuel gouvernement mondial devrait donc soutenir l’ensemble des états en préservant la vie de leur population, mais en la risquant s’il était attaqué par des extra-terrestres, ce qui ralentirait inévitablement l’évolution mondiale si aucun extra-terrestre ne se présentait car, sans ces derniers pour en induire l’évolution, ses valeurs finiraient par teinter ses Lois.

 

Cette exemple caricatural illustre néanmoins assez bien la position de l’ONU, mais aussi du FMI, de la Banque Mondiale, et de l’OMC, dont les interventions unidirectionnelles à courte vue ralentissent probablement depuis leur début le processus d’évolution planétaire. Preuve qu’un automatisme est aveugle, rois et maîtres en matière de financement international, ces institutions croient sincèrement agir pour le bien de leurs débiteurs en leur prescrivant un mode de fonctionnement qu’ils n’ont même pas à respecter puisqu’ils n’ont aucune concurrence : la Loi du marché. Proposer des restrictions à un pays émergeant en échange de financement, c’est tenter d’en contrôler l’évolution, l’inverse de ce à quoi devrait me servir une règle si je ne suis pas menacé. Pour survivre à court terme, la Loi du plus fort est inévitable mais, pour développer l’humanité à long terme, c’est la Loi du hasard qui devrait prévaloir. Le développement des pays émergents passe par un véritable gouvernement mondial élu qui, sans veto, puisse enfin développer des règles que tous les pays sont capables d’observer, dont celle d’avantager les plus démunis d’entre eux au lieu de tenter d’en contrôler l’évolution.

 

Pour fonctionner à long terme, une règle devrait seulement préserver l’existence de chacun des participants qu’elle touche, se réduire à ce qu’aucun paticipant ne nuise à l'existence des autres, quitte à affaiblir le plus fort pour soutenir le plus faible, de manière à développer le plus de possibilités sociales possibles. À titre d’exemple, l’avantage évolutif de l’avortement et de la pilule serait que, pour le futur, l’émancipation des femmes induit d’avantage de nouvelles possibilités sociales et que, pour l’instant, l’augmentation de la population n’est plus utile à la survie de l’espèce. Au pouvoir, la droite devrait donc se contenter de préserver les restrictions sociales utiles à la survie de ses commettants, quitte à revenir à de plus strictes si leur survie est menacée, et la gauche d’en risquer de moins restrictives, quitte à ce qu’elles ne le soient pas assez si cette survie n’est aucunement menacée. C’est ce à quoi l’ONU devrait se réduire si jamais elle arrive un jour à gouverner pleinement mais, pour y arriver durablement, elle devrait d’abord résoudre la même épineuse question que ni les responsables de l’économie mondiale, ni ceux de la politique extérieure américaine semblent ne s’être jamais posée jusqu’à maintenant, ni non plus tous ceux qui dirigent les grandes religions, ou encore les transnationales opérant dans les pays ou la corruption est la seule règle : « Comment éviter d’ériger mes propres valeurs en loi quand je ne suis moi-même soumis à aucune loi » ???

 

Le mot « loi » n’a justement pas changé de sens avec le temps, contrairement au mot « culture » qui acquiert sans cesse de nouveaux sens avec l’évolution de nos sociétés. En retenant que toute culture évolue mais non ses lois, j’examine conjointement les termes culture et loi sous plusieurs angles pour mieux comprendre la société. Avec la Reptation, la culture est l’ensemble des valeurs sociales qui évoluent avec le temps, et la loi l’ensemble des contraintes sociales qui se précisent avec le temps. Alors que les anciennes lois demeurent le fondement des lois actuelles, des valeurs qui nous paraissaient importantes sont parfois reléguées aux oubliettes en une seule génération. Je peux développer une nouvelle valeur que personne ne pourra endosser, mais je ne peux pas implanter une nouvelle loi sans qu’elle puisse être respectée par tous. La culture constitue l’imagination d’une collectivité, un mécanisme indispensable à sa survie à long terme, la loi constitue son instinct de conservation, un mécanisme indispensable à sa survie immédiate. Mon subconscient s’occupe de respecter une règle après s’y être habitué, mon goût s’exerce de manière subconsciente quand je réitère un choix. Une loi perpétue la fonction même de l’existence, une valeur donne un sens et une importance transitoires à cette existence. Il n’y a pas de règle transitoire, mais les valeurs le sont toutes. Je peux développer d’utiles ou d’inutiles valeurs en observant les mêmes règles, de bonnes ou de fausses idées en utilisant le même langage, …dit-il en sourcillant à nouveau.

 

Comme en littérature, ces deux fonctions sociales représentent la forme et le fond d’une même œuvre, la forme concernant le respect de règles strictes, et le fond permettant d’exprimer son goût, ce que j’illustre aux Tableaux IV et V en indiquant l’origine et la destination de quelques uns de nos comportements. Par exemple, une règle tient son origine d’une entente entre des individus normaux, mais elle est destinée à contraindre par la suite les individus anormaux. De la même manière, un individu novateur est à l’origine d’une idée, elle-même destinée à ceux qui y adhéreront.

 

Tableau IV

Reptation intellectuelle indirecte

Origine: entente

Règle, forme, contenant

Destination: contrainte

Normal

Tradition, coutume, usage

Morale, précepte, dogme

Lois, règle, norme, principe

Contrat, traité, entente

Formalité, protocole

Anormal

Respectueux

Réfractaire

Soumis

Indiscipliné

Obéissant

Désobéissant

Vertueux

Amoral

 

Tableau V

Reptation intellectuelle transitoire

Origine: création

Valeur, fond, contenu

Destination: choix

Novateur

Goût, mode, parti politique

Rituel, croyance, religion

Culture, mœurs, habitudes

Théorie, idée, langage

Musique, sport, loisir

Adhérents

Rebelle

Fidèle

Indépendant

Dépendant

Autonome

Partisan

Libre

Adepte

 

 

8. Le synchronisme et l’improvisation

Tout en étant restrictives, les règles d’une société ne devraient jamais empêcher mais bien faciliter son évolution. J’accorde le sens ou l’importance de ma propre existence au hasard ou à Dieu selon mes goûts, mais nous partageons tous instinctivement la seule règle de cette existence car elle seule nous permet d’évoluer sans nous heurter : quelque soit le niveau d’organisation, pour fonctionner ensembles, il faut simplement s’accorder ensembles en faisant des compromis de part et d’autre, et pour qu’un groupe perdure, il faut que chaque participant puisse facilement respecter ses accords, malgré ses particularités.

 

La règle commune à deux atomes d’une même molécule est que leurs accélérations respectent la même fréquence, ce qui me permet d’identifier cette molécule par sa résistance à l’accélération (sa masse) ou par la lumière qui s’en échappe quand je l’accélère (son spectre). Le sens ou l’importance des accélérations entre les deux atomes de cette molécule varie au hasard de ses rencontres avec d’autres molécules, mais non leur fréquence, ce qui permet aux molécules de se rencontrer sans que leurs atomes se désaccordent. Je transpose à mon échelle : la règle commune à un couple de danseurs est que leurs pas respectent le même rythme, ce qui permet aux autres danseurs d’identifier ce couple par son inertie ou par les protestations qui s’en échappent quand ils le bousculent. Le sens et l’importance des pas entre les deux danseurs de ce couple varient au hasard de leurs rencontres sur la piste, mais non leur fréquence, ce qui permet à ce couple de contourner les autres sans se marcher sur les pieds.

 

En conservant le même rythme même s’il change de vitesse ou de direction, un couple de danseurs peut pratiquer n’importe quelle danse : il lui suffit de reproduire la même séquence de pas à chaque mesure musicale et de s’entendre sur certaines figures particulières pour que ses pas demeurent synchronisés. De plus, même si ces danseurs ne sont pas de la même taille, il leur suffit de s’entendre sur une grandeur de pas qu’ils peuvent tous deux respecter pour pouvoir danser ensembles. Si je lui ajoute l’imbrication de la Reptation, je peux appliquer le même principe aux mouvements sociaux : exactement comme une seule accélération entre deux atomes est composée des millions d’accélérations entre leurs composants, les grandes enjambées entre les groupes sociaux sont composées de la multitude des petits pas entre les participants, et tout ce petit monde peut demeurer coordonné si chacun respecte ses accords malgré la non-instantanéité de leurs interactions. C’est naturellement la même imbrication qui induit les nombreuses harmoniques d’une seule note de musique, qui permet d’improviser à plusieurs sur un même thème musical, d’échanger sur une même idée à partir de nombreux points de vue, d’exprimer ces différents point de vue en utilisant les mêmes mots, ou encore d’appliquer le même principe à plusieurs types de mouvements comme je le fais présentement.

 

Décomposer un geste permet de mieux comprendre la Reptation. Un pas de danse est constitué d’une seule accélération issue de la coordination de plusieurs autres, mais de même fréquence : celle du pied, de la jambe, de la cuisse, de la hanche, du torse, …etc., toutes ces accélérations étant issues des nombreuses impulsions beaucoup plus fréquentes entre le cerveau et chaque fibre musculaire concernée. Sans que nous ayons à nous en rendre compte, la réponse qu’un pas induit prend du temps pour revenir au cerveau, et l’ordre prend du temps pour retourner aux muscles, de sorte qu’il y a toujours un certain délai entre la réponse et l’exécution. Dans le cas d’un réflexe, ce délai doit être suffisamment court pour qu’un pas puisse la plupart du temps être rattrapé s’il rencontre un imprévu, mais l’exécution sera toujours en retard sur la réponse de sorte que, si le réflexe rencontre lui aussi un imprévu, la chute est inévitable. Dans l’atmosphère, la collision entre les molécules est inévitable elle aussi parce que leur lien lumineux n’est pas assez puissant pour induire leur reptation immédiate toutefois, à température et pression normales, les accélérations induites entre les atomes ont encore une grande marge de manœuvre, ce qui leur permet de rattraper tous les imprévus que les molécules rencontrent sans jamais se disjoindre ni même se désaccorder, comme de vrais professionnels sur une piste de danse.

 

En danse, le choix de la musique dépend conjointement des partenaires, mais le choix des improvisations dépend uniquement du goût de celui qui dirige, et il en faut absolument un seul sinon, même pour une danse à deux partenaires, aucune improvisation n’est possible. Si, pour danser ensembles, il faut toujours une seule tête dirigeante, celui qui suit doit donc parfois changer de partenaire pour pratiquer de nouvelles variations, fonction évolutive puisqu’elle produit d’avantage de possibilités, et pour laquelle toute organisation éprouverait le besoin de changer de dirigeants de temps à autre, dussent ses participants se rebeller pour les écarter. Mais, outre des élections ou des révolutions, y aurait-il une manière de choisir nos dirigeants qui induise d’avantage de possibilités à long terme sans nuire à leur nécessaire fonction à court terme, qui se résume à conserver ou à accumuler des gains ?

 

Cette fonction de meneur s’applique visiblement aussi aux clans de certains animaux toutefois, puisque sa force ou sa ruse n’aide aucun meneur animal à prévoir le futur, contrairement à la croyance générale, sa fonction génétique n’y serait peut-être pas de transmettre ses gènes de dominant mais seulement d’empêcher la reproduction de tares, sa fonction biologique serait d’empêcher les épidémies de MTS, et sa fonction sociale serait d’assurer la cohésion du groupe car, peu importe le meneur, il en faut un et un seul sinon le groupe se diviserait et perdrait ainsi sa cohésion. Comme toutes nos fonctions instinctives, ces deux fonctions animales sont aussi présentes chez l’humain car, non seulement les gènes d’un dirigeant ne sont-ils pas plus importants que ceux qu’il dirige, ou encore sa reproduction ne devrait-elle pas provoquer d’épidémie mais, même à court terme, aucun d’eux ne peut prévoir la future pertinence de ses choix. Toutefois, selon moi, parce que la cohésion sociale est encore utile, la fonction sociale meneur/suiveur empêche malheureusement les humains de remettre en cause le concept de gène dominant à l’origine de leur Loi du plus fort, dont découle depuis quelque temps leur malencontreuse Loi du marché, et de se distinguer ainsi des clans animaux en limitant volontairement leurs débordements instinctifs sociaux.

 

L’hypnose est un exemple frappant de ce genre de croyance que je considère comme une sorte d’effet placebo social : même si la fonction première de l’imagination est de vérifier tout changement suspect, il suffit qu’un sujet croie au mystérieux pouvoir d’un hypnotiseur sur sa pensée pour cesser de se méfier et lui obéir aveuglément, soumission animale subconsciente qui permet à certains meneurs de faire ce que bon leur semble avec leurs fidèles, y compris de les envoyer à l’abattoir. Pour me laisser hypnotiser, il faudrait d’abord que je croie que ma propre imagination ne m’appartient pas, ce qui me permettrait de l’assujettir à une imagination considérée supérieure, croyance qui permet aussi aux religions d’endoctriner les gens, mais plus facilement les jeunes car, dans sa jeunesse, l’imagination n’a pas encore appris à se méfier. Dans toute lutte pour déterminer un meneur il est impossible de gagner sans faire de perdant, mais tout à fait possible de s’imaginer meilleur après avoir perdu si on est humain et suffisamment orgueilleux, ce que le perdant animal ne pourra jamais faire car, ne possédant pas d’imagination, sa lutte est régulée par un instinct, mais que le perdant humain n’a jamais cessé de faire depuis qu’il en est doté en s’acharnant à vouloir mener à tout prix, allant ainsi jusqu’à transgresser la règle première en s’imaginant dans une classe à part.

 

Ce recours à l’imagination pour appuyer l’instinct induit de la cruauté animale entre les peuples, les organisations, et les individus, et élimine constamment de nombreuses possibilités intéressantes pour l’évolution de l’humanité. Qui plus est, avec le développement de la technologie, cette cruauté risque d’éliminer l’espèce au complet. Pour écarter cette possibilité, nous avons déjà commencé à restreindre la reptation sociale meneur/suiveur de manière à ce que, pour montrer qu’il est le plus fort, le meneur ne puisse pas imposer ses idées trop longtemps et, pour faire partie du groupe, le suiveur n’aie pas le droit de les questionner, reste à introduire cette subtilité chez nos organisations qui croient sincèrement pouvoir se réguler elles-mêmes tout en n’ayant à se soumettre à aucune règle, dont nos armées. L’orgueil pourrait facilement se limiter à entretenir la cohésion, et l’humilité pourrait remplacer l’orgueil dans une prise de décision dont les conséquences, aussi importantes puissent-elles paraître, resteront toujours aussi imprévisibles. Bien que, au quotidien, cette évolution soit imperceptible, c’est visiblement cette direction que nos sociétés suivent depuis l’antiquité : en effet, si certaines sociétés valorisent encore cet honneur dont les anciens textes religieux étaient remplis, cette valeur empreinte d’un orgueil typiquement masculin est en nette régression dans les sociétés où la démocratie est apparue. Issue d’un avantage évolutif, comme pour toute reptation, une fois lancée, une pareille reptation sociale peut s’induire d’elle-même : moins d’orgueil induit plus de questionnement, ce qui induit moins d’orgueil, ...etc.

 

L’instinct animal a vraisemblablement contribué à créer beaucoup de termes chez nous : imitant la force et le panache de certains animaux mâles, l’Homme pouvait ainsi intimider intellectuellement ses rivaux en nommant leurs défauts. Celui qui montrait quelque avantage a fini par être qualifié d’orgueilleux, et lui-même a fini par qualifier ses rivaux de jaloux, deux réactions instinctives justement considérées comme des fautes du point de vue de la religion catholique, mais qu’elle n’a pas pu s’empêcher de mettre en œuvre pour assujettir ses ouailles : prêcher l’humilité et se construire d’orgueilleux temples, voilà une façon toute masculine de maintenir son joug. Accuser secrètement autrui d’avoir ce que je voudrais avoir, de dire ce que je voudrais dire, de faire ce que je voudrais faire, de penser ce que je voudrais penser, …etc., c’est de l’envie, une autre faute considérée capitale dont découle la médisance et la calomnie soit, le fait de tirer profit de cette envie, qui empêche tout bonnement de questionner l’église. De ces fautes capitales ont naturellement découlé une ribambelle de fautes vénielles, mais qui correspondent toutes à des définitions égocentriques masculines.

 

En s’arrogeant la responsabilité de toutes les définitions dès le début, l’Homme ne pouvait définir la Femme qu’avec son propre instinct, en s’enorgueillissant de la conquérir et en la subjuguant par la suite. À mesure qu’il les définissait, il pouvait ainsi lui attribuer l’origine de ses pulsions instinctives, à commencer par la Faute Originelle puisqu’il s’agit aussi d’un instinct. S’il commettait quelque faux pas, c’était à cause d’elle, et elle ne pouvait même pas s’en défendre intellectuellement puisque, jusqu’à maintenant, elle n’en avait pas le Droit. Avec la Reptation, la distinction intellectuelle homme/femme participe vraisemblablement à la survie de l’espèce mais, tant que leur instinct sexuel demeurera actif, aucun des deux intellects n’aura préséance sur l’autre, au contraire, ils demeureront irrémédiablement tributaires l’un de l’autre.

 

 

 

9. La mutation et l’intuition

Avec la Reptation, le hasard transforme une société comme il le fait pour une espèce : telle une mutation, il suffit qu’une nouveauté issue d’un seul individu apparaisse par hasard, et qu’elle se maintienne suffisamment longtemps, pour qu’elle risque de transformer toute la société. Inversement, telle une sélection naturelle sociale, la société risque d’écarter cette nouveauté si elle lui nuit, et elle peut même développer des moyens pour prévenir les récidives. Si, par hasard, plusieurs accidents ont lieu au même endroit dans la même année, on y installera une régulation qui, si aucun autre accident ne survient au même endroit durant plusieurs années, deviendra partout la norme pour ce type de circonstances. Mais ce genre de processus transforme aussi mes idées : si, pour résoudre un problème, j’imagine une nouvelle solution qui fonctionne une première fois, et qu’elle fonctionne encore de nombreuses fois alors que je fais momentanément face au même genre de problème, telle une régulation, cette idée finira par s’exprimer d’elle-même pour me guider subconsciemment lors de pareilles circonstances, ce qui signifie que je n’aurai plus conscience du problème originel.

 

Dans mon introduction, j’explique comment mon imagination pourrait utiliser le hasard pour développer une nouvelle idée, mais il faudrait maintenant que j’essaie d’imaginer comment elle pourrait s’y prendre pour manipuler mes anciennes, et comment ces dernières arriveraient à se conserver et à s’exprimer de manière subconsciente malgré leur manipulation consciente. Avec la Reptation, j’apprends un nouveau geste en le réitérant consciemment, et je le retiens en continuant de le réitérer subconsciemment, ce qui me permet de l’utiliser tout aussi subconsciemment si sa réponse ne change pas, mais ce qui rend la définition subconsciente de ce geste de plus en plus lointaine dès que je cesse de m’en servir parce qu’il n’est plus lié à sa réponse, me permettant ainsi de le situer dans le temps si je dois m’en rappeler, comme pour tous mes souvenirs. À première vue, et bien que mon subconscient puisse effectuer un geste complexe de manière suffisamment précise, ce geste ne pourrait demeurer précis que si sa réponse continuait d’être perçue avec précision. Par conséquent, si mes idées me semblent toujours aussi floues, c’est probablement parce que la réponse qu’elles induisent n’est jamais perçue aussi précisément que celle d’un geste, …m’enfin, j’espère.

 

Toutefois, ce n’est visiblement pas le cas de mes gestes qui, même si je ne m’en sers plus, demeurent précis longtemps après avoir été automatisés : alors, comment ma mémoire procède-t-elle pour conserver cette précision avec le temps ? Avec la Reptation, je peux me servir d’une analogie ondulatoire pour l’imaginer : comme pour le spectre d’un atome donné, l’ensemble des impulsions sensorielles appartenant à un geste précis constituerait un véritable spectre lequel, une fois établi, continuerait d’être véhiculé en boucle dans le cerveau et ne varierait plus avec le temps de sorte que, comme pour la lumière qui nous parvient des étoiles après avoir voyagé durant plusieurs années, quelle que soit l’ancienneté de ce geste donc, malgré la diminution de l’intensité de son spectre avec le temps, je pourrais toujours comparer avec précision le geste actuel avec l’ancien. Que ce soit pour une idée ou pour un geste, la constance de leur spectre permettrait à mon imagination d’y improviser de nouvelles variations en procédant par interférence, leur ajoutant un nouveau sens ou une nouvelle importance tout en conservant le spectre original, qu’elle pourrait plus tard retrouver au besoin.

 

De cette manière, une intuition pourrait altérer la réitération d’une de mes idées un peu comme une mutation altère la reproduction d’un individu, leur dissemblance se trouvant à la fois dans la fréquence et dans la ramification d’essais, et leur ressemblance dans le processus de sélection naturelle qui limite la reproduction d’un essai s’il ne se trouve jamais d’utilité, ce que nous considérons souvent comme une faute dans le cas du hasard de l’imagination, mais comme une erreur dans le cas de celui d’une mutation. Aux échecs, avant de tenter un coup, j’imagine plusieurs ramifications et je tente celle dont j’imagine la réponse la plus agréable, puis je compare ce plaisir à celui que me procure la réponse de mon adversaire, et je corrige l’erreur s’il y a lieu. Au jeu de la vie, une espèce subit plusieurs mutations simultanément sans avoir prévu de réponse, et compare ensuite leur rendement à celui des nombreux individus normaux qu’elle possède déjà. Au jeu de la société, les deux processus se recoupent : comme pour l’évolution d’une espèce, le nombre d’individus à l’origine du processus d’essai et erreur qui permet l’évolution d’une société est important et, sans que la société ait à prévoir de réponse, la durée de ses essais se compte en nombreuses années mais, comme pour l’évolution d’une idée, une société peut avoir conscience d’une erreur, puis tenter de la corriger en essayant de prévoir la bonne réponse virtuelle et ce, même si la réponse réelle devrait prendre tellement de temps à se manifester que les deux réponses n’ont aucune chance de coïncider un jour.

 

Telle que l’indique notre résistance face aux changements que nécessiterait notre propre ravage écologique, dans la balance de nos imaginations, la survie à long terme n’a visiblement pas la même inertie que certains de nos automatismes, dont nos instincts. Qui plus est, puisqu’elle est planétaire, cette nécessaire inertie est devenue tellement grande que, même s’il était mis en œuvre dès maintenant, il est possible que le virage dont nous aurions besoin soit déjà trop accentué pour empêcher la sortie de route. Heureusement, autant l’imagination peut rapidement se mettre dans le pétrin, autant elle peut rapidement s’en sortir, non en essayant de prévoir un seul futur mais en utilisant la technologie qu’elle a déjà développée pour engendrer le maximum de possibilités dans un minimum de temps. Selon moi, le plus efficace pour elle serait justement de laisser tomber une partie de son égocentrisme, de son appui à son instinct de conservation, de son orgueil, de sa résistance au changement, pour pouvoir ainsi collaborer plus rapidement à tous les niveaux d’organisation ce qui, me semble-t-il, lui permettrait effectivement de tenter un maximum de possibilités, dont certaines pourraient rapidement s’avérer utiles, et d’autres seulement à long terme. Encore ici, découvrir ses règles de fonctionnement permettrait de réguler efficacement un problème social actuel, ce qui induirait le maximum de possibilités pour le futur.

 

 

 

10. La spontanéité et la créativité

Les langues finissent par changer au gré de l’évolution sociale mais, malgré cela, la définition de la plupart de leurs termes demeure claire : un malvoyant demeure un aveugle. Toutefois, quand ces termes désignent nos facultés mentales, et même s'ils ne changent pas, ils sont souvent difficiles à distinguer : par exemple, comment distinguer l’un de l’autre les termes instinctif, intuitif, spontané, créatif, quand je veux décrire une œuvre originale ou son créateur ? La conscience elle-même ne possédant toujours pas d’explication claire, il n’est pas très surprenant que nos facultés mentales soient encore si mal définies. Avec la Reptation, conscience et résistance au changement sont synonymes : j’ai conscience du changement perceptible de mon milieu, mais aussi du changement virtuel opéré par mon imagination sur mes automatismes. Une fois acquis, mes automatismes demeurent subconscients tant que leur réponse demeure constante, mais cette réponse devient consciente si elle change, de sorte que mon imagination peut les modifier virtuellement, pour ensuite les vérifier concrètement de sorte que, à force d’être réitérées, ces modifications finissent par se conserver et s’exprimer à leur tour de manière subconsciente.

 

Parfois cependant, mon imagination veut conserver un automatisme quand quelqu’un s’y oppose, elle résiste ainsi volontairement à son changement, consciemment, et elle ressent le même plaisir qu’elle avait imaginé quand elle obtient le résultat espéré, donc quand elle gagne, mais c’est uniquement à partir du plaisir d’imaginer un nouveau geste ou une nouvelle idée qu’elle apprend, se distinguant ainsi des autres animaux. Dans les deux cas, il s’agit du même plaisir de surmonter la résistance, mais aussi de cette perception que j’ai de mes idées ou de mes gestes quand ils résistent au changement, de leur image qui apparaît mystérieusement quand j’essaie de les changer ou de les exprimer quand même, d’où le terme imagination. Tenter de changer une idée, c’est percevoir moi-même l’embryon d’une nouvelle idée à partir d’une ancienne parce que son goût me semble à la fois nouveau et agréable, mais je dois la vérifier après avoir fait des modifications au hasard sur l’ancienne, expérimenter en tâtonnant, ce qui prend du temps. Décider, c’est choisir selon mon goût habituel entre deux idées semblables que je n’ai pas nécessairement imaginées moi-même, sans vouloir les changer, spontanément, au hasard aussi mais sans tâtonnement, à pile ou face quoi.

 

Ma spontanéité serait donc attribuable à la réaction rapide de mes automatismes, dont mon instinct est le plus prompt, et ma créativité serait liée à l’incertitude de mon imagination, dont mon intuition serait la phase la plus subtile : voilà comment ces quatre termes se distingueraient l’un de l’autre avec la Reptation. Par conséquent, pour arriver à développer une nouvelle idée ou un produit qui fonctionne, il faudrait de l’imagination et non de l’instinct, de la créativité et non de la spontanéité, de l’intuition et non du sentiment ou de l’émotion, de la persévérance et non de la volonté, du doute et non de la certitude, de l’humilité et non de l’arrogance, de l’espoir et non de la détermination, de la liberté et non de la coercition, mais il faudrait avant tout ce synchronisme inouï qui permet de développer simultanément cette abondance de possibilités différentes chez chacun de nous. Si tous les termes qui concernent nos facultés intellectuelles sont tous aussi ambigus, il n’est pas surprenant que nous ayons souvent de la difficulté à rester calmes quand nous échangeons des idées.

 

Avec la Reptation au moins, le terme est clair, nos « décideurs » n’ont pas à utiliser leur imagination pour s’adapter mais seulement pour décider. Gérer ainsi signifie protéger spontanément ses propres acquis et, s’il reste du temps, ceux de l’organisme pour lequel on décide. Impossible d’évoluer de cette manière : en gestion comme en évolution, seul le risque individuel actuel est garant du futur changement collectif car, sauf s’il est tout près et que rien de significatif ne change, le futur n’est pas manipulable. Le changement est la spécialité de l’imagination toutefois, puisqu’il est impossible de mettre son imagination au service du long terme et trop facile de l’utiliser pour son propre court terme, une organisation aurait avantage à changer de décideurs régulièrement mais, selon moi, il faudrait trouver mieux que des élections. Déjà, nos élections limitent le copinage et, en une vaste reptation sociale, accélèrent périodiquement nos sociétés de leur droite à leur gauche, de leurs automatismes à leur imagination, de leur passé à leur avenir. Par ce jeu, la Démocratie développe d’avantage de possibilités destinées à l’évolution sociale malheureusement, et bien que personne ne pourra jamais prévoir leur future utilité, tous les partis politiques veulent développer les leurs à tout prix.

 

Quand, en son nom, les politiciens nous invitent à voter en grand nombre, la Démocratie est probablement le dernier de leurs soucis car, ne pouvant pas prévoir où ce nombre ira, selon moi, chacun d’eux espère plutôt convaincre de sa sincérité le plus grand nombre d’électeurs possible. Même si les sondages pré-électoraux nous prouvent l’inutilité de ce nombre depuis plusieurs décennies, de manière contradictoire, aucun parti n’admet leur efficacité tout en les utilisant abondamment pour élargir leur électorat. Souvent imprévisibles jusqu’à la dernière minute, avec la Reptation, les élections donnent simplement aux gagnants l’impression d’avoir fait un bon choix, et aux partis l’impression que leurs idées sont meilleures de sorte que, une fois majoritaires, les élus réduisent tout bonnement l’évolution de leur société aux croyances de leur parti, ce qui lui permettrait tout de même d’évoluer si le pouvoir changeait de main régulièrement mais, une fois élus, d'avantage persuadés que leurs idées sont meilleures, ils se servent inévitablement du pouvoir pour être réélus, ce qui devrait ralentir cette évolution.

 

Quand nous votons, nous croyons tout aussi sincèrement que nos idées sont meilleures mais, justement parce que ce genre de changement est vraisemblablement utile à l’évolution sociale, invariablement, nous finissons tous par perdre nos élections. Avec la Reptation, pour induire la même évolution, il suffirait que la gauche et la droite acceptent d’échanger régulièrement le pouvoir entre elles par sondage d’opinion. Adieu aux dictateurs en herbe qui, comme nous tous, croient sincèrement pouvoir améliorer l’avenir de leur société en privilégiant longuement leurs propres choix, et adieu à la corruption visant le financement de partis politiques, ou de politiciens, aveuglés par la même sincérité. Toutefois, pour y arriver, il faudrait peut-être remplacer l’orgueil du pouvoir par l’humilité de se sentir utile donc, remplacer les politiciens par des politiciennes durant un moment, ce qui semble aussi être en train de se produire.

 

Comme les deux atomes d’une molécule, il est nécessaire de s’appuyer sur un semblable pour évoluer mais, comme les molécules entre elles dans un gaz, prévoir le futur est impossible car, en devenir, ses futures possibilités ne sont pas encore arrivées à maturité. Voilà pourquoi aucune idéologie ne peut espérer évoluer en s’appuyant sur elle-même, et pourquoi laisser nos valeurs évoluer au hasard permet d’assurer le maximum de possibilités : aucune valeur n’est vitale à court terme, et toutes ne peuvent offrir de rendement qu’à long terme. De ce point de vue, les élections ne serviraient qu’à battre son adversaire en amassant le plus de partisans possible, ce fameux plaisir animal meneur/suiveur caractérisé chez l’humain par le rejet des autres partis et l’obéissance au chef, mais trop souvent empreint du fanatisme aveugle que seule l’imagination sait entretenir. Comme les animaux, les partisans expriment de l’humilité envers le chef mais de l’orgueil envers les autres partis, un mouvement d’acceptation d’un côté et de rejet de l’autre semblable à la reptation qui entretient la cohésion entre les deux atomes d’une même molécule mais repousse les autres molécules, une double accélération intellectuelle centripète qui explique assez bien l’aveuglement politique, mais aussi celui qui concerne nos autres types d’automatismes, dont nos idées. En voulant les changer ou les garder, mon imagination fait inévitablement face à ses propres idées, tournant ainsi momentanément le dos à celles des autres.

 

Comme je l’annonçais, pour éviter l’illusion de la sincérité et l’aveuglement du fanatisme en politique, il y aurait peut-être mieux que de élections : pourquoi ne pas essayer cet outil dont l’imagination profite déjà ? Avec la Reptation, la balance du pour et du contre qui permet à l’imagination d’élire une idée ne la laisse pas magouiller pour rester au pouvoir, mais l’oblige plutôt à revenir s’y peser à mesure que son milieu évolue. Dès que le goût d’un automatisme change, l’imagination en a conscience et réagit immédiatement : ou bien elle entame un processus de changement, ou bien elle endure encore un certain temps, ou bien elle devient momentanément masochiste et appuie cet automatisme. Un pareil outil est déjà disponible quasi gratuitement sur internet, il permet de mesurer rapidement l’opinion des gens et est applicable à n’importe quelle décision politique, n’importe quel politicien, et n’importe quel gouvernement. Seule ombre au tableau mais de taille, sauf si la majorité des participants devient masochiste, son utilisation risquerait d’éradiquer la collusion et la partisannerie ! Par conséquent, j’imagine qu’il faudra attendre que la première génération née avec un Téléphone intelligent en guise de hochet ait obtenu le droit de vote, pour que le sondage en continu sur internet ait plus de chances d’être admis en politique. D’ici là, préparons-nous à voir évoluer nos vieux égos parce qu’ils risquent de subir toute une cure de rajeunissement, …et Verte en plus.

 

En sachant comment un sondage internet fonctionne, mon imagination peut maintenant tenter de formuler la manière qu'elle utilise pour tenter de changer mes automatismes. Selon elle, la question d’un sondage se compare à la remise en question d’un automatisme, et les votes des participants se comparent aux impulsions sensorielles provenant de ses capteurs. Par l’intermédiaire de son spectre, pour vérifier si le milieu dans lequel ses capteurs baignent a changé, mon imagination serait constamment en train de comparer un automatisme actuel au précédent. Si une partie du spectre a changé, c’est que son milieu a changé, et elle peut dès lors procéder par essai et erreur pour tenter d’améliorer cette unique partie. En optique, il existe différents outils pour manipuler les impulsions lumineuses incidentes selon leurs différentes propriétés : diffraction, absorption, réfraction, réflexion, polarisation, …etc. En procédant lui aussi par essai et erreur, le cerveau humain aurait acquis la capacité de modifier un spectre d’impulsions en développant le même genre d’outils, mais spécifiques aux impulsions sensorielles, ce qui lui aurait permis d’apprendre plus rapidement que celui des autres espèces.

 

Si je me fie à mes caractéristiques intellectuelles, je n’aurais peut-être pas duré longtemps dans ces nombreux pays ou l’espérance de vie est encore si basse car je me trouve trop différent de la norme pourtant, il est possible que ma thèse soit admise et finisse par devenir utile, réflexion que peu de mes contemporains plus normaux auraient pu entreprendre car la plupart avaient déjà trouvé leur utilité. Si j’avais été contraint à survivre ou à travailler sur d’autres idées que les miennes, je n’aurais pas eu autant de temps pour y réfléchir, et je ne serais peut-être pas arrivé à ce résultat que je trouve si intéressant. Pour que la société évolue intellectuellement, c’est ce genre de possibilité qu’il faudrait encourager, et ce genre de contrainte qu’il faudrait éviter. Selon moi, pousser les gens à être plus compétitifs comme le veut la nouvelle mondialisation de l’économie ne permettrait pas ce genre de résultat.

 

Après avoir longtemps bénéficié du confort de base offert gratuitement aux moins normaux de ma société, et n’ayant jamais manqué de rien, il me semble que ce n’est pas de confort supplémentaire mais bien de remise en question dont nous aurions plutôt besoin présentement en occident. En grève depuis plusieurs mois pour protester contre la hausse des frais de scolarité, c’est justement ce genre de remise en question que les étudiants québécois réclament : ils veulent empêcher les institutions scolaires de devenir plus concurrentielles comme le voudrait la lancinante Loi du marché. Comme eux, « je crois » pour l'instant que la connaissance et l’orgueil ne font pas souvent bon ménage.

 

 

 

11. L'imagination et nos croyances

« Je crois » est une première idée, selon laquelle une autre idée, comme « en Dieu » par exemple, pourrait ne plus évoluer, ce qui induit sa résistance extrême au changement. Selon moi, cette idée que croire est synonyme de définitif vient de la fonction même de mon imagination qui, pour la vérifier, réitère nécessairement une nouvelle idée un certain temps sans la changer, ce qui l’oblige donc à y croire durant ce temps. Par conséquent, en croyant ne plus avoir à créer de nouvelles variations pour faire progresser une idée, elle pourrait effectivement l’empêcher d’évoluer. À l’inverse, tout en y créant des variations, elle pourrait croire qu’elle n’a plus à les vérifier, provoquant ainsi un enchaînement d’idées débridées que je pourrais mettre en œuvre spontanément si je suis éveillé, d’où mes rêves débridés quand je dors puisque je ne peux effectivement pas y vérifier mes idées. L’équilibre entre des idées qui se conservent et s’expriment de manière subconsciente, et mon imagination qui les modifie de manière consciente, serait contrôlé par leur rapport constant avec mon milieu, leur déséquilibre se traduisant par ce que nous appelons de la paranoïa si je croyais ne plus avoir à faire évoluer aucune idée, et de la schizophrénie si je croyais ne plus avoir à vérifier aucune intuition. Dans le premier cas, tout changement me semblerait suspect et, dans le second, toute nouveauté me semblerait possible.

 

Mais je possède aussi une troisième faculté mentale : un neurone devrait pouvoir ressentir ses propres impulsions si elles varient parce qu’il devrait nécessairement résister à ce changement. À son époque, Galilée avait déjà réalisé qu’il était incapable de percevoir son propre mouvement sans repère visuel, mais à condition qu’il soit constant car, même sans ce repère, la moindre accélération est perceptible. De la même manière, même quand mon cerveau est coupé de toute perception externe, la résistance au changement de ses neurones devrait demeurer perceptible, ce qui se traduirait par ce que nous appelons généralement la Conscience, donc aussi celle de mes perceptions externes quand elles varient. À la fig. 1, chaque domaine de mon cerveau perçoit les sensations des autres domaines, y résiste, et transmet la partie qu’il ne peut pas utiliser aux autres domaines de telle sorte que, si le domaine de l’imagination se mettait à faire varier les sensations échappées des autres domaines en croyant ne plus avoir à en vérifier la pertinence, je deviendrais cyclothymique : au lieu de gérer mes automatismes, mon imagination réitérerait en boucle émotions/sentiments/intuitions tout en y induisant artificiellement des variations, risquant ainsi de rendre les hauts et les bas de cette reptation stationnaire aussi insupportables qu’inutiles, mais aussi d’en devenir tout aussi dépendante que n’importe quel de ses plaisirs, et de finir par croire que ce genre de dépendance est utile à sa survie.

 

Si elle s’avère, la Reptation deviendrait un principe sous-jacent à toute interaction, y compris intellectuelle : à la manière d’une règle qui permet à un groupe d’individus de fonctionner ensembles, un principe intellectuel est une idée principale vérifiable dont la constance permet de réguler l’interaction entre un groupe d’idées. Telle la fréquence de la lumière, un principe devrait demeurer inchangé s’il devait permettre à mes idées d’évoluer, mais une croyance devrait finir par évoluer sinon elle risquerait de bloquer mon évolution intellectuelle, surtout si elle était régulée par un principe aussi invérifiable qu’un dogme religieux par exemple. La croyance fait appel à l’imagination, « je crois en Dieu signifie j’imagine que Dieu existe », mais une imagination qui n’a pas encore imaginé à quel point elle peut se tromper longtemps.

 

 

 

12. Le hasard et la coïncidence

Pour survivre, il faut souvent se déplacer ce qui, par hasard, provoque beaucoup de rencontres imprévues entre nous, mais qui, par hasard aussi, crée nos habitudes. Je résiste à changer d’habitude, mais aussi ceux qui ont les mêmes que moi ce qui, par coïncidence entre nos habitudes individuelles, induit l’offre et la demande de nos biens et services communs, mais ces habitudes peuvent changer si, par hasard encore, certains d’entre nous développent de nouveaux choix. Si je comprend bien, ma survie immédiate dépendrait de ma résistance au changement, ma survie à plus long terme dépendrait du changement, et les deux assureraient ensembles la durée de mon existence. Si je prend pour acquis que mon imagination dépend déjà du hasard alors, malgré le fait que ma résistance au changement soit prévisible, tout ce qui me concerne demeurerait imprévisible.

 

Pour développer un nouveau geste, je provoque des modifications au hasard sur un ancien jusqu’à ce que j’obtienne le résultat espéré mais il se peut que, par hasard, un tout nouveau geste provoque une réponse intéressante mais inattendue. C’est ainsi que la Connaissance est parfois issue de découvertes fortuites découlant elles-mêmes du hasard de l’imagination, ce qui signifie qu’une coïncidence peut en induire une autre mais aussi que, régulièrement, une multitude de coïncidences semblables surviennent au beau milieu de mes automatismes sans même que je m’en rende compte. La preuve, il arrive justement que j’en prenne conscience quand, soit par imprudence, soit par malchance, il m’arrive un accident. Mais qu’est-ce qu’une imprudence sinon une malchanceuse possibilité issue du hasard de mon imagination. En parlant d’imprudence, j’espère que ceux qui ne croient pas au hasard ne vont justement pas me concocter une malchance après avoir lu cette thèse, …dit-il pour montrer jusqu’où peut mener le hasard de l’imagination !

 

Le plaisir que je dois ressentir avant de réitérer un nouveau geste induit le goût qu’il aura une fois acquis, et je pourrai retrouver ce goût au besoin si rien ne change, comme celui que m’a procuré à l’origine un outil, un événement, un son, un vêtement, une idée, un lieu, un aliment, une personne, une odeur, ...etc., mais tout finit quand même par changer sans que, heureusement, mon plaisir en soit diminué. Contrairement à la croyance de certains, nos goûts seraient donc liés à l’évolution de notre milieu, ils évolueraient imperceptiblement avec lui et ils influenceraient nos choix de manière subconsciente après avoir été acquis, nous identifiant ainsi involontairement à ceux qui font simultanément les mêmes que nous en accompagnant le moindre de nos gestes. Je n’ai pas conscience de son goût quand rien ne perturbe une de mes habitudes car il n’a pas besoin de changer, mais je suis forcé d’en prendre conscience quand mon milieu change car il doit justement en induire une nouvelle. Voilà pourquoi, quand j’ai subitement conscience de goûter un aliment habituel, c’est souvent parce que son goût est assez différent de celui auquel je suis habitué.

 

Si, à l’origine, choisir selon le plaisir ressenti était essentiel à la survie instinctive animale, avec l'imagination, le plaisir d’apprendre par essai et erreur pourrait devenir nuisible à la survie humaine si j’étais persuadé de pouvoir m’en servir pour prévoir l’avenir. La Reptation, l’imagination et l’évolution procèdent de la même manière pour tenir compte des imprévus, mais aucune de ces fonctions ne sert à les prévoir. Mon imagination développe des possibilités, réitère l’une d’entre elles dès qu’un plaisir est perçu, et doit la réitérer plusieurs fois pour l’automatiser, mais elle ne pourra jamais l’automatiser si elle doit attendre trop longtemps avant de la réitérer, qui plus est, cette possibilité risque même d’être devenue inutilisable si son milieu a trop changé. Autant l’imagination pourrait se racheter à court terme, autant elle se raconterait littéralement des histoires quand elle croit pouvoir le faire à long terme : bien qu’elle doive ressentir du plaisir avant d’exécuter un nouveau geste, quelque soit le temps d’attente, elle ne pourra jamais prévoir d’avance ce qu’elle ressentira après l’avoir exécuté.

 

Tenir compte de l’avenir, c’est espérer une coïncidence entre le plaisir imaginé maintenant et celui perçu plus tard malheureusement, ne sachant pas que le processus même de leur imagination est issu du hasard, ceux qui se disent médiums croient pouvoir lire l’avenir uniquement parce qu’ils ressentent du plaisir à l’imaginer. On pourrait penser que ce type de croyance est sans conséquence puisque, de toute façon, elle reste inutilisable mais, quand elle s’érige en dogme religieux, elle peut ralentir considérablement l’évolution car, quel que soit le temps dont ils disposent, une croyance semblable empêche ceux qui y adhèrent de remettre en question ce qu’ils considèrent comme un acquis ! Par ailleurs, le plaisir d’imaginer que le passé était meilleur peut aussi devenir nuisible. En effet, quand j’étudie l’histoire, je cherche à éviter ses erreurs ou à reproduire ses succès mais, puisque l’humanité évolue sans cesse, si elles sont suffisamment lointaines et qu’elles concernent des valeurs mais non des règles, il y a peu de chance que ses coïncidences passées me soient utiles présentement, et il y en a encore moins qu’elles puissent m’aider à prévoir mon avenir. Malheureusement, les religions qui croient connaître d’avance le sort de l’humanité, croient aussi que son passé est garant de son avenir, et elles agissent pour rapprocher virtuellement l’une de l’autre ces deux extrémités au point de nier toute forme d’évolution, y compris celle de Darwin.

 

 

13. Les différents types de hasard

Pour qu’il y ait évolution, les lois de la nature ne doivent pas changer, car elles servent justement à réguler le changement. Depuis toujours, les anciennes lois naturelles deviennent progressivement le fondement des plus récentes, et le cumul de leur découverte constitue ce qu’on appelle la Connaissance. La Reptation n’en représente qu’une parcelle, mais son application à tout ce qui existe y jette un éclairage inédit. Pour deux atomes d’une même molécule, la règle commune consiste à s’accorder à la lumière de l’autre : d’abord, chacun doit évidemment produire les mêmes impulsions lumineuses que l’autre, mais aussi, chacun doit produire ses impulsions au moment où il perçoit celles de l’autre. Pour conserver leur ponctualité, si l’un est accéléré l’autre devra accélérer aussi, mais plus tard puisque leur lumière n’est pas instantanée.

 

Puisqu’elle est constante, cette lumière transporte alors, sous forme d’effet Doppler, une valeur très précise de leur variation temporelle, ce qui induit entre eux des accélérations qui observent la même ponctualité, mais dont l’importance peut varier avec l’effet Doppler, la résistance avec l’intensité des impulsions incidentes, et le sens avec leur inclinaison. Ces accélérations sont si ponctuelles quand elles sont constantes que les impulsions qui s’en échappent absorbent presque totalement les impulsions incidentes dans la ligne de visée des accélérations. Cette valeur que transporte la lumière entre les atomes est semblable à celle que nous transportons intellectuellement entre nous, et la seule façon d’échanger nos valeurs sans nous heurter est aussi de nous accorder entre nous sur des règles communes : toujours la même loi naturelle fondamentale. Découvrir les lois naturelles permet d’éviter certains accidents et, de la même manière, nous devrions découvrir de nouvelles lois sociales à mesure que nos sociétés évoluent, ce qui devrait en régulariser les mouvements et nous permettre d’éviter leurs précédents soubresauts.

 

Par ailleurs, le hasard des mutations, des croisements génétiques, de l’imagination, des rencontres sociales, …etc., a provoqué l’évolution intellectuelle qui nous permet maintenant de découvrir et d’utiliser ces lois : il ne s’agit donc pas du même type de hasard que celui qui cause les soubresauts. Ce dernier est destructif, mais il est perceptible et mesurable, de sorte qu’il demeure prévisible, évitable et surtout non désirable. Au contraire, celui qui provoque l’évolution est constructif, mais aussi imperceptible et impondérable, ce qui le rend imprévisible, inévitable et surtout désirable. Avec la Reptation toutefois, la comparaison ne s’arrête pas là : le premier type de hasard concerne la rencontre entre deux reptations d’un même ordre, comme celle entre deux molécules, deux individus ou deux pays, et le deuxième induit l’Existence avec un grand E, une reptation composite inextricable qui passe simultanément de la reptation entre les particules à celle entre les astres dont les mêmes particules font partie, de celle entre les individus à celle entre les nations dont les mêmes individus font partie, de celle entre les neurones à celle entre les idées dont les mêmes neurones font partie.

 

Imbriquées les unes dans les autres, toutes ces reptations évoluent de manière simultanée mais en y subissant d’inévitables décalages temporels. Si, par hasard, une mutation génétique apparaît et que, par hasard, l’individu concerné survit parce qu’elle lui est utile, elle risque de se transmettre à toute la population si, par hasard encore, elle est utile à cette population et le demeure suffisamment longtemps. Le changement apparu sur la reptation initiale entre les deux brins d’une molécule d’ADN transite d’une échelle à l’autre et finit par atteindre celle entre les espèces. À chaque étape, il faut du temps pour que le changement progresse, ce qui induit l’inévitable résistance qui participe au changement, à commencer par celle qui justifie la masse de chacun des atomes en cause.

 

Si les possibilités constructives de la vie et de la société se développent simultanément et en plusieurs lieux différents, au contraire, celles de l’imagination se développent une à la fois et sont triées sur le volet, ce qui n’empêche pas cette dernière de les accumuler et de les ramifier avant de les exprimer, d’où la nécessité de réitérer virtuellement ces possibilités pour en soupeser le plaisir et les retenir si elle veut apprendre efficacement, fonction que l’espèce ou la société ne pourront jamais développer car leur milieu change aussi rapidement que de nouvelles possibilités surgissent, mais que l’imagination a pu développer puisqu’elle pouvait vérifier et corriger concrètement certaines de ses possibilités virtuelles sans que le milieu où elle se trouvait ne change de manière significative.

 

Nos interactions provoquent des accélérations entre nous au même titre que la lumière entre les atomes, mais ces accélérations dépendent d’abord de chacune de celles entre nos atomes, dont dépend ensuite le déplacement de nos molécules les unes par rapport aux autres. Parce que la lumière échangée entre les atomes est beaucoup plus puissante que celle qui s’échappe des molécules, les échanges entre les molécules sont beaucoup plus lents et diversifiés que ceux entre leurs propres atomes, et nos propres échanges le sont encore d’avantage, ce qui explique la lenteur mais aussi la grande diversité de choix simultanés dont dispose l’évolution sociale. Avec internet, je peux même évoluer intellectuellement sans me déplacer, augmentant ainsi la quantité de choix que je peux faire dans un même temps, et diversifiant simultanément les possibilités d’évolution de ma société, les miennes, celles d’internet, …etc. Puisque ce genre d’interaction est en train de devenir la norme et qu’il est très prolifique, il devrait considérablement accélérer tous les types d’évolution qui dépendent de l’imagination.

 

 

 

14. Les différents types de plaisir

Avec la Reptation, autant le plaisir de voyager dans le temps empêche l’évolution sociale, autant celui que procure l’humour empêche l’évolution intellectuelle. Le rire et les pleurs sont instinctifs, dès la naissance ils servent à communiquer l’accord ou le désaccord, le confort ou l’inconfort, le plaisir ou la douleur et, profitant de l’occasion, l’imagination les utilise pour apprendre. J’apprends à plaire aux autres en me servant de leur rire comme guide et je rie pour qu’ils apprennent à me plaire, mais je n’apprends pas grand chose à rire de mes travers sinon que je ne les contrôle pas pourtant, il y a de plus en plus d’humoristes qui le font à ma place et qui réussissent effectivement à me faire rire ! Avec eux, on peut se moquer de nos difficultés ou de nos malchances, se parodier et ironiser sur notre pauvre sort, se taquiner et plaisanter sur tous les sujets, mêmes ceux qui sont tabous. Un peu comme pour le soulagement que procure une prière, se déculpabiliser de nos comportements servirait à soulager notre imagination, car ils l’inquiéteraient souvent et, à cause du bénéfice de la cohésion, elle serait d’autant plus soulagée de voir que les autres en rient aussi, mais ce soulagement ne l’aiderait aucunement à les comprendre.

 

La compréhension est aussi exclue dans les nombreuses émissions de bouffe et de voyage, de quiz et de romans savons, de télé réalités diverses, de sports et de variétés, ...etc., mais chacune d’elles utilise ce plaisir particulier pour nous fidéliser, pour que nous recommencions, justement ce que l’imagination veut faire dès qu’un apprentissage lui procure du plaisir. Selon moi, l’imagination y trouve encore son compte parce qu’elle serait soulagée de ne plus avoir à réfléchir, comme quand elle prie et, naturellement, elle serait d’autant plus soulagée de voir que les autres le sont aussi. En reproduisant ce type de plaisir, elle éviterait de se tromper en se restreignant elle-même, car le risque est malheureusement sa seule fonction. Vu le grand nombre de ces émissions, peut-être est-elle fatiguée de prendre des risques, mais peut-être aussi n’a-t-elle pas encore trouvé le meilleur moyen de fonctionner.

 

L’imagination est apparue récemment chez nous, elle est encore très jeune mais, à mesure qu’elle améliore la survie de son espèce, elle augmente ses propres possibilités d’évolution. En sachant que son seul avantage sur les autres animaux a été l’apprentissage, elle devrait progressivement apprendre à mieux utiliser les nombreux plaisirs qui s’offrent à elle, comme celui des drogues qu’elle cherche encore trop souvent à réitérer au risque de développer une dépendance, celui de la cohésion qui l’empêche de questionner le meneur, celui de mener qui manque d’humilité, celui de traiter ses semblables comme s’ils n’étaient pas de la même espèce, l’extravagant plaisir sexuel qui empêche la compréhension homme/femme, celui de lire l’avenir ou de se fier au passé, d’accumuler des gains sans nécessité, de manger, de s’anesthésier, …etc.

 

 

 

15. La croissance et la spéculation

Le rapprochement entre valeur sociale et valeur boursière est trop invitant : puisque les spécialistes se perdent en conjectures sur les ruades du système économique, à l’image de l’ensemble de cette thèse donc au risque de trop m’avancer, je vais tenter d’appliquer la Reptation au peu de connaissance que j’en ai. Selon la plupart des spécialistes, en répondant aux choix des consommateurs, et malgré la spéculation, la surproduction, et la surconsommation, les Marchés financiers devraient s’autoréguler: prétention de facto contredite par les observations puisque de nombreux états y interviennent constamment pour tenter de demeurer concurrentiels, mais de manière contradictoire puisqu’ils dérèglementent simultanément leur commerce extérieur. Seule manière d’intervenir sur sa propre économie, chaque état manipule sa propre inflation et sa propre croissance à sa guise par l’intermédiaire de sa banque centrale, mais en spéculant puisqu’il est impossible de prévoir un pareil futur, ce qui provoque parfois une fluctuation exagérée des devises et des bourses, perturbe les échanges économiques internationaux, et affaiblit invariablement les pays, les entreprises, et les individus les plus faibles au profit des plus forts.

 

La croissance et la spéculation qui motivent les décisions financières des états, motivent aussi celles des institutions financières, dont les bourses. La valeur boursière des entreprises me permet de jauger régulièrement leur taux de croissance les unes par rapport aux autres, je peux ainsi spéculer sur leur futur rendement et espérer faire plus de profits que de pertes. Comme pour la loto, j’ai déjà du plaisir à imaginer que mes placements vont prospérer, et je suis convaincu d’en avoir d’avantage si je gagne mais, sans transgresser les règles, il est très improbable que je gagne en spéculant et, sans croissance, aussi bien garder mon argent. Sans croissance donc, beaucoup d’intervenants économiques perdraient leur raison d’être, voilà principalement pourquoi, malgré les dommages écologiques et sociaux que cette croissance cause, tous préfèrent croire à sa nécessité que de la remettre en cause. Sans croissance et sans spéculation, le seul plaisir d’un placement serait d’imaginer l’amélioration du milieu où je vis avec, en prime, l’impression d’avoir été chanceux s’il s’améliore, mais malheureusement pas le plaisir égocentrique de gagner d’avantage qu’autrui ou d’avoir mieux réussi que lui.

 

Avec la Reptation, l’imagination devrait se contenter du plaisir d’apprendre toutefois, jusqu’à maintenant, le plaisir d’investir se résume à celui de gagner de l’argent, le même que celui de gagner un match ou un argument, de l’emporter sur autrui, de préférer s’imposer que de discuter, ce fameux « attrait du gain ». Cet attrait aurait pu se limiter aux gains réguliers dus à la croissance, mais la popularité des loteries montre que, pour ressentir du plaisir, je n’ai pas besoin de gagner, mais seulement d’espérer. Ce genre d’espoir n’a rien à voir avec l’évolution si rapide de nos sociétés, au contraire, il ressemble plutôt à celui des religions qui, voyant qu’il est difficile de refuser certains plaisirs, et réalisant qu’il est souvent néfaste de les réitérer, refusent toute évolution, donc tout l’avantage de s’en servir pour apprendre, en voulant remplacer tout le plaisir terrestre par l’espoir d’un éternel plaisir céleste. Si nous n’avions pas ce plaisir à espérer tout le bonheur qui pourrait nous arriver, mais sans réaliser que jamais nous ne réussissons à l’atteindre, et sans réaliser non plus que ce plaisir solitaire risque de devenir nuisible à notre survie collective, il y aurait peut-être moins de crises financières, mais aucun Marché financier ne peut corriger spontanément ce genre de comportement puisque, son ultime composant, c’est chacun de nous et que, subconsciemment, nous sommes tous aussi égocentriques les uns que les autres.

 

Dans ce sens, la très populaire Carte de crédit à la surconsommation permet de ressentir un plaisir que je n’ai pas à imaginer d’avance, le plaisir d’obtenir immédiatement ce que je veux, de plus, puisque je ne peux pas imaginer un nouveau geste sans prévoir qu’il fonctionnera, j’ai de la difficulté à imaginer que je n’aurai aucun plaisir à rembourser. Ce produit bancaire qui mise sur la compulsion provoque beaucoup de faillites personnelles mais, contrairement à celles des Subprimes, il ne contient pas d’immobilier à revendre, raison pour laquelle le taux d’intérêt en est si élevé. Malheureusement, dès qu’une banque développe un nouveau produit qui améliore rapidement son rendement, pour ne pas être en reste, toutes les autres s’empressent de renchérir, et rien sauf leur propre Loi du marché soit, le plaisir d’imaginer leurs propres gains, ne les empêchent d’en développer d’autres, …jusqu’à ce que l’improbable apparaisse comme s’il avait été inévitable. Malgré les crises à répétition, les nombreuses banques qui ont misé sur les Subprimes soit, n’en avaient pas prévu d’autres soit, n’avaient pas prévu que l’immobilier deviendrait impossible à revendre lors d’une forte crise, de sorte que ce douteux produit a été honteusement rayé de leur panoplie après la crise. Par contre, les non moins douteuses Cartes de crédit pullulent encore honorablement.

 

Pourtant, à force d’être poussés au crédit par les banques, plusieurs y accumulent des dettes importantes et, quand la croissance ralentit suffisamment, elles ne sont plus remboursées assez rapidement de sorte que, puisque le phénomène continue de s’amplifier, en nous endettant, les banques risquent la faillite. Comme on a pu le voir, une seule d’entre elles y a été contrainte lors de la crise des Subprimes car, oubliant subitement leur omnipotente Loi du marché, chaque état concerné s’est empressé de renflouer ses banques pour s’éviter le pire, ce qui a augmenté la dette des états et affaibli les plus faibles puisque les plus forts ont décidé de le demeurer. Ce ne sont pas des états qui ont imaginé et commercialisé les Subprimes, mais des banques privées pourtant, dans le sauve-qui-peut qui a suivi, aucune compensation n’ayant été prévue par les états, donc par des lois, les emprunteurs qui avaient signés des contrats impossibles à remplir avec les banques ont tout simplement été laissés pour compte une fois la crise passée. En effet, s’en remettant à nouveau à leur Loi du marché pour ne pas se sentir redevables, contre toute attente, les banques ont très vite recommencé à faire des gains outranciers, et les gouvernements ne les ont pas d’avantage restreintes, sauf le parti socialiste nouvellement élu en France qui, durant sa campagne électorale, au risque de ralentir la croissance de l’état français, a «promis» de taxer les gains financiers.

 

Le réseau financier étant devenu mondial, seule une régulation planétaire pourrait parvenir à limiter ce genre de comportement mais pour ça, il faudrait que tous les gouvernements puissent faire les compromis nécessaires donc, sans la menace d’aucun veto ! Financer les individus ou les pays pour stimuler la croissance, c’est financer la croissance des autres pour pouvoir maintenir la sienne : de l’égocentrisme se transformant en paranoïa quand ça tourne mal, mais sans beaucoup de risque pour les banquiers qui, pour l’instant, profitent toujours d’extravagants bonis même quand ils ont failli. Avec la Reptation, un intervenant financier pourrait profiter de la croissance, mais sans avoir le droit de la stimuler.

 

La masse d’un atome vient principalement de son noyau et, de la même manière, ce qui résiste le plus au changement chez un animal c’est son instinct de survie mais, quand cet animal est un humain, son imagination y ajoute l’incertitude reliée à l’avenir. Avec son imagination, chaque groupe ou individu cherche constamment à améliorer son sort en essayant de prévoir un futur imprévisible donc, en accumulant le plus de gains possibles et en essayant de les conserver mais, comme tous opèrent fondamentalement de la même manière, pour s’en tirer mieux que les autres il faut, soit s’accaparer du gain d’autrui, soit mettre ses gain en commun, ce qui peut être interprété de différentes manières par l’imagination, d’où les principales idéologies sociales actuelles : Capitalisme, Socialisme, Communisme.

 

Il n’y a rien de nuisible dans une idée si je l’utilise pour améliorer le sort de mes semblables, y compris celui de mes rivaux mais, avec une imagination qui ne peut pas reconnaître ses limites, je peux imaginer n’importe quoi si je ressens du plaisir, et je risque de ne pas reconnaître la douleur des autres si je ne la perçois pas. Pour moi, développer le plus de possibilités possible pour prévoir l’imprévisible devient alors : faire le plus de gains possible dans un même temps, en obtenir d’avantage pour un même effort, continuer à améliorer mon sort même s’il n’est aucunement menacé, voilà de quoi est capable l’imagination, et pourquoi un être humain normal supporte mal de ne pas progresser même quand il n’y est pas forcé ce qui, heureusement pour nous, n’est pas le cas des autres animaux. La croissance économique appartient à l’idéologie capitaliste, c’est un simple essai tenté par l’ensemble d’une société pour prévoir son avenir, mais puisqu’avec ses crises, sa pollution, et sa dépense effrénée en ressources non renouvelables, elle menace déjà notre survie à court, à moyen, et à long terme, il serait peut-être temps pour nous d'accepter qu'elle ralentisse car, sans pour autant perdre nos acquis, il me semble que nous aurions ainsi d’avantage de temps pour trouver de nouvelles manières de progresser.

 

 

 

16. La gravitation et l’inflation

Même quand leur reptation est constante, l’accélération entre les sources de lumière est décalée avec le temps, mais la fréquence de la lumière qui s’en échappe demeure la même après s’en être échappée. Débutant au cœur même de la matière, la courte accélération entre les composants les plus ultimes est décalée de manière constante en résistant à la progression de l’accélération beaucoup plus longue entre les atomes dont ils font partie, puis les molécules dont ces atomes font partie ré-accélèrent sur la lumière des molécules adjacentes, mais beaucoup moins qu’elles avaient été décalées car, presque complètement absorbée par la reptation entre les atomes, cette lumière est devenue très faible. À cause de cette faiblesse, les liens stables entre les molécules sont beaucoup moins forts que ceux entre leurs atomes de sorte que, lorsqu’elles sont en phase gazeuse, elles peuvent pratiquement se déplacer librement les unes par rapport aux autres, mais elles dépendent alors des nombreuses accélérations entre leurs atomes pour le faire. Quand ces molécules s’agglomèrent pour former des astres, la faible lumière qui s’échappe de chacune d’elles se trouve alors fortement concentrée et provoque de constantes ré-accélérations entre ces astres, ce qui en induit les mouvements orbitaux. La lumière qui relie les astres entre eux s’échapperait ainsi du cœur de chacun de leurs composants les plus ultimes et provoquerait plus loin l’accélération de leurs semblables, mais en induisant une reptation particulière entre certains composants de fréquence semblable au passage, entretenant ainsi des formes durables à des paliers temporels particuliers, dont celui des amas de galaxies, des galaxies, des astres, des planètes, des molécules, des atomes, des nucléons, des quarks, …etc.

 

Cette forme que nous possédons se serait développée progressivement à partir de formes moléculaires très instables, mais dont certaines étaient plus stables, peut-être justement parce que leur reptation commune était mieux synchronisée. Ces molécules se reliaient et se déliaient vraisemblablement sans cesse dans l’eau où elles se trouvaient, jusqu’à ce que certaines prolifèrent parce qu’elles arrivaient à se reformer plus rapidement lors de bris de sorte que, n’eut été des mouvements de la masse liquide elle-même, leur milieu aurait fini par s’épuiser, car il fallait qu’elles réparent leurs bris de la même manière dont elles s’étaient construites soit, par proximité avec d’autres molécules semblables, jusqu’à ce qu’elles trouvent le moyen d’accumuler les molécules nécessaires à leur réparation, de subir moins de dommages en s’entourant d’une paroi puis, de se reproduire en se servant de molécules spécifiques pour se diviser et se recomposer immédiatement à l’identique, toutes ces trouvailles s’étant produites par hasard et accordées ensembles avec le temps, comme le veut la seule loi naturelle qui soit.

 

Par le même processus, ces organismes unicellulaires ont évolué et se sont mis à former des organismes de plus en plus complexes jusqu’à ce qu’un jour, en renouvelant par hasard la propagation d’un changement chimique entre deux de ses extrémités, l’un d’entre eux arrive à reproduire, à son échelle, la reptation entre ses atomes, justement parce que, principe-même de la Reptation, le changement produit à une extrémité n’atteint pas l’autre extrémité instantanément. Induite sur un organisme de forme appropriée, cette reptation a vraisemblablement su le propulser une première fois dans l’eau où il se trouvait en repoussant sans cesse les molécules d’eau dans la même direction, lui permettant ainsi de récolter plus rapidement les molécules nécessaires à son fonctionnement, dont celles qui lui permettaient de continuer de nager. La reptation vivante était née : elle allait évoluer et produire le vol, la marche, la préhension, …puis plus tard avec nous, la parole, l’écriture, le moteur, …et enfin dernièrement, l’électronique et l’informatique.

 

La vie dépend de cet échange constant entre les différentes molécules en suspension dans l’eau, dans l’air et dans le sol, lequel dépend d’abord des vastes mouvements de la phase liquide et gazeuse de certaines d’entre elles, mais aussi de leurs échanges avec le sol. Même quand il n’y parait pas, tous ces mouvements moléculaires seraient constitués de reptations, y compris notre propre durée de vie, les plus grandes étant formées des plus petites, comme pour toute reptation. Par conséquent, les petites subissent aussi un décalage par rapport aux grandes, décalage qui est ensuite ré-accéléré de proche en proche, ce qui produit les ondes des différents milieux moléculaires, mais aussi les courants entre les différentes masses d’eau et d’air, les échanges entre les différentes fonctions d’un même organisme biologique, et ceux entre les différentes fonctions d’une société : d’où les innombrables phénomènes de croissance suivi de déclin qui participent à toutes les formes d’évolution biologique, mais aussi d’évolution sociale ou intellectuelle, en y transmettant progressivement leurs décalages temporels de l’échelle microscopique à l’échelle macroscopique.

 

Présentement, à cause de la prolifération de l’espèce humaine, la population de nombreuses espèces est en baisse. Le fait que notre population soit toujours en hausse, ou que notre consommation énergétique augmente avec le progrès, participe vraisemblablement à la croissance économique dite réelle mais, pour moi, le progrès lui-même vient de cette volonté d’améliorer mon sort en anticipant le futur, de ce plaisir que mon imagination ressent présentement parce qu’elle risque du nouveau même si, visiblement, j’ai déjà tout ce qu’il me faut pour vivre, un plaisir utile à mon évolution intellectuelle actuelle mais, qui sait, éventuellement aussi à celle de mes semblables, d’où le plaisir supplémentaire que mon imagination espère. Présente chez tout individu ou tout groupe, cette version intellectuelle de la reptation lumineuse originelle explique peut-être la croyance répandue selon laquelle la croissance économique est nécessaire, mais le décalage lumineux qui, même pour un mouvement constant, induit la reptation entre les sources de lumière, implique qu’une certaine partie de cette croissance ne serait pas liée au progrès, et qu’il faudrait cesser de la stimuler tant que nous ne connaîtrons pas la règle de cette reptation particulière.

 

La reptation lumineuse veut que, même si le mouvement d’une molécule est constant, puisque ce mouvement dépend de l’accélération entre ses atomes, qui dépend elle-même de celle entre leurs composants respectifs, la fréquente reptation entre les composants de chaque atome subit un décalage constant par rapport à la reptation beaucoup moins fréquente entre les atomes, décalage qui augmente avec la distance lumineuse, donc avec le temps, et qui provoque un phénomène particulier directement observable, l’effet Doppler cosmique, lequel est comblé par une accélération directement observable elle aussi, celle des molécules les unes envers les autres, leur gravitation. Si j’observe leur lumière, j’ai l’impression que les astres accélèrent pour s’éloigner de moi, une illusion car, si j’observe mes atomes, je vois au contraire que ce sont eux qui accélèrent pour demeurer synchronisés à la lumière en provenance des astres, d’où la gravité terrestre et la gravitation universelle, une accélération bien concrète à laquelle rien ne devrait échapper, y compris l’économie. En effet, si ce type d’accélération constante est inhérent à toute reptation constante, il devrait affecter l’économie même quand elle ne subit aucun changement.

 

Si je remplace l’échange de lumière par l’échange d’argent, et le temps qu’il faut à un atome pour encaisser une seule impulsion par celui qu’il faut à un salarié pour encaisser un seul sous alors, l’effet Doppler cosmique équivaut à l’apparente augmentation des prix durant ce temps, et les accélérations bien réelles des atomes pour combler cet effet radial équivalent aux augmentations bien réelles de salaire qui servent à combler directement l’inflation, mais sans jamais l’arrêter puisque, quel que soit le rythme de ce rattrapage, il y aura toujours un certain décalage entre les deux. Comme pour toute reptation, avec le temps, ce décalage se transmet entre les salariés et les entreprises, et entre les petites et les grandes entreprises car, même sans aucune croissance réelle, que ce soit pour les entreprises ou les salariés, les prix continuent d’augmenter entre le moment où chacun débourse et celui où il encaisse, d’où l’inflation du point de vue des salariés et des entreprises quand ils achètent, et la croissance du point de vue des entreprises quand elles vendent, car la demande augmente au moment où les entreprises augmentent les salaires en fonction de l’inflation, deux accélérations de même sens qui les incitent à augmenter leurs prix.

 

Pour mieux comprendre la pertinence de l'analogie cosmique, il suffit de comparer les deux passés : autant la valeur du dollar semble avoir augmentée, autant la valeur énergétique de l'impulsion lumineuse semble avoir augmentée. Si je voulais faire un achat entre deux terres identiques situés à une centaine d'années lumière de distance, pour que la transaction soit équitable, je devrais tenir compte de l'inflation, et c'est précisément ce que les atomes font en accélérant pour l'annuler. Si mon imagination cherche sans arrêt à améliorer ses idées c’est que, sans y arriver non plus, elle cherche elle aussi à combler l’inévitable décalage qui augmente avec le temps entre d’anciennes idées qui résistent de plus en plus au changement, et les améliorations qu’elle y tente constamment.

 

Étant moi-même le plus petit composant de la reptation économique, je dois me résigner à combler son décalage, mais mon salaire devrait y être ajusté le plus étroitement possible car, plus la période de rattrapage est courte, moins le décalage est important, et plus cette reptation devrait pouvoir s’ajuster rapidement à une éventuelle crise. Si le système économique est effectivement en reptation, au lieu de le stabiliser, toute intervention classique risquerait de produire l’effet inverse, car nous ne connaissons pas encore la règle de cette reptation particulière. Si je lance une balle sur terre, je sais qu’elle finira tout bonnement par tomber et s’arrêter sur le sol mais si, sans en connaître la règle, je voulais mettre un satellite sur une trajectoire orbitale particulière, sauf par une chance inouïe, je ne pourrai jamais obtenir la trajectoire voulue. Pour arriver à manipuler la reptation économique, il faudrait donc d’abord trouver la règle qui la régit, mais il faudrait aussi tenir compte du fait que l’importance des différents intervenants est encore en évolution, y compris celle des états, comme si les planètes et les lunes du système solaire échangeaient encore suffisamment de matière pour modifier continuellement leurs trajectoires.

 

 

 

17. La Loi du plus égocentrique

La croissance est au financement ce que le chiffre d’affaires est aux entreprises : les deux ne profitent qu’aux plus égocentriques. En employant des salariés pour fabriquer ou vendre leurs produits, les employeurs peuvent retarder le moment où l’inflation se reflétera sur leur salaire, mais ils peuvent aussi diminuer leurs coûts en réduisant ces salaires au minimum, et profiter d’économies d’échelle en augmentant leur volume, devenant ainsi plus concurrentiels tout en faisant d’avantage de profit. Avec ce type de croissance, il serait possible d’ajuster les salaires aux profits des entreprises, mais ces dernières profitent des dépenses que cette croissance nécessite pour retarder l’ajustement, ce qui les incite à augmenter encore leur volume en développant d’autres marchés, et à délocaliser leur production dans des contrées où les salaires sont moins élevés pour en minimiser les coûts, ce qui retarde à nouveau leur ajustement.

 

Pour survivre à un moment où la déréglementation des marchés est de mise, les entreprises sont forcées de procéder ainsi, ce qui finit par provoquer des fermetures ou des restructurations importantes, mais aussi des intégrations car ces dernières permettent justement d’augmenter le volume de l’intégrateur. Avec le temps, les prix demeurent bas mais les salaires aussi de sorte que, mis à part le développement de la technologie qui profite à tous, si certaines entreprises font des profits, seuls ceux qui participent à ces profits s’enrichissent. Si j’ai bien compris, le seul moyen de devenir plus riche que le voisin est de le faire travailler pour moi en le rémunérant le moins possible : un comportement qui ne profite qu’aux plus égocentriques, mais en apparence égalitaire puisque tous peuvent procéder de la même manière. Les dirigeants et les actionnaires de ces entreprises ne sont effectivement pas plus égocentriques que quiconque : utilisant d’abord leur imagination pour cumuler des gains, ils peuvent se permettre de croire, comme nous tous, qu’ils n’y sont pour rien. « Si ce n’est pas moi ce sera quelqu’un d’autre…», un prétexte en apparence équitable, mais un comportement instinctif subconscient qui réduit l’évolution sociale à la concurrence commerciale et ne peut que demeurer aveugle aux dommages écologiques et sociaux qu’il cause !

 

Chez certains mammifères, en plus de maintenir la cohésion, le rang hiérarchique influence aussi la reproduction cependant, la Loi du mâle le plus fort soutenue par la plupart des biologistes implique une redondance inutile d’un point de vue évolutif : « si je suis le mâle le plus fort et le plus rusé, je vais pouvoir reproduire des mâles forts et rusés qui vont pouvoir se reproduire aussi, …et ainsi de suite ad nauseam ! À ce que je sache, c’est la diversité génétique qui offre le plus de possibilités évolutives pourtant, la force et la ruse ne représentent qu’une parcelle de cette génétique, sans compter que, dans ce processus, il n’y a jamais d’avantage évolutif pour les femelles. Selon moi, la hiérarchie animale servirait évidemment à ne pas transmettre de tares génétiques et à assurer la cohésion du groupe, mais aussi à contrer les épidémies de MTS en limitant les possibilités d’accouplements, un troisième bénéfice qui me semble tout aussi important que les deux premier. La propagation du VIH chez les gays le prouve : si, comme eux, une espèce animale se mettait à s’accoupler à droite et à gauche sans restriction, elle disparaîtrait rapidement, fonction évolutive vraisemblable pour laquelle les gais auraient toujours été ostracisés par les hommes dont l’instinct sexuel s'adresse aux femmes.

 

Par conséquent si, depuis toujours, le plaisir animal de gagner possède comme seules fonctions de contrer les épidémies, de maintenir la cohésion du groupe, et d’empêcher la reproduction de tares, l’idéologie humaine selon laquelle concurrence, croissance, et course au pouvoir ne devraient pas être limitées malgré les dérives du Capitalisme et de la Démocratie, s’expliquerait peut-être par cet appui intellectuel conscient que les hommes accordent parfois à leurs fonctions instinctives sociales, dans ce cas à cette trompeuse Loi du plus fort qui coïncide justement à leur égocentrisme inné. À l’opposé si, depuis toujours, le plaisir animal de se soumettre sert uniquement de complément direct à celui de gagner, l’idéologie selon laquelle nous pourrions tous être égaux, ne pas nous concurrencer, et suivre sans cesse le même meneur malgré les dérives du Communisme et de l’Autoritarisme, viendrait de cet appui intellectuel conscient que les femmes accordent parfois à leurs fonctions instinctives sociales, dans ce cas à cette non moins trompeuse Loi de l’amour qui coïncide justement à leur empathie instinctive.

 

Avec la Reptation, comme pour tout changement intellectuel, nos changements sociaux viennent d’un essai de l’imagination pour améliorer ses automatismes sociaux mais, en tentant d’améliorer des automatismes instinctifs, elle ne peut que les pervertir, comme elle le fait d’ailleurs depuis toujours avec son instinct sexuel. Avec elle, les automatismes instinctifs sociaux sont issus de l’instinct de chaque individu : chez les autres espèces, ils servent à générer le plus de diversité génétique possible sans nuire à la survie immédiate des individus, chez nous, ils devraient donc servir à générer d’avantage de diversité sociale sans nuire à la survie de chacun, ce qui n’est visiblement pas le cas des nombreux états qui sont en guerre perpétuelle, et ce qui semble bien loin de préoccuper les responsables du système financier mondial dont la présente Loi du marché génère au contraire l’homogénéité commerciale et les crises financières à répétition.

 

 

 

18. La reptation intellectuelle homme/femme

Avec la Reptation, sans régulation volontaire, aucun plaisir instinctif ne devrait être réitéré par l’imagination, ce qui signifie que le fameux plaisir meneur/suiveur devrait être volontairement régulé. Voilà pourquoi je disais que nos deux principales idéologies politiques gauche/droite nécessiteraient un échange de pouvoir volontairement exempt de magouille, mais aussi pourquoi j’ajoute que nos deux principales idéologies sexuelles homme/femme nécessiteraient un échange intellectuel volontairement exempt de débordements instinctifs. Malheureusement, ce genre d’échange ne semble pas tellement intéresser les femmes pour l’instant car si, dans une discussion, j’ai le malheur d’avancer que l’amour n’est peut-être pas la panacée qu’elles croient, très rapidement, elles me demandent de les apprécier telles quelles au lieu de chercher à les comprendre. Preuve que l’empathie est insuffisante pour s’entendre entre humains même si cette croyance est universellement répandue, si je persiste, probablement déconcertées que je ne sois pas suffisamment sensible à la leur, elles cessent habituellement d’en exprimer en mettant abruptement fin à l’échange.

 

Preuve supplémentaire, la récente émancipation sociale des femmes occidentales qui, en humiliant involontairement les hommes par leurs succès intellectuels, a induit une génération d’hommes qui, par empathie, acceptent de partager les mêmes tâches qu’elles, mais qui n’arrivent pas à demeurer en couple plus longtemps, non seulement parce que ces dernières deviennent de plus en plus autonomes ou que la fidélité perd du terrain, mais aussi parce que, malgré l’empathie accrue des hommes, le point de vue intellectuel des femmes est toujours aussi différent du leur. Selon moi, la différentiation sexuelle intellectuelle étant uniquement utile à la reproduction de l’espèce jusqu’à maintenant, dans une discussion homme/femme ou la séduction est exclue, l’Homme continuerait inutilement d’exprimer instinctivement de l’égocentrisme et la Femme de l’empathie de sorte que, parmi toutes les dérives que leurs différents points de vue pourraient provoquer, il les empêcherait de se comprendre malgré leurs fonctions intellectuelles semblables.

 

Jusqu’à maintenant, les femmes peuvent facilement s’opposer à ce que les hommes soient si égoïstement masculins dans une discussion sans leur accorder de réciprocité, car rien ne s’oppose encore à ce que les femmes soient si généreusement féminines, et elles ne font aucun compromis à ce sujet avec moi, ce qui leur permet peut-être justement d’imaginer qu’elles me comprennent et que je ne les comprends pas. Comme la plupart des termes qui désignent nos facultés intellectuelles, comprendre possède ici deux sens complètement différents : pour une femme, « je te comprends » signifie « je ressens la même chose que toi », et pour un homme « je pense la même chose que toi », deux facultés distinctes nécessaires à l’intelligence humaine mais, dont l’emphase différente chez les deux sexes aurait seulement été utile à l’instinct sexuel jusqu’à maintenant.

 

Ce serait donc mon égocentrisme inné qui me pousserait à agir aussi directement avec les femmes mais, malheureusement, si ces dernières sont parfois capables de feindre la générosité, je ne vois pas comment je pourrais faire semblant d’exprimer ce que je pense, et j’imagine que, en me tenant tête, elles ont la désagréable impression de ne pas être généreuses, ou pire, de devenir égocentriques. Le lien intellectuel homme/femme ressemble à celui de la gravitation entre deux astres : l’accélération gravitationnelle y est directe alors que le mouvement orbital y est indirect, mais les deux sont nécessaires à leur cohabitation. Si le mouvement intellectuel des femmes cessait d’être aussi indirect ce serait l’irréversible trajectoire de collision hommes/femmes, et si celui des hommes cessait d’être aussi direct ce serait la définitive trajectoire d’échappement.

 

L’impression selon laquelle, pour un homme, la plupart des femmes n’auraient pas d’opinion, viendrait donc peut-être du fait que, dans une discussion, elles semblent accorder peu d’importance à leur point de vue, mais ce serait une illusion, comme pour celle selon laquelle seule la lune graviterait autour la terre. Comme les femmes, les gays semblent accorder moins d’importance à leur point de vue et d’avantage à ce qu’ils ressentent, ce qui les rapproche du comportement des femmes dans une discussion, mais les éloigne simultanément de celui des hommes, dont la quête n’est effectivement pas le rapprochement. Si les gays avaient eu le même comportement intellectuel que les autres hommes, ils n’auraient pas été ostracisés, mais ils n’auraient pas pu se rapprocher non plus. L’un n’allant pas sans l’autre, ils l’ont été, ce qui a vraisemblablement participé à contrer les épidémies de MTS, mais puisqu’ils le sont de moins en moins, à mon avis, il faudrait tenter autre chose qu’attendre en se croisant les doigts.

 

L’égocentrisme ne serait toutefois pas l’unique propre de l’Homme. Malgré leur apparente empathie, les femmes seraient souvent forcées d’appuyer leur instinct de conservation elles aussi mais, en exprimant ce qu’elles ressentent, elles le feraient de manière moins tranchée que les hommes en y ajoutant de l’empathie. Pour une femme, dire « est-ce que tu m’aimes » à quelqu’un en espérant entendre « oui », c’est de l’égocentrisme assaisonné d’empathie, et dire « je t’aime » à quelqu’un en espérant entendre « moi aussi », c’est de l’empathie assaisonnée d’égocentrisme. Malheureusement pour moi, expliquer mon point de vue à quelqu’un en espérant qu’il l’admette, c’est uniquement de l’égocentrisme, et dire à quelqu’un que je comprend son point de vue en espérant qu’il comprenne ainsi le mien, c’est encore de l’égocentrisme. Sans instinct sexuel, les hommes arriveraient à se comprendre entre eux et les femmes entre elles, mais hommes et femmes se comprendraient seulement pour procréer, de telle sorte qu’un couple finirait souvent par ne plus se comprendre si le désir n’y était plus ou si, comme dans mon cas, la discussion excluait tout compromis unidirectionnel.

 

La croissance économique est peut-être aussi inévitable que la gravitation mais, s’il s’agit d’une reptation, une fois son propre rythme initié, elle ne devrait plus pouvoir en changer. Aussi anodin que cela puisse paraître, tricher pour avoir l’air plus jeune ne permet pas de rattraper le temps mais de plaire en mentant de sorte que, sans jamais s’en inquiéter puisqu’en principe faire plaisir aux autres n’est dommageable pour personne, la plupart des gens mentent ainsi sans vergogne, ce qui finit par provoquer des discordances entre nous. Que ce soit par empathie ou par égocentrisme, essayer de retenir le passé ou de repousser le futur n’aide pas à nous accorder ensembles. Avec la Reptation, ce qui provoque un accord durable entre les êtres humains n’est ni Dieu, ni l’Amour, ni le Bonheur, ni la Richesse, ni la Puissance, ni la Gloire, ni non plus de plaire aux autres en croyant bien faire, mais bien de s’entendre entre nous sur des règles communes après avoir négocié un compromis de part et d’autre ! Tout compromis unidirectionnel devrait être considéré comme un mensonge nuisible à long terme …dit-il en réalisant qu’il cherche ainsi à accélérer l’évolution intellectuelle homme/femme en ne proposant rien d’autre qu’un compromis unidirectionnel sur l’empathie des femmes, mais n’équivaut-il pas à celui que beaucoup d’hommes ont déjà fait sur leur égocentrisme en acceptant de partager les mêmes tâches qu’elles !

 

 

 

19. La mondialisation

Comme si, lors-qu’appuyé par leur imagination, l’égocentrisme inné des hommes n’était pas suffisamment nuisible en soi, menée principalement par eux, la récente mondialisation de l’économie le nourrit. Après avoir profité de la déréglementation pour éliminer la concurrence, certaines multinationales peuvent se permettre de devenir intransigeantes envers des fournisseurs devenus captifs, comportement que le FMI peut lui aussi se permettre de pratiquer envers les états qui en ont présentement recours. Le FMI est financé par les états qui en font partie, mais chaque pays participe aux décisions selon sa propre importance de sorte que les États-Unis y ont pratiquement veto avec environ 17% des voix. Son mandat général est de réguler la finance mondiale afin d’en empêcher les crises mais, de par sa structure, il lui est impossible d’agir en défaveur des états les plus importants sans leur accord. Avec l’OMC, la Banque Mondiale et l’ONU, le FMI est un des rares organismes qui ont la possibilité de réguler les états, mais que penser de ses prescriptions qui, jusqu’à maintenant, ont autant permis d’accentuer leurs problèmes que de les résorber. Le rôle ultime de l’ONU est d’empêcher les états de s’éliminer l'un l'autre et, de la même manière, quand un état émergeant subit une tempête économique mondiale, il faudrait que le FMI l’empêche de sombrer, le contraire de ce que ses mesures immédiates induisent. Selon moi, un pareil organisme devrait servir à réguler les trop fortes disparités économiques entre les états en obligeant progressivement les plus riches à laisser les plus pauvres les rattraper, et non en appliquant aveuglément sa Loi du marché.

 

Sincère comme tout bon despote, donc insensible aussi au fait qu’il n’a aucune règle à respecter, le FMI prescrit cette improbable panacée à tous ses débiteurs, et certains finissent par ne plus pouvoir fonctionner quand l’Économie mondiale implose car ils sont déjà désavantagés. Nonobstant le fait que cette Loi ne profite qu’aux pays les plus imposants et que ceux-ci interviennent sur le marché pour continuer de s’imposer, la Loi du marché n’est pas une loi naturelle mais bien une possible interprétation d’un instinct de plus, aussi naturelle soit-elle, aucune loi unidirectionnelle ne peut provoquer d’évolution à elle seule si le mouvement a nécessairement lieu entre deux pôles. Avec la Reptation, parce qu’il s’agit d’une question de point de vue, le bonheur évolue par rapport au malheur, le bien par rapport au mal, l’empathie par rapport à l’égocentrisme, …et la richesse par rapport à la pauvreté.

 

Selon moi, la seule manière d’aider les pays les plus fragiles serait de ralentir la croissance des pays développés afin de leur permettre de les rattraper, ce que ces derniers n’ont visiblement jamais fait, et qui accentue d’ailleurs aussi chez eux l’écart entre riches et pauvres. Faciliter le crédit pour accélérer la croissance des particuliers à une extrémité, mais accélérer simultanément la croissance des états à l’autre extrémité, c’est vouloir agir sur une reptation en l’accélérant par les deux bouts comme si, encore une fois, elle pouvait accélérer de manière instantanée. Si je pouvais accélérer simultanément les deux atomes d’une même molécule, à cause du délai de leur interaction, je les déboussolerais. Après avoir trouvé de meilleures manières de limiter la spéculation, pour que l’économie de la planète se stabilise et que l’on puisse enfin réguler la mondialisation, il suffirait peut-être de laisser la reptation économique retrouver son propre rythme en arrêtant de vouloir y créer de la richesse avec le crédit à la surconsommation ou à la croissance, mais il faudrait d’abord que chacun de nous ait compris et accepté cette idée, ce qui ne serait pas instantané non plus.

 

 

20. L’immigration

L’immigration a trois avantages pour une population, mais de nature évolutive différente : à long terme, une diversité génétique plus importante, à moyen terme, une diversité sociale plus importante, et à court terme, une main d’œuvre bon marché, avantage pervers dont notre imagination se soulage en prétextant que le niveau de vie est déjà meilleur ici qu’ailleurs. Il y a peu de temps, ce genre de main d’œuvre s’appelait de l’esclavage, et notre imagination se soulageait en prenant pour acquis que certains peuples n’avaient pas d’âme. Personnellement, je suis empathique envers ces populations où la vie semble tellement difficile, car nous savons maintenant que ces gens sont en tout point semblables a nous mais, même en le sachant, ceux dont l’imagination appuie trop facilement leur instinct de conservation croient encore qu’ils sont issus de la cuisse de Jupiter, et considèrent trop souvent les immigrés de leur imposant piédestal.

 

Comme je l’avançais, la raison fondamentale pour laquelle nos sociétés occidentales seraient devenues plus ouvertes aux autres cultures, c’est parce que l’orgueil y aurait perdu du terrain, alors celle pour laquelle nous devrions nous inquiéter qu’elles nous envahissent, c’est que leur orgueil réveille le nôtre. Puisque personne ne peut connaître l’avenir, il faut espérer que le peu d’humilité que nous avons gagné soit suffisamment contagieux, mais une pareille épidémie sociale ne se répand pas en claquant des doigts sauf peut-être si, pour accélérer le processus, elle était assaisonnée d’un supplément d’humilité de notre part. Pour s’entendre entre deux partis, l’humilité permet de faire un compromis là où le risque est négligeable à court terme, quitte à revoir l’entente plus tard, mais si l’un des deux partis manque d’humilité, rien n’empêche l’autre de se compromettre un peu plus s’il y trouve son lot. Pour la bonne entente sociale immédiate, l’humilité est un avantage certain et, pour l’évolution sociale à long terme, la diversité culturelle est un atout majeur, deux composantes qui s’imbriquent parfaitement l’une dans l’autre.

 

Au Québec, laisser tomber nos croyances religieuses a induit un peu plus d’humilité chez nous : le peu de signes religieux que nous avons gardés va de pair avec la rare fierté qui nous en reste. Prétendre que la religion fait encore partie de notre identité culturelle est simplement un prétexte pour justifier ce reste. Ce ne sont pas nos croyances instinctives qui nous ont permis d’évoluer mais leur questionnement car, même s’il n’y parvient pas toujours, seul le doute issu de l’imagination permet de nous entendre entre nous. Quand nous demandons aux immigrés de moins afficher leurs symboles religieux, nous touchons à leur fierté, quand nous nous en accommodons, nous montrons que l’humilité permet de s’entendre, mais nous évitons simultanément qu’ils se replient sur leur orgueil, une sorte de jeu meneur/suiveur qui a malgré tout réussi à rendre les sociétés démocratiques plus humbles que d’autres. Comme je le disais, une fois le mouvement social lancé, il s’induit de lui-même alors, peut-être qu’il se répandra aussi chez la population immigrante, quelle que soit sa résistance.

 

Dans le cas du Québec, la langue fait aussi partie de l’enjeu culturel. Laissés libres, beaucoup d’immigrés apprennent l’anglais avant le français, et Montréal s’anglicise de plus en plus, ce qui inquiète les francophones de souche qui se trouvent parfois forcés de parler anglais sur la rue ou au travail. Comme l’ensemble de la culture et contrairement à la religion, la langue évolue avec le temps, elle ne disparaît pas mais se transforme. Certains croient qu’elle influence la manière de penser, mais je crois qu’elle permet surtout de distinguer les nations originelles, frontière invisible qui leur permet d’évoluer différemment les unes des autres parce qu’elles étaient différentes à l’origine, tel le Québec par rapport au reste du Canada. Accepter de devoir parfois parler anglais à Montréal n’est pas un geste de soumission envers des anglophones qui nous ont jadis brimés, mais d’équité envers une population qui est encore trop facilement ostracisée.

 

Prévoir ce que deviendra la culture québécoise dans quelques générations est impossible, mais j’imagine qu’elle pourra continuer à développer son humilité même si sa langue originelle se transforme. De toutes façons, l’anglais ayant déjà acquis ses lettres de noblesse planétaires, pour continuer de nous distinguer du reste du Monde, nous devrons miser sur ces autres valeurs que la barrière linguistique nous a permis de développer et, heureusement, elles peuvent continuer d’évoluer sans cette barrière. Autant l’anglais est attrayant pour les immigrés, autant nos mesures d’équité sociale le sont, mais ces mesures dépendent des prélèvements de l’état sur nos revenus, et les immigrés arrivent malheureusement d’états où prélèvement équivaut ici à corruption. Beaucoup de commerces tenus par des immigrés ne prélèvent donc pas de taxe de vente, et beaucoup d’immigrés de première génération croient que la magouille reste essentielle à leur survie, ce qui met en péril nos mesures d’équité.

 

Stigmatisés et manquant de support institutionnel, beaucoup d’immigrés ont de la difficulté à obtenir des emplois et des logements décents, et ils doivent se replier sur leur propre communauté pour survivre, d’où les nombreux ghettos qui entretiennent nécessairement les coutumes originelles et induisent une évolution sociale distincte. La religion et la langue peuvent se transformer, mais les mesures sociales que nous avons développées ne le peuvent pas puisqu’elles servent à réguler l’évolution sociale. Pour que ces règles se soient établies, il a fallu que tous puissent facilement les respecter, ce qui signifie que les communautés culturelles devraient pouvoir y arriver aussi tout en évoluant de manière distincte. Peu importe ce que la culture québécoise deviendra, si elle y arrive à coup de manifestations aussi tranquilles que celle que les étudiants et leurs supporteurs tiennent depuis plusieurs mois, elle aura vraisemblablement encore gagné en équité et en stabilité. L’important n’est pas d’avoir raison comme croient encore les politiciens, mais de trouver de nouvelles manières d’évoluer qui provoquent moins de crises.

 

Pour un gouvernement majoritaire, voter une loi que la moitié de la population ne peut pas respecter, c’est justement croire que ses valeurs sont meilleures que celles des autres et tenter de les imposer, ce qui mène inévitablement à la crise. C’est pourtant bien simple, avec ou sans crise, pour passer une loi en démocratie, que ce soit par référendum ou en chambre, il faudrait toujours obtenir une quasi unanimité, quitte à attendre que les opinions évoluent.

 

 

 

21. L’imagination et la liberté

Le plaisir de surconsommer concerne naturellement les sociétés dont la richesse chapeaute déjà toutes les autres valeurs pourtant, comme moi, certains y développent leur propre talent au détriment de leur richesse, augmentant ainsi les possibilités d’évolution de leur société à son insu. Naturellement, ce talent ne leur est finalement reconnu que s’il induit leur richesse, laissant pour compte la valorisation sociale d’une créativité issue de l’incertitude de l’imagination, au profit de celle d’une spontanéité issue de l’exercice de nos automatismes. Créativité et spontanéité sont le pendant social d’imaginatif et instinctif au niveau intellectuel et, comme je le disais, ils sont encore mal différenciés. Parce que l’automatisme est toujours plus prompt que l’imagination, socialement, cette confusion entre deux fonctions intellectuelles distinctes permet trop facilement d’exprimer spontanément ses préférences au lieu de prendre le temps de réfléchir, d’où le concept de liberté individuelle à l’américaine. Pour l’imagination, la seule liberté qui existe est celle qui lui laisse le temps d’expérimenter et, malheureusement, un automatisme qui agit aussi promptement qu’un instinct ne lui en laisse aucun.

 

Misant sur l’instinct au lieu de l’imagination, la liberté américaine de posséder une arme est justement le genre de liberté qui, pointée vers moi, libérerait spontanément mon instinct. Avec la Reptation, la Liberté n’est pas un vague concept moderne soluble dans toutes les idéologies, mais bien le temps mesurable dont je dispose pour faire autre chose qu’assurer ma survie immédiate. Pour deux atomes, la Liberté, c’est le temps que prend leur lumière pour traverser de l’un à l’autre et leur rapporter du changement à effectuer, et le Droit, c’est leur résistance à ce changement soit, le temps qu’il leur faut pour effectuer ce changement sans se désaccorder. En soi, le droit d’exprimer son opinion ne provoquerait pas d’évolution si personne n’avait le temps de réfléchir avant de l’exercer mais, en initiant la reptation droite/gauche, la démocratie accélérait l’évolution sociale à tous les niveaux d’organisation, offrant ainsi plus de choix aux gens et plus de temps libre pour choisir. Que certains utilisent ce temps pour réfléchir correctement ne constitue pas un besoin pressant pour la société, mais seulement un futur avantage évolutif.

 

Réfléchir correctement, c’est utiliser son imagination pour remettre en question ses acquis, et non s’armer pour les conserver ce dont, même en démocratie, peu de gens comprennent l’avantage, car le doute reste une faiblesse aux yeux de ceux qui, pressés, croient pouvoir manipuler l’évolution sociale. J’ai présentement tout le temps qu’il me faut pour douter mais, comme je le disais, même si je sais que je participe ainsi à cet empressement, je ne peux pas non plus m’empêcher de développer cette thèse, par contre, je me sens moins pressé de la publier parce que, devenu plus fragile avec l’âge, j’ai peur de m’être trop avancé, d’être réprimé, et de devoir encore changer de raison de vivre, mais aussi parce qu’elle me fait elle-même douter de sa propre nécessité. Si, un jour, l’ensemble de l’espèce humaine adhérait à ce genre d’idée, j’ai l’impression que l’inévitable lutte pour sa survie intellectuelle la dépasserait elle aussi parce que, comme moi, elle ne pourrait justement pas se libérer de son instinct de conservation, ce qui la ferait douter elle aussi de sa propre nécessité.

 

Sur internet, certains jeunes se font remarquer par le non sens de leur performance, agissant comme s’ils essayaient de démontrer que rien n’a de sens. Je peux facilement imaginer que rien n’a de sens, mais je dois quand même le vérifier si je veux progresser : pour un humain, la seule manière d’évoluer socialement, c’est en avançant des idées et en les vérifiant, en leur imaginant un sens et en l’empruntant. À un moment où la production de biens essentiels est sursaturée, sans mettre en péril notre confort collectif, l’éducation des jeunes pourrait sans doute valoriser ce genre de créativité durant un moment, engendrant ainsi d’avantage de chercheurs. Impossible cependant d’inculquer ce goût, il faut laisser les jeunes s’exprimer en le valorisant et, pour ça, il faut déjà que l’ensemble de la société le valorise. Seule une évolution progressive peut arriver à développer ce type de valeur collective et, selon moi, c’est entre autres le genre d’évolution qu’internet pourrait accélérer : parallèlement à la possibilité de s’exprimer, celle de se questionner est peut-être déjà en train de s’y développer chez certains jeunes. Si je me fie à la sérénité et à l’enthousiasme incessant que cet essai induit chez moi, avoir le temps de réfléchir aurait le double avantage d’être à la fois plus rassurant et plus stimulant que de prospérer.

 

Sans miner non plus notre confort, le système boursier pourrait peut-être lui aussi évoluer de manière à ce que chaque investisseur puisse y privilégier certaines valeurs sociales, ce qui pourrait diversifier son besoin illusoire de croissance en y ouvrant d’avantage de voies. Suite au traité de Kyoto, des écologistes ont créé un type de bourse qui vise à diminuer la quantité de gaz carbonique émise par les entreprises en misant sur leur image commerciale. Pour participer à ces bourses, les entreprises s’engagent à respecter une norme, celles qui la dépassent profitent d’un crédit boursier à chaque tonne de CO2 économisée, celles qui ne l’atteignent pas doivent payer pour chaque tonne de CO2 dépensée, processus qui permet aux entreprises plus polluantes de financer indirectement les plus vertes. Malheureusement, à ce que je sache, aucun mécanisme boursier ne permet encore aux particulier d’encourager le rendement écologique d’une entreprise.

 

Devenues synonymes de survie à long terme, des valeurs émergentes comme l’écologie, l’égalité des chances, des cultures, …etc., sont appelées à durer : ajoutées maintenant à toutes les bourses, elles réduiraient peut-être déjà certaines de leurs fluctuations. Impossible pour un particulier ou une firme d’espérer remporter le gros lot en spéculant sur un futur rendement écologique, cette valeur évolue trop lentement et ne contient pas d’information privilégiée, mais possible de la favoriser individuellement en espérant qu’elle profite un jour à tous : il suffirait que les bourses en tiennent compte pour qu’elle influence le prix des actions, par exemple en taxant l’achat d’actions des entreprises qui ne respecteraient pas une certaine norme, et en faisant une remise sur l’achat d’actions de celles qui la dépasseraient. Cette norme pourrait déjà concerner les rejets de gaz carbonique puis, progressivement, les autres rejets toxiques les plus répandus, mais elle pourrait aussi tenir compte de l’équité sociale. La cote correspondant à la valeur sociale de chaque entreprise pourrait ainsi remplacer les différentes étiquettes vertes présentement affichées sans contrôle sur les produits. Avec le temps, plus le produit serait considéré Vert par les consommateurs et moins il serait cher, on peut bien rêver non, qui sait ce que l’évolution nous réserve ? Si cela s’avérait, l’ancien Écu pourrait entendre tinter son Éco !

 

Les durées n’existent que si elles se reproduisent, et elles ne sont prévisibles que si elles se reproduisent déjà depuis toujours, raison pour laquelle tout être humain sait qu’il va mourir mais aussi pourquoi, comme celle de toutes les espèces, la durée de l’humanité reste imprévisible. Notre imagination peut se prémunir contre certains accidents en découvrant progressivement les règles naturelles qui les concernent mais, capable d’imaginer n’importe quoi, que ce soit à court ou à long terme, elle ne peut malheureusement pas se prémunir contre elle-même. Après avoir surmonté la crise écologique actuelle, elle ne devrait pas pouvoir s’empêcher d’en provoquer d’autres sortes, se jetant dans le pétrin et essayant de s’en sortir toute seule à chaque fois, mais consolidant son progrès en y appliquant les règles appropriées à mesure qu’elle les découvre. Toujours cette nécessité de s’appuyer sur ce qui existe déjà, et cette liberté d’improviser ce qui n’existe pas encore.

 

 

 

22. La Conscience religieuse et l’imagination

Même si c’était faisable, il serait peut-être nuisible de sauvegarder son propre disque dur intellectuel avant de mourir, car il est possible que la durée de vie moyenne d’un individu, vraisemblablement utile à l’évolution biologique des espèces depuis toujours, soit présentement utile à l’évolution de la connaissance humaine ce que, par hasard, l’actuel débat sur le suicide assisté appuie, mais aussi cette plus forte résistance au changement de nos automatismes avec le temps. Contrairement au concept de Masse, la résistance au changement de la Reptation dépend justement de ce genre de durée prévisible partout où elle s’applique, car tout changement imprévisible mais utile en dépend. Par conséquent, si je suis déjà né par hasard, si les découvertes que je fais ne sont jamais que coïncidences, si ma conscience elle-même dépend du hasard de mon imagination et si, par hasard encore, ma durée de vie personnelle doit demeurer limitée pour permettre notre évolution intellectuelle commune, je devrais peut-être accorder tout l’avenir de mon existence au hasard pour l’instant, …m’enfin, pour ce qu’il en reste. Au moins, cet improbable panacée existentielle éviterait l’anthropocentrisme de celle qui désigne actuellement l’humanité comme étant le gros lot d’une non moins improbable Loterie Divine !

 

Bien que chaque découverte scientifique nous indique que l’humilité serait de mise face à cette extraordinaire complexité de l’univers qui semble infinie, il est impossible de ne pas accorder d’importance à ce dont nous avons conscience, mais attribuer trop d’importance à notre toute petite existence ressemble à de la paranoïa, et croire mordicus que cette conscience du temps qui passe nous est accordée par un être hors du temps frise la schizophrénie ! Remises en question publiquement par ce genre de discours, la plupart des religions vont s’insurger et rétorquer en chœur que ce type d’incursion viole un droit sacré : la liberté de conscience. Si elles utilisaient la notion de conscience dans son sens intellectuel, elles auraient parfaitement raison : chacun est effectivement libre d’imaginer ce qu’il veut puisque personne ne peut lire sa pensée. Mais ces religions ne l’entendent pas dans ce sens : pour elles, la « Conscience » ne vient pas de l’imagination mais de Dieu qui, en lisant justement nos pensées et sous peine de sanction, nous donne la possibilité et non la liberté, de nous soumettre à ses Lois et non de les questionner.

 

Alors que la conscience de mon imagination se sent parfois libre de prendre du temps pour corriger ses erreurs, ce genre de croyance n’accorde aucune liberté à son imagination, au point où cette dernière arrive à se renier elle-même et à se suicider en son propre Honneur, lequel est encore si répandu chez certaines nations qu’il en investit le Droit. Ce genre de Conscience sert à conserver telle quelle et à tout prix la même Croyance or, si ma propre conscience vient de mon imagination, c’est uniquement à changer de croyance qu’elle est destinée : à preuve, même si j’y crois, je n’ai qu’à tenter d’améliorer mes idées comme je le fais maintenant pour commencer à en douter, …m’enfin !

 

Si je comprends bien, ma capacité à risquer du nouveau pour pouvoir m’adapter équivaudrait à celle de me suicider pour ne pas avoir à le faire ??? Nos facultés mentales sont si mal comprises que, encore ici, le mot conscience peut concerner deux propriétés intellectuelles carrément opposées sans que nous nous en formalisions : le changement de l’imagination et l’immuable de l’instinct. En considérant comme immuables des concepts comme la richesse, l’amour, le bonheur, le bien, …etc., nous avons fini par ériger de nombreuses valeurs en règles, ralentissant probablement ainsi notre propre évolution intellectuelle. L’imagination peut tout imaginer mais, si le changement est sa seule fonction, elle ne devrait jamais prendre pour acquis qu’une de ses idées puisse ne plus évoluer car, ce faisant, elle peut se contredire tellement facilement qu’il lui devient impossible de s’y retrouver. Dans ce sens, la Raison avec un grand R ne serait définitivement pas de croire que j’ai raison, mais d’en douter.

 

Ayant déjà connue cette envahissante crainte de Dieu dans ma jeunesse, je sais que certains Croyants craignent d’être foudroyés sur place si seulement l’idée effleurait leur Conscience, mais tout indique qu’avec la mondialisation, pour mieux s’entendre entre cultures différentes, il suffirait simplement de moins afficher sa propre croyance religieuse durant quelques temps, de l’oublier un moment, le temps d’un essai. Malheureusement, pour l’instant, même nos supposé évoluées sociétés occidentales de souche sont assez loin du compte. Tolérance oblige, pour laisser évoluer les différentes cultures entre elles, il va de soi qu’il faut respecter les différentes religions si elles en font partie mais, évolution oblige, nos cultures changent constamment alors que, pendant ce temps, aucune religion ne peut évoluer sans s’enliser dans une contradiction.

 

Pas surprenant que la plupart des cultures où la démocratie est apparue se soient distancées de leur ancienne religion, ni qu’en s’y distançant elles soient soudainement devenues plus tolérantes envers les autres cultures : la démocratie permet de réaliser que la tolérance inhérente à toute culture n’est pas de la même trempe que l’intransigeance de pareilles croyances ! Impossible de prévoir comment toutes nos croyances évolueront, mais le hasard nous réserve peut-être encore une bonne surprise : qui sait s’il n’est pas encore en train d’éroder le mur de honte qui renferme nos certitudes, car elles sont certainement toutes égocentriques, donc forcément orgueilleuses. Pour moi, ce foisonnement de coïncidences dont semble surgir ma portion d’univers signifie que, tout en y édifiant sans cesse de nouvelles possibilités, nous ne cesserons jamais d’y découvrir d’anciens fondements : quoi de plus excitant et rassurant à la fois ! Je peux mourir sur mes deux oreilles maintenant, l’avenir de l’humanité me parait enfin assuré, …dit-il ironiquement en doutant beaucoup que ce soit le cas !

 

Quoique, à bien y penser, une religion basée sur la Reptation nous aiderait peut-être à survivre : un Dieu de Lumière qui jaillirait de la moindre parcelle de matière vaudrait bien n’importe quelle croyance !!! C’est si pratique pour se calmer le Surnaturel, si reposant pour l’imagination de ne plus avoir à souffrir durant quelque temps l’insurmontable résistance au changement de son instinct de conservation, son alter-ego. Si pratique aussi pour la société : moins de méfiance entre adeptes du même culte et, pour le meneur, de l’humilité au lieu de l’orgueil envers ses rivaux. Avantage annoncé sur tous les autres cultes, tout en prêchant la même humilité, ce Culte du Hasard éviterait leur ancien anthropocentrisme, l’échangeant contre l’illusion, et non l’espoir, de peut-être un jour remporter le gros lot, ce qui devrait écarter les guerres. Le bien et le mal devenant une question de points de vue, ils seraient considérés comme nécessaires à la reptation sociale, plus de fautes volontaires donc, mais que de malencontreuses coïncidences, chacun tire son épingle du jeu et peut recommencer sans honte s’il s’est trompé. Le mantra de cette nouvelle humilité : « Je peux tromper autrui, mais seulement pour l’amuser ». Malheureusement, même si elle devait fonctionner, je sais que cette antiquité ne ferait pas long feu car l’imagination s’est déjà trouvée plusieurs remèdes beaucoup plus efficaces que son ancien Surnaturel : les psychotropes !

 

Tellement efficace que c’est à se demander si, parce qu’elles sont dispendieuses, la prolifération de certaines de ces drogues en occident ne participerait pas au recul de nos seules religions. Recul pour recul, en perturbant le fonctionnement intellectuel, elles abrutissent autant sinon d’avantage que les prières et, malheureusement, elles touchent autant de gens. Par ailleurs, ce recul religieux oblige ceux qui n’utilisent pas de drogues à se servir de leur imagination pour se calmer de sorte que, en essayant toutes sortes de thérapies, ils cherchent frénétiquement la bonne manière de procéder, sans se douter un seul instant que, gratuite et sans effet secondaire, la bonne méthode est connue depuis longtemps. Rien de plus simple, il suffit de se retirer dans le calme, de s’accorder le moins d’importance possible durant un moment, et de ne pas changer cette idée durant ce temps. Hé oui, il s’agirait simplement de s’humilier sans se poser de question, comme pour prier et, preuve qu’imagination signifie conscience, accorder sa propre conscience à l’insignifiance de son imagination humilie tout aussi efficacement que de l’accorder à l’omnipotence de Dieu.

 

Quel que soit l’enjeu, en écartant rapidement toute causalité, la seule idée que ma propre imagination utilise le hasard pour s’adapter devrait résoudre toutes les contradictions instinct/imagination qui pourraient m’habiter, ce qui devrait dissoudre l’angoisse que cette cohabitation induit chez moi à l’occasion, et souvent sans autre raison que la fatigue. Il a naturellement fallu que je m’éloigne suffisamment de cette humilité pour développer cette thèse, mais je n’ai plus à m’inquiéter maintenant que mon imagination s’y reconnaît, car cette humiliation peut maintenant l’apaiser au besoin, ...dit-il, incertain de rester humble face à l’éventuel succès de ladite thèse. On pourrait croire qu’une pareille merveille s’adresse uniquement aux hommes puisque l’humilité soigne nécessairement l’égocentrisme mais, comme le prouve le succès de religions auprès des femmes depuis toujours, elle soigne aussi l’empathie. En effet, toute femme ne pouvait que se sentir humiliée face à l’infinie bonté de Dieu, ce qui devait dissoudre l’angoisse que les contradictions empathie/imagination induisaient parfois chez elle, mais je crois que toute femme se sentirait humiliée aussi de savoir que son empathie est soumise au hasard de son imagination.

 

 

 

 

23. La naissance de l’imagination

L’imagination est probablement apparue pour peaufiner des gestes qui n’avaient rien à voir avec la survie immédiate sinon l’instinct, plus prompt et déjà efficace, l’aurait empêchée d’évoluer. En imaginant qu’un primate soit né avec une certaine capacité à manipuler un geste imaginaire au hasard avant de l’exécuter, je me suis demandé quelle fonction cette faculté aurait eu le plus de chances de développer sans trop interférer avec ses instincts, et j’en ai trouvé une qui, non seulement n’interférait pas beaucoup, mais qui n’existait justement pas encore au début : la parole ! Pour que la parole se développe chez un primate sans nuire à son instinct, et que l’instinct ne puisse pas l’empêcher de se développer, il fallait vraisemblablement que les deux se développent simultanément à la naissance : de cette manière, tout en développant la parole de son nourrisson parce qu’elle la possédait déjà, la mère pouvait remplacer son instinct pendant qu’il se développait soit, le protéger des prédateurs et le nourrir. La parole était essentielle à l’évolution intellectuelle, elle servait à conserver, transmettre et faire progresser la connaissance, mais elle devenait essentielle à l’évolution sociale aussi, car elle permettait aux humains de s’entendre sur un futur fonctionnement commun et de bénéficier ainsi d’une cohésion sociale de plus en plus sophistiquée.

 

Le questionnement qui suit est hautement spéculatif mais je le trouve pressant : il illustre de manière étonnante le caractère inédit de la reptation en avançant une origine à la différentiation intellectuelle homme/femme. Si je développe en premier lieu mon raisonnement en leur faveur, l’imagination aurait peut-être pu se développer plus rapidement chez les femmes, leur permettant d’échanger de l’information avec leurs propres filles mais non avec leurs fils, et les obligeant à manipuler d’avantage les mâles par l’instinct puisqu’ils ne comprenaient pas les informations, comme pour un animal de compagnie, d’où le point de vue des femmes encore fondé sur ce qu’elles ressentent et leur empathie sur ce que l’autre ressent, mais aussi leur impression persistante selon laquelle l’Homme ne comprend toujours pas la Femme alors qu’elle-même l’a toujours compris. Quand l’imagination des hommes aurait finalement rattrapé celle des femmes, possédant déjà la propension de certains animaux mâles à s’imposer par la force, ils auraient continué à imposer leurs idées, dont leurs croyances, d’où leur point de vue encore fondé sur ce qu’ils croient et leur empathie sur ce que l’autre croit, mais aussi leur impression persistante selon laquelle les femmes ne parviendront jamais à défendre donc encore moins à développer leurs propres idées.

 

Si, à l’origine, les femelles avaient déjà la tâche d’élever leur progéniture, je ne peux pas imaginer comment les mâles auraient acquis leur imagination avant elles, mais je peux par contre supposer en deuxième lieu qu’ils l’ont acquise en même temps. Dans ce cas, je peux seulement allier le développement de leur imagination à leurs différents instincts, qui avaient déjà des tâches différentes à accomplir pour la survie de l’espèce, le mâle en combinant sa puissance et son égocentrisme pour contrer les tares et les épidémies et favoriser la cohésion, et la femelle en utilisant son empathie pour demeurer liée à sa progéniture jusqu’à sa maturité tout en s’alliant le mâle pour pallier à sa vulnérabilité. À l’apparition de leur imagination, les femmes auraient ainsi pu continuer de faciliter leurs liens avec leur entourage en priorisant les sentiments qui commençaient à s’échapper de leurs idées, et les hommes auraient pu continuer à s’opposer aux autres hommes en priorisant les idées qui commençaient à s’y développer, donnant ainsi l’impression aux femmes que les hommes ont moins de sentiments, et aux hommes que les femmes ont moins d’idées. Ces deux points de vue étant distincts intellectuellement mais utiles à la différentiation sexuelle depuis le début, ils auraient induit ces deux mouvement cycliques entre égocentrisme et empathie que j’ai nommé « Reptation intellectuelle homme/femme » et « Reptation idéologique sociale ».

 

Rattachant tout à lui-même, et la Femme étant incapable de s’opposer à lui, l’Homme aurait fait main basse sur les concepts depuis le début, d’où l’importance de nos Idéologies, et la Femme sur les sentiments, d’où l’importance de l’Amour dans nos sociétés. Voilà pourquoi, dans toutes les langues, le vocabulaire désigne presque exclusivement des concepts masculins, avec le mot Homme en tête pour désigner l’ensemble de l’humanité, mais aussi pourquoi l’émancipation des femmes induit la féminisation du langage ainsi que de certains concepts masculins, comme celui des Droits de l’Homme par exemple. Malheureusement, ayant conservé son ancien orgueil de mâle animal, l’Homme n’a pas pu s’empêcher de rabaisser intellectuellement la Femme, jusqu’à se traiter lui-même d’efféminé ou de con quand il ne se trouvait pas à la hauteur, et reléguant volontiers la Femme aux tâches auxquelles, par instinct, elle se confinait déjà elle-même ce qui, avec l’avènement de l’ère technologique, a finit par induire la féminisation de tous les secteurs de la société, car la survie des nouveaux nés y dépend de moins en moins des pères, et les lois protègent de plus en plus les femmes de l’égocentrisme animal des hommes.

 

Dès la naissance, nous développons nos capacités instinctives et cognitives simultanément, et nous continuons naturellement de les utiliser ainsi tout au long de notre vie de sorte que, sauf pour en rire, nous avons énormément de difficulté à questionner les contradictions qui en découlent. L’imagination est jeune et, comme je le disais, la seule connaissance de son propre fonctionnement ne lui permet pas de prévoir son propre avenir, par contre, en reconnaissant son appui à des comportements subconscients, elle peux déjà tenter de mieux encadrer ses essais. S’entendre entre nous, c’est utiliser notre imagination pour laisser tomber consciemment une partie de nos automatismes individuels actuels au profit de futurs automatismes communs, ce qui devrait finir par profiter à tous mais qui prend du temps lequel, selon les prévisions les plus pessimistes, devrait heureusement durer encore quelque milliards d’années, un délai suffisant pour nous entendre avec les nombreux peuples extra-terrestres avec lesquels nous pourrions communiquer, …qui sait, mais aussi pour oublier que, jadis, un certain réchauffement climatique imprévu avait accéléré ce processus.

 

J’ai une perruche chez moi qui passe son temps devant les miroirs, elle a l’impression de voir d’autres perruches. Si elle avait la capacité d’imaginer un geste avant de l’exécuter, devant un miroir, elle reconnaîtrait le geste qu’elle est en train d’imaginer et elle se fatiguerait, mais elle ne se fatigue jamais, elle répète toute la journée la même routine sans aucun progrès : du plus pur instinct. En agissant spontanément, elle n’imagine tout simplement pas d’avance le geste qu’elle va faire, de sorte qu’elle ne pourra jamais en reconnaître le reflet. Elle nous tolère parce qu’elle n’a pas le choix, mais jamais elle ne se laisse approcher, aucun apprivoisement, une vraie tête de linotte. L’instinct humain est encore capable de provoquer ce genre de comportement car, pendant le développement de l’imagination, il n’a pas eu besoin de changer : il suffit que, prise de panique, l’imagination s’efface un court instant devant son ancienne tête de linotte pour qu’elle surgisse spontanément du passé, et il n’est guère éloigné.

 

Nous savons que nos comportements dépassent parfois notre entendement mais, au point où nous en sommes dans notre connaissance de l’intelligence, nous n’y pouvons rien. La liste de ce dépassement est longue et désastreuse et la tête de linotte masculine est presque toujours en cause : les hommes tuent encore leur femme et leurs enfants, les entreprises fabriquent et vendent des produits qu’elles savent dangereux, de nombreux pays sont en guerre civile perpétuelle, la menace de guerre nucléaire plane encore sur nos têtes, le terrorisme prend de l’ampleur, certaines populations crèvent encore de faim, …etc. La Reptation m’aide à comprendre que, même quand elle sait qu’elle aurait le temps de chercher mieux, il peut sembler plus sûr pour l’imagination d’appuyer ses automatismes ou de s’effacer devant eux parce que ses essais demeurent toujours incertains, au point où, pour un homme, réagir impulsivement est encore accepté dans toutes les sociétés quand il est établi qu’aucune préméditation n’est impliquée, donc aucune imagination, même s’il a tué sa famille. Quels que soient les prétextes qu’elle se donne, il est dangereux pour l’imagination de croire qu’elle n’est pas en cause quand elle tue ses semblables, car elle risque de s’accorder elle-même le droit de réitérer ce plaisir. Avec la démocratie, nous réalisons progressivement que, même s’il faut y mettre le temps, s’entendre sur un fonctionnement commun semble toujours avantageux, malheureusement, même en disposant de cette liberté, beaucoup préfèrent encore la continuité aux imprévus qui accompagnent inévitablement le changement, sans compter ceux dont cette continuité fait immédiatement l’affaire.

 

En s’exprimant à des moments où sa survie n’est pas menacée, l’imagination développe progressivement un amortisseur entre elle et son instinct : ses apprentissages. À la naissance, beaucoup d’animaux savent déjà se tenir debout, mais l’être humain doit l’apprendre en utilisant son imagination. Après les avoir imaginés de nombreuses fois pour les peaufiner, ses gestes finissent par s’exécuter tout seuls comme ceux de l’instinct sauf que, contrairement aux autres animaux, il peut sans cesse en inventer de nouveaux. De la même manière, après avoir été appris, nos mots et nos phrases s’exécutent aussi tout seuls au bon moment, de sorte que nous pouvons continuer d’en développer d’autres en même temps que nous conversons. Ces phrases sont issues de gestes qui provoquent des sons, et l’imagination peut prendre conscience d’une phrase pour l’améliorer, exactement comme elle peut le faire avec n’importe quel geste. Une idée est une séquence de gestes qui peut ou non être exprimée, et j’en ai conscience quand mon imagination tente de la modifier, soit pour répondre à un changement de son milieu, soit pour l’influencer en y introduisant une possibilité. Ce tampon d’apprentissages développés par l’imagination lui permet de fonctionner librement tant que son milieu ne varie pas : s’il varie et qu’elle n’a pas le temps de trouver mieux, elle n’a pas d’autre choix que de les appuyer en attendant mieux, mais si ces automatismes ne suffisent plus, l’instinct reprend du gallon et l’enrôle de force.

 

Quand les choses s’enveniment entre deux individus ou deux groupes, j’ai souvent l’impression qu’aucun des deux n’a raison, mais il arrive que je prenne parti : si je me sens impliqué c’est que, de près ou de loin, l’issue du désaccord risque d’affecter mon existence. D’un côté, je sais que mon imagination peut se tromper en se projetant trop loin dans le futur, de l’autre, je sais qu’un regroupement procure des avantages à ceux qui en font partie, mais avec du recul, en réalisant qu’un groupe ne peut pas d’avantage prévoir l’avenir que moi, j’ai fini par comprendre que, pour l’être humain, la cohésion sociale n’était pas une panacée et, par voie de conséquence, la cohérence personnelle non plus, ce qui explique que j’aie survécu malgré mon aversion pour la hiérarchie sociale. Ce n’est donc pas parce que mon idée semble cohérente qu’elle réglera ipso facto tous nos questionnements, mais elle pourrait peut-être aider à améliorer nos cohabitations instinct/imagination qui, sur le coup, ressemblent beaucoup à de la folie, et finissent trop souvent en tragédies.

 

Avec la Reptation, pour pouvoir exprimer librement nos divergences, il suffit de s’entendre sur un fonctionnement commun en faisant des compromis, d’échafauder des règles que tous croient pouvoir respecter, et des méthodes pour vérifier qu’elles fonctionnent, non seulement entre chacun de nous mais entre tous les groupes quels qu’ils soient. Il ne faudrait jamais normaliser l’hégémonie d’un individu ou d’un groupe sur un ensemble, ou encore une dérogation à la règle commune comme un droit de veto par exemple. Pourtant, il appert que, même sans veto, un gouvernement mondial hégémonique tel l’ONU risquerait de bloquer l’évolution et de provoquer des soubresauts c’est pourquoi, pour minimiser l’illusion de la sincérité, un pareil organisme aurait peut-être avantage à se scinder volontairement en deux factions politiques, et pour minimiser celle de la cohésion, il aurait peut-être avantage à utiliser le sondage internet, y compris pour choisir ou rejeter ses dirigeants, dont le mandat devrait se limiter à développer, peaufiner, ou mettre en œuvre des règles sociales. Aussi sincère et cohérente soit-elle, aucune intervention ne peut prévoir l’avenir d’ailleurs, s’il avait été prévisible, l’imagination ne serait jamais apparue si, tout ce qu’elle sait faire, c’est le sonder. Peu importe où nous serons demain, si nous y sommes, ce sera toujours aussi palpitant.

 

 

 

24. La spéculation et l’espoir

Avec l’imagination vient la spéculation soit, le plaisir de s’imaginer gagnant, plaisir qui découle de notre capacité à manipuler un geste virtuel au hasard pour tenter de l’améliorer avant de l’effectuer, mais qui néglige celle de réitérer ce geste plusieurs fois pour l’assimiler, en le vérifiant à chaque réitération. Gagner sur autrui ou accumuler des gains pour soi, les autres espèces savent le faire, mais imaginer les possibilités pour ensuite les vérifier est l’apanage des humains. Avec leur imagination, les humains ont développé une curieuse illusion qu’ils ont appelée l’espoir : ils croient pouvoir rendre une idée d’avantage palpable uniquement en l’imaginant de sorte que, pour plusieurs, prier Dieu de m’aider à réaliser une possibilité lui donne beaucoup de chances d’être exaucée. Avec la Reptation, prier soulage l’imagination à la manière de l’humour, en l’anesthésiant et en la déculpabilisant toutefois, dans le cas de l’espoir, le risque de gagner ou de perdre demain n’a jamais besoin d’être soulagé puisqu’il peut toujours être reporté au surlendemain, ce qui le rend magique.

 

Comme tous les plaisirs, celui d’espérer devrait être réservé à l’apprentissage mais, puisque l’imagination s’ajuste au goût de chacun et qu’elle peut imaginer n’importe quoi, il s’applique à tout ce qui est imaginable. Il suffit de croire que des concepts comme la richesse, le bonheur, l’amour, la jeunesse, la gloire, Dieu, …etc., sont incontournables pour miser tout nos espoirs sur eux pourtant, il y a belle lurette que je n’y crois plus et je ne m’en porte pas plus mal. Comme tout espoir, celui des religions lui sert aussi bien à long qu’à court terme et joue aussi sur tous les tableaux. Ne sachant pas que leur croyance venait de leur imagination, les religions pouvaient difficilement distinguer plaisirs imaginaires et plaisirs perceptibles de sorte que, dans leur croisade contre les plaisirs terrestres, puisque celui d’améliorer son sort appuyait leur croyance, elles ne pouvaient pas le proscrire entièrement, se trouvant ainsi en conflit d’intérêt. Avec elles, je peux donc espérer gagner la vie éternelle après ma mort, un type d’espoir à jamais invérifiable qu’elles ont nommé Espérance avec un grand E pour bien le distinguer de celui d’améliorer ma survie, qu’elles n’avaient pas le choix de considérer plus petit même si son seul tord était de demeurer vérifiable.

 

L’imagination peut tout imaginer, quitte à se contredire, et les religions en ont tout simplement profité, participant ainsi, avec leurs Dieux imaginaires en tête de parade, à un défilé de spéculations sociales toutes aussi divertissantes les unes que les autres, mais trop souvent nuisibles. Spéculer sur une ancienne idée permet d’en induire une nouvelle mais, puisqu’une idée peut demeurer indéfiniment invérifiable sans toutefois être rejetée, vouloir conserver à tout prix une idée invérifiable entraîne des contradictions sociales inébranlables, comme celle selon laquelle la spéculation financière n’a pas besoin d’être régulée. Non seulement improductive mais néfaste, avec la mondialisation, la spéculation à grande échelle dépense une énergie non renouvelable que nous pourrions économiser, pollue inutilement l’environnement, et rend nos organisations économiques et politiques instables mais, surtout, elle perpétue inutilement la croyance selon laquelle le futur serait prévisible, et celle selon laquelle l’égocentrisme humain serait une panacée, ce qui devrait ralentir l’évolution sociale en nous empêchant d’utiliser correctement la seule fonction dont nous disposons pour évoluer intellectuellement.

 

 

 

25. L’imagination et la concurrence

En biologie, concurrence est synonyme d’adaptation au milieu. Certaines plantes ou animaux se font concurrence sur un même territoire, d’autres y sont complémentaires, d’autres y sont tributaires les uns des autres mais, de tout ce qui vit, seule l’espèce humaine sait imaginer l’avenir. Imaginer qu’un concurrent puisse me devancer m’incite à le précéder et, avec la Reptation, il y a trois seules façons d’y arriver : en accélérant, en changeant de direction, ou en transgressant la règle. En affaires, accélérer signifie améliorer le produit, sa fabrication, ou sa mise en marché, changer de direction signifie changer de produit, de procédé de fabrication, ou de marché, et transgresser une règle commune signifie imposer uni-directionnellement la sienne. Quand les états les plus importants négocient un traité de Libre-échange en suggérant d’appliquer la Loi du marché, ils répondent d’abord à leur propre besoin, mais ils savent aussi qu’ils vont pouvoir changer uni-directionnellement la donne si ce besoin change. La Loi du marché n’a jamais été négociée, c’est une idéologie, et non une règle, qui permet aux entreprises et aux états les plus importants de le demeurer en faisant fi des dommages écologiques et sociaux qu’ils causent. Quand une entreprise profite de cette Loi, elle profite aussi du changement éventuel de donne.

 

La concurrence biologique a permis de développer une multitude d’espèces qui, pour s’adapter, ont su profiter des possibilités disponibles ce qui, par la même occasion, a permis à l’espèce humaine d’émerger du lot. La concurrence commerciale produit le même effet : la diversité de la demande, donc celle du milieu, induit la diversité de l’offre, donc celle des entreprises et, avec le temps, certaines entreprises sont favorisées au détriment de leurs rivales. Chez les animaux cependant, sauf en de rares exceptions, toutes les espèces observent la même règle fondamentale de ne pas éliminer son semblable et, ne possédant pas d’imagination, aucune ne peut y déroger volontairement : imaginer gagner ne fait pas partie de la donne et le plaisir d’imaginer éliminer un rival non plus. Le seul plaisir qu’un loup peut ressentir face à un rival, c’est celui de définir sa place dans la hiérarchie, un plaisir instinctif utile au vaincu comme au vainqueur analogue, selon moi, à la réciprocité du sadomasochisme humain.

 

En politique, la démocratie freine l’envie d’éliminer le vaincu, mais cette envie est bien présente chez l’humain comme l’indique le comportement guerrier des nombreux états où la Loi du plus fort est encore en vigueur. Si la règle d’un jeu permettait d’éliminer définitivement le vaincu, elle finirait par éliminer ce jeu pourtant, la Loi du marché le permet. Présentement, en utilisant toutes les possibilités devenues disponibles avec le libéralisme commercial, certaines entreprises ne se gênent absolument pas pour en éliminer d’autres, appauvrissant ainsi la diversité de l’offre et rendant progressivement le système économique plus sensible aux fluctuations de la demande, dont celle créée artificiellement par la spéculation à grande échelle, à qui les économistes ont donné le nom contradictoire de bulle spéculative quand elle devient détectable, lui accordant ainsi la fragilité d’une bulle de savon mais malheureusement aussi la faiblesse de son impact quand elle éclate subitement. L’analogie avec une bombe à retardement lui conviendrait peut-être mieux, une bombe antisociale qu’aucun intervenant financier n’ose désamorcer pour ne pas tarir sa principale source de plaisir. La spéculation et la déréglementation profitent l’une de l’autre, elles participent à diminuer la concurrence dans un marché où les joueurs sont devenus presque aussi importants que les états, auxquels ils ont d’ailleurs fini par imposer leur propre Loi et ce, quelle que soit leur idéologie politique puisque l’attrait du gain y est partout présent.

 

 

 

26. La liberté d’expression

Avec la Reptation, la liberté est le temps dont je dispose pour faire autre chose qu’assurer ma survie immédiate. Dans ce sens, peu importe qu’elles soient conservatrices ou avant-gardistes, exprimer librement ses propres idées sur l’avenir de sa société induit son évolution. Mais ne faudrait-il pas censurer les idées qui, mis en œuvre, restreignent ces possibilités en allant à l’encontre de la règle la plus élémentaire qui soit de ne pas ressentir de plaisir à tuer nos semblables, plaisir disponible dans tous les films de violence et d’horreur qui pullulent actuellement, sans parler des jeux vidéos ou des pages web ?

 

L’idéologie qui soutient la déréglementation commerciale, soutient aussi depuis quelque temps celle de la culture : puisque celui qui censure impose de facto ses propres valeurs, toute censure est jugée antidémocratique en soi, libéralisme culturel qui s’ajuste parfaitement à la déréglementation commerciale. Mais la reptation permet justement de différencier règles et valeurs, alors il me semble qu’elle devrait permettre de réglementer la liberté d’expression sans nuire à l’évolution sociale ! En sachant comment les jeunes sont faciles à endoctriner, autant de violence gratuite et si facilement accessible sur internet ou à la télé ne peut que leur paraître normale, mais puisqu’il semble que nous ne puissions pas intervenir, se pourrait-il que notre incurie actuelle vienne du même genre de contradiction instinct/imagination qui nous empêche de discuter avec eux de sexe : d’un tabou. Comme le tabou sexuel, ce tabou social représenterait notre instinct de conservation social, qui viendrait de l’époque ou nous n’avions pas d’imagination de sorte que, comme il est impossible jusqu’à maintenant de réguler consciemment nos débordements sexuels, il en irait de même pour nos débordement égocentriques.

 

Même si j’ai de plus en plus de difficulté avec ce genre de films il arrive que, n’ayant rien trouvé d’intéressant à la télé, je me surprenne en train d’imaginer le Bon éliminer le Méchant, le vainqueur éliminer le vaincu, plaisir que, semble-t-il, seul un humain mâle est capable de ressentir. Malheureusement, presque personne ne peut censurer de lui-même un plaisir qu’il adore réitérer, la preuve, aucune religion ne peut questionner le plaisir que l’idée du Bien et du Mal lui procure depuis toujours, y compris en éliminant les infidèles. Même si la loi ne permet pas de se faire justice soi-même, tous les films de violence nous encouragent à tuer les méchants, et aucune loi ne sanctionne ce genre de plaisir : comme pour le plaisir sexuel, la contradiction est flagrante. Selon moi, plus il y a d’hommes qui réitèrent ce plaisir virtuel, plus il y a de chances que certains le mettent en œuvre, car il est issu de leur tête de linotte instinctive. Avec la Reptation, lors d’un différent, nous avons tous constamment l’impression que les autres ont tord, sans exception, et attendre que la linotte se pointe le bec finit inévitablement par causer des morts. Il faudrait que nous perdions le goût de réitérer ce genre de plaisir en commençant par reconnaître qu’il est aussi néfaste qu’inutile, ensuite nous pourrions procéder comme pour la cigarette et nous enlever progressivement l’occasion de le réitérer.

 

Je n’ai jamais pu supporter ce qu’il est convenu d’appeler une scène d’horreur, justement parce que j’y ressens du plaisir. Quand il s’agit de sexe, je ressens du plaisir sadomasochiste, et je change immédiatement de chaîne après avoir tourné mon regard pour ne pas être contaminé : même en doutant que ce soit possible, je suis capable d’imaginer que la fille torturée ressent le même plaisir que moi, et je sais que plusieurs en sont capables puisqu’il y a de nombreux festivals internationaux de ce genre de films, qui ne sont d’ailleurs aucunement censurés. Quand il s’agit de torture, c’est le plaisir de tuer qui refait surface, de tuer le tortionnaire sans l’avertir, comme un moustique, et j’imagine qu’un tortionnaire en herbe voyant une pareille scène aurait au contraire du plaisir à voir le tortionnaire être torturé, mais longtemps, peut-être pour qu’il s’en souvienne une fois mort puisque la plupart du temps, dans ce genre de film, la victime finit par être tuée. Comme je le disais, je ne crois pas qu’on puisse s’imaginer méchant de cette manière, mais plutôt dans une classe à part, et ressentir du plaisir instinctif, comme tout animal devant sa proie, une proie intellectuellement comestible puisque tellement inférieure.

 

Selon moi, il faut croire au surnaturel pour se croire si supérieur à ses semblables d’ailleurs, les groupes extrémistes qui revendiquent ouvertement le droit à ce genre de plaisir sont souvent fondamentalistes religieux aussi et, s’il n’en tenait qu’à moi, ils seraient immédiatement arrêtés lorsqu’ils transgressent en parole ou en écrit la règle sociale la plus élémentaire qui soit de ne pas tuer son semblable. Ceux qui, comme moi, sont fatigués de la violence à la télé, mais qui croient qu’une pareille censure brimerait la liberté d’expression, n’imaginent pas jusqu’à quel point leur propre imagination peut se contredire elle-même. Capable de découvrir et de mettre en œuvre de nouvelles règles sociales à mesure que la société évolue, selon moi, il serait grand temps qu’elle cherche de nouveaux moyens pour réguler l’évolution médiatique qu’elle a elle-même provoquée.

 

Pour que je ne me surprenne plus jamais en train d’imaginer tuer un tortionnaire ou un psychopathe, il faudrait que le plaisir de tuer disparaisse de nos goûts, à commencer par celui de posséder une arme soutenu par la douteuse liberté d’expression à l’américaine. Que ce soit en actes ou en paroles, l’imagination ne peut rien contre l’instinct alors, il faut absolument qu’elle trouve le moyen d’ériger de meilleurs automatismes entre elle et lui pour éviter d’avoir à s’y frotter. Il est facile de différencier un film qui dénonce l’holocauste d’un autre qui l’encourage mais, sachant que presque tous y prendront plaisir, est-il nécessaire de romancer l’horreur pour la dénoncer? Ceux qui fabriquent ce genre de film sont sincères, mais ils négligent le fait qu’ils entretiennent en même temps le goût de tuer, un effet secondaire en totale contradiction avec le premier. Plus on dénonce l’horreur de cette manière plus on l’entretient, la preuve, j’ai toujours le goût de tuer les méchants pourtant, à l’âge que j’ai, je devrais déjà m’être assagi. L’imagination peut bien imaginer ce qu’elle veut, mais elle devrait cesser d’exprimer tout ce que son instinct lui dicte, et prendre ce temps pour tenter de développer de nouvelles manières de s’entendre avec ses semblables.

 

Si j’ai fini par acquérir la conviction qu’il fallait écarter ce plaisir, vu le grand nombre de films et de jeux vidéos qui l’entretiennent, ce n’est visiblement pas le cas de la plupart des gens. La limite à la liberté d’expression est pourtant claire : il suffirait de s’entendre sur l’idée qu’un jour, plus personne ne devrait ressentir de plaisir à imaginer tuer quoi que ce soit, que ce soit à la guerre ou à la chasse, que les jeunes y soient éduqués, et que tout ce qui suscite cette émotion soit, non seulement censuré, mais corrigé. Depuis que la totalité du corps médical s’est entendu sur le fait que la cigarette était nocive pour la santé, l’ensemble de la population s’est progressivement rangée de son côté, les législations sont apparues et les gens fument de moins en moins, y compris à la télé. Les statistiques sur les morts par agression sont tout aussi significatives que celles sur la cigarette, le plaisir de tuer pour gagner, concrètement ou intellectuellement, est tout aussi nocif : présent chez chacun de nous, bons comme méchants, il n’attend qu'une coïncidence pour tout faire exploser.

 

 

 

27. L’imagination et la volonté

Dans le dictionnaire des synonymes Word, le terme volonté possède énormément de synonymes, mais dont le dénominateur commun est toujours l’imagination. Pour mieux comprendre le rapport entre ces synonymes et l’imagination, je vais essayer d’en définir les différents ensembles le plus simplement possible en me servant de la reptation. Dans un premier temps, avoir de la volonté, de la détermination, de l’énergie, de la résolution, …etc., signifierait tenter de conserver un automatisme en me servant de mon imagination. Dans un deuxième temps, avoir une intention, une idée, un motif, un désir, un but, une préméditation, …etc., signifierait arrêter mon imagination sur une possibilité dans le but de la vérifier. Dans un troisième temps, avoir un dessein, un projet, un plan, un schéma, …etc., signifierait arrêter mon imagination sur un ensemble de possibilités qui dépendent les unes des autres dans le but de vérifier leur enchaînement.

 

Dans un quatrième temps, le désir, l’envie, la convoitise, l’espoir, la tentation, l’amour, la concupiscence, la curiosité, la faim, …etc., avec comme antonyme la répugnance, la répulsion, la peur, l’appréhension, seraient ces pulsions que mon imagination subit quand un de mes instincts sollicite son appui. Dans un cinquième temps, faire un souhait, un vœu, …etc., signifierait imaginer qu’une de mes idées se vérifiera. Dans un sixième temps, avoir une exigence, un besoin, une nécessité, une revendication, signifierait imaginer que les autres devraient accepter un de mes idées, ancienne ou nouvelle. Finalement dans un dernier temps, avoir de la ténacité, de l’acharnement, de l’entêtement, de l’obstination, signifierait que je ne suis pas certain qu’une de mes anciennes idées fonctionnera encore longtemps, ou que ma nouvelle idée finira par fonctionner, mais que j’ai toujours l’impression, donc le plaisir d’imaginer que oui.

 

Il y a un monde entre vouloir gagner à tout prix et s’entêter à développer une idée, l’un peut agir en ne se souciant pas d’autrui alors que l’autre doit constamment s’y référer pour pouvoir progresser pourtant, ce dictionnaire des synonymes ne les distingue pas, ce qui vaut d’ailleurs pour l’ensemble des synonymes qui concernent nos comportements et qui montre à quel point ils sont difficiles à définir. Avec la Reptation, s’acharner à gagner relève de la certitude reliée à ce que je prend pour acquis, au passé, et s’acharner à développer une idée relève du doute relié à ce qui n’est pas encore acquis, au futur. À moins d’être attaqué physiquement, je ne blesserai jamais personne à vouloir vérifier des idées dont je doute, alors que, quand le passé concerne mon instinct de conservation, y subjuguer mon imagination réveille mon ancienne cruauté animale. À mon avis, c’est entre autres ce flou langagier, donc nécessairement conceptuel, qui permet d’associer comportements et signes astrologiques, chacun ayant tout le jeu voulu pour imaginer le comportement qui lui plaît.

 

Pour avoir du plaisir à imposer ses idées aux autres, il ne faut pas en douter, ce qui signifie qu’il ne faut pas les avoir développées soi-même. Voilà pourquoi Lénine et Staline ont pu imposer celles de Marx, et pourquoi certains dictateurs peuvent stimuler le racisme et le fanatisme latent depuis toujours chez chacun de nous. Les scientifiques qui ont mis au point la Bombe n’étaient pas d’accord avec l’utilisation que les militaires voulaient en faire parce qu’ils l’ont imaginée, et les religions peuvent imposer leurs croyances aux enfants parce que ce ne sont pas des idées vérifiables mais des croyances, et qu’elles n’ont jamais eu besoin d’en douter, pas plus que je n’ai besoin de douter d’un conte de fée pour le raconter. La principale différence entre un conte et une religion, c’est l’imposition inhérente aux croyances. Selon moi, il est tout simplement impossible de développer une idée vérifiable sans en douter dès le début, sans humilité, de sorte que le doute subsiste même après qu’elle se soit avérée, raison pour laquelle les véritables créateurs paraissent toujours étonnés de leur succès, au point où ils l’attribuent d’avantage à la chance qu’au travail ou au talent : quand les politiciens douteront ouvertement de leurs idées, quand les militaires douteront de la guerre, et quand nous cesserons d’endoctriner nos enfants de force, nous aurons vraisemblablement appris à nous méfier d’avantage de notre imagination et à l’utiliser correctement.

 

Malheureusement, dès qu’une idée intéressante apparaît, on peut être certain que quelqu’un trouvera le moyen de la pervertir pour l’utiliser à ses propres fins : si la mienne se répand, même si, par manque de plaisir, j’ai de la difficulté à imaginer comment elle pourrait l’être, elle le sera sûrement aussi. On pourrait lui vouer un culte, l’imposer comme idéologie voire, écarter ceux jugés incapables de la comprendre ou de l’admettre : il suffirait simplement de lui adjoindre quelques paradoxes ou mystères. Voilà pourquoi je préférerais qu’elle ne soit jamais prise pour acquise, que son fondement soit sans cesse remis en jeu car, heureuse coïncidence, il est aussi difficile d’imposer une incertitude que de lui adjoindre un paradoxe. Contrairement à certains, je ne crois pas que les enfants aient besoin de certitudes ni de mystères pour évoluer, mais d’automatismes et d’imagination, comme les adultes. En leur permettant de questionner nos automatismes, on leur donnerait le goût de questionner les leurs, d’être créatifs, ce que je n’ai jamais pu obtenir dans mon enfance, l’éducation étant encore considérée comme non discutable.

 

Si je n’ai pas de talent pour une activité donnée, personne ne pourra me donner le goût de la pratiquer en me l’imposant, car j’aurai toujours l’impression d’être laissé pour compte. L’obligation d’apprendre le latin et le grec alors que, ayant déjà commencé à questionner la religion, je n’ai jamais pu m’y résigner malgré ma bonne volonté, m’a laissé l’impression amère que je ne n’étais plus capable d’apprendre de sorte que, plus tard, celle de commenter Teilhard de Chardin, n’eut été de la compréhension du religieux qui nous enseignait, aurait dû me coûter mon BAC. Pourtant, à cette époque, je n’étais certainement pas moins curieux que maintenant, mais je n’osais tout simplement plus remettre en cause, ne pouvant pas encore reconnaître mon principal talent puisqu’il m’avait toujours été refusé. Je vois d’ici la réaction du religieux si j’avais contesté l’existence de Dieu au lieu de rester coi : de la déception sûrement, mais peut-être aussi une meilleure note que celle qu’il m’avait accordée soit, 80%. Un vrai philosophe celui-là, car après avoir piteusement marmonné que je n’avais rien pu apprendre parce que je n’y croyais pas, il m’avait tout simplement répondu de ne pas m’en faire. Heureuse possibilité surgie du hasard, et il en faut plusieurs comme ça pour assurer la survie, mais ce n’est que beaucoup plus tard, après avoir suffisamment vécu, que nous réalisons leur importance.

 

 

 

28. De mon caractère à mon comportement

Ce qui caractérise le plus précisément un atome c’est son spectre lequel, avec la Reptation, est directement attribuable à la résistance à l’accélération entre ses différents composants, sa masse. En percevant le spectre d’un atome différent de lui, cet atome résiste à son accélération de manière spécifique, leur reptation commune étant alors régulée par la lumière qui s’échappe de celle entre leurs propres composants. Ce qui caractérise le plus précisément un humain, ses traits de caractère, seraient donc eux aussi attribuables à la résistance au changement entre ses différents composants physiques, et il résisterait lui aussi mais de manière intellectuelle aux différents humains qu’il rencontre, leur reptation intellectuelle commune étant alors régulée par l’information qui s’échappe de celle entre leurs propres composants physiques. Mes traits de caractère seraient donc innés, immuables, et il transparaîtraient immédiatement, mais mon comportement se développerait avec le temps et il pourrait changer selon les différents humains que je rencontre. Il semble donc que je ne pourrais définir mon comportement que par rapport à celui d’un humain particulier, ce qui le rendrait impossible à définir de manière absolue, alors que je devrais pouvoir définir mes traits de caractère en leur attribuant des caractéristiques physiques qui, elles aussi, sont immuables.

 

Si je constate qu’un autre me paraît dur intellectuellement je pourrais en déduire que je lui parais mou, s’il me paraît chaud je devrais lui paraître froid, s’il paraît rugueux je lui paraîtrais lisse, …etc. Avec mes traits de caractère comme régulation, mes comportements représenteraient l’ensemble des automatismes que j’ai développés avec le temps lors de mes rencontres. Face à un inconnu, je ne peux pas utiliser un ancien automatisme parce que je ne sais pas encore comment me comporter, mais je montre nécessairement mon caractère en parlant, voilà à quoi serviraient nos formules de politesse et les conversations anodines qui s’ensuivent. Ce faisant, en reconnaissant chez l’autre certains traits de caractère, je pourrais immédiatement me fier aux automatismes que j’ai déjà développés pour eux, mais je devrais en développer de nouveaux pour les nouveaux traits, et développer un comportement général pour l’ensemble du caractère. Avant d’échanger des idées, nous cherchons d’abord à découvrir ce qui nous rapproche, nos goûts, nos intérêts, nos origines, …etc., comportement primaire qui servirait à induire moins de méfiance et, qui sait, à mieux nous accorder entre nous par la suite malgré nos différentes opinions.

 

Comme je le disais, les choses se compliquent quand il s’agit d’analyser nos comportements, entre autres parce qu’ils évoluent et que les termes qui les désignent à une époque s’éloignent de leur signification originelle avec le temps, d’où leurs nombreux synonymes. Par ailleurs, il semble que nos comportements ne posséderaient pas une symétrie aussi évidente que nos traits de caractère. Par exemple si, pour assurer notre survie, nous sommes tous subconsciemment égocentriques, quand un autre me parait plus égocentrique que moi, puis-je en conclure qu’il me trouve moins égocentrique que lui, ou encore si, de prime abord, son comportement me déplaît, puis-je en conclure que le mien lui déplaît aussi ? Chez certains, la différence de caractère fait peur, mais elle suscite au contraire la curiosité chez d’autres, tout dépend du poids que l’instinct et l’imagination tiennent chez chacun, et ce poids est vraisemblablement inné, donc appartient aussi au caractère. Mais, alors, qu’est ce qui finit par me déplaire dans le comportement d’autrui ?

 

Vraisemblablement, ce qui me déplaît, c’est que je n’imagine aucun avantage à m’y accorder, soit parce que je le reconnais trop bien, soit parce qu’il m’est trop étranger. Mais un comportement peut avoir été acquis de façon consciente ou non, et il peut avoir été imposé ou non. Dans l’enfance, nos comportements nous sont imposés, plus tard, nous les ajustons à ceux des autres, qui ont aussi été imposés à l’origine. Même si la plupart des gens réussissent souvent à s’adapter aux autres, rien ne force quelqu’un à s’entendre avec un inconnu s’il a toujours réussi à s’imposer, ou encore s’il a toujours fonctionné seul. Quand nous imaginons un avantage à le faire, nous modifions nos comportements pour nous accorder aux autres sinon, nous cherchons instinctivement à nous imposer ou à nous soumettre. Personnellement, je crois que je n’ai su ni m’imposer ni me soumettre, mais j’ai vraisemblablement su m’accorder aux autres ou m’en éloigner au besoin. Je n’ai jamais eu l’impression d’avoir été obligé de tricher pour y arriver, mais j’ai parfois eu l’impression d’avoir été trahi, et il est probable que l’impression soit tout autre du point de vue de ceux que j’ai côtoyés.

 

Il n’est pas surprenant que nos comportements soient si difficile à analyser, car je ne peux absolument pas percevoir mon propre comportement, ni non plus percevoir le comportement d’autrui à partir d’un autre point de vue que le mien. À cause de cette impossibilité, dès qu’une chose est nommée, elle possède invariablement le point de vue de celui qui la nomme, tel le mot Homme qui, dans toutes les langues, désigne l’ensemble de l’humanité depuis toujours. Les termes humain, individu, ou personne, sont plus neutres mais, en francophonie, ils n’ont été normalisés qu’au Québec, justement parce que le comportement homme/femme est devenu plus égalitaire ici. Malheureusement, malgré notre bonne volonté, il est impossible de définir une chose de deux points de vue à la fois, de sorte qu’il faut constamment désigner les deux sexes un à la suite de l’autre pour demeurer égalitaire dans un discours, ce qui devient laborieux. Autre incongruité égalitaire : accumuler les noms de famille des deux parents plusieurs générations de suite.

 

Nos comportements collectifs proviennent de nos comportements individuels et ils changent avec eux, mais aussi les termes que nous inventons pour les définir, de sorte qu’il faut parfois en inventer de nouveaux. Le terme reptation désigne un réciprocité comportementale inconnue au bataillon jusqu’ici, et j’ai de la difficulté à l’appliquer à nos comportements, mais c’est peut-être la seule manière d’arriver à mieux définir ponctuellement ces comportements, quitte à recommencer l’exercice plus tard si cette thèse s’avère. Imaginer l’égocentrisme et l’empathie comme les deux pôles d’une seule et même reptation intellectuelle est facile, toutefois, définir correctement ces deux pôles est une autre affaire. Le seul moyen que j’ai trouvé pour y arriver, c’est en les désignant du point de vue de l’imagination, en remplaçant dans mes phrases nos différents verbes sophistiqués habituels par le verbe imaginer, ce qui n’en change pas le sens, et qui démontre que l’écoulement du temps dont l’imagination dépend constitue notre seul véritable repère commun. En voici un exemple.

 

« J’imagine de l’égocentrisme chez autrui si je n’imagine aucun avantage à m’y accorder, et de l’empathie si j’en imagine. S’imaginer empathique, c’est imaginer que l’autre imagine un avantage à s’entendre avec moi, et s’imaginer égocentrique, c’est imaginer qu’il n’en imagine pas. Pourtant, les religions s’imaginent empathiques depuis toujours alors que je les imagine toutes égocentriques, car il me suffit de les imaginer hypocrites pour imaginer qu’elles n’imaginent jamais leur propre avantage. En s’imaginant empathiques, elles ne devraient pas pouvoir imaginer de l’égocentrisme chez autrui mais, leur hypocrisie les empêchant d’imaginer le leur, les religions le peuvent. Que ce soit directement ou indirectement, nous imaginons tous de l’égocentrisme chez les autres, l’empathie consistant à imaginer le futur avantage de nous accorder ensembles malgré cet égocentrisme, et l’égocentrisme à ne pas le faire. Si j’imagine de l’égocentrisme chez autrui, c’est donc uniquement parce que je m’imagine empathique, si j’imagine de l'orgueil c’est parce que je m’imagine humble, si j’imagine de l'hypocrisie c’est que je m’imagine sincère, si j’imagine du mensonge je m’imagine franc, et vice-versa pour autrui, pour tous nos comportements : voilà la symétrie que j’imaginais, mais elle est on ne peut plus subjective, donc inutilisable pour améliorer concrètement mes comportements ! »

 

Par ailleurs, si nos comportements individuels sont si fluctuants, c’est peut-être aussi parce qu’une fois acquis, ils deviennent interchangeables et que, selon les circonstances, nos intentions peuvent varier. Je ne peux pas feindre un caractère, mais je peux effectivement feindre un comportement : par exemple, je pourrais faire semblant d'être empathique ou l'inverse. En feignant l'empathie par nécessité un certain temps, je pourrais finir par assimiler ce comportement et ensuite l’utiliser de manière subconsciente au besoin. Alors, comment distinguer le vrai du faux dans nos comportements, et comment être certain que je m’accorderai longtemps avec quelqu’un dont le comportement me plaît au début, ou vice-versa ? Il semble bien que, comme pour tout avenir, celui-là est imprévisible aussi ce qui signifie que, encore une fois, nos comportements seraient inévitablement en reptation avec ceux des autres. Comme pour toute reptation, régulés par des caractéristiques physiques stables, pour assurer notre survie, nos comportements se développeraient dans toutes les directions disponibles et y acquerraient dans chacune une importance particulière. Encore ici, les possibilités de changement se développeraient avec le temps mais pourraient finir par devenir utiles à la survie immédiate.

 

 

 

 

 

29. La culpabilité

En Droit, l’intention sert à définir la culpabilité : si je n’ai pas eu l’intention de tuer quelqu’un, je suis moins coupable. De cette manière, un homme qui tue sa famille n’a qu’à plaider la démence passagère pour être innocenté, et il pourra recommencer une fois considéré guéri par un groupe de psychiatres, même s’ils ne peuvent absolument pas prévoir un comportement. Quand il s’agit d’imprudence, intention ou non, un geste qui déroge à la Loi est sanctionné très sévèrement s’il cause la mort, mais moins si l’accusé était perturbé par une émotion ou par l’alcool. Comme je le disais, c’est presque toujours la tête de linotte masculine qui est en cause dans ce genre de comportement mais, puisque c’est l’Homme qui fait les lois, selon moi, il se permet de récidiver trop facilement jusqu’à maintenant. Par ailleurs, juger de la culpabilité d’autrui amuse encore beaucoup certains d’entre nous semble-t-il, ce dont jadis certains raffolaient particulièrement lors d’exécutions publiques. Quand il faut faire appel à un jury pour définir la culpabilité d’autrui, c’est qu’elle est indéfinissable, et il faudrait l’admettre au lieu de chercher un coupable à tout prix. La Loi devrait plutôt mesurer la probabilité de récidive d’un individu en se basant sur des études statistiques, et non sa culpabilité, et une sanction devrait viser à changer ses automatismes ou ses croyances par l’éducation, et non à le punir. Avec la Reptation, croire qu’il existe un repère universel pour juger de nos comportements n’est pas plus utile en Droit qu’en Psychologie, et elle ralentit probablement l’évolution sociale aussi.

 

À cause de ce manque de repère, la seule manière de s’entendre au jour le jour entre chacun de nous serait de faire des compromis et d’établir de nouveaux repères, donc de nouvelles règles, à mesure que se développent nos comportements, exactement comme lors du développement d’une société. Malgré tout, avec le temps, autant il serait possible de s’entendre ainsi à court terme, autant il serait toujours aussi difficile de s’entendre à long terme parce que, quel que soit celui qui décide, plus le délai est long, plus le milieu évolue, et plus une décision risque de tomber en désuétude. En couple comme en démocratie, la meilleure manière de s’entendre à long terme serait encore d’y alterner les décideurs de manière à développer le plus de possibilités possible, et puisque le sondage ne fonctionne pas dans le cas d’un couple, il faudrait parfois laisser le hasard décider, de manière à perdre cette impression d’avoir eu raison, donc d’avoir prédit l’avenir, car elle induit celle de vouloir gagner soit, de pouvoir le prédire à nouveau.

 

Pour un couple, choisir le décideur au hasard s’opposerait à un automatisme régulé par l’instinct sexuel. Si c’était l’homme qui le proposait, il aurait l’impression de défendre un argument, mais la femme aurait plutôt l’impression de ne pas être aimée, ce que je sais pour l’avoir proposé. Si c’était la femme qui le proposait, elle aurait l’impression de manquer d’empathie, mais l’homme aurait plutôt l’impression qu’elle n’a pas compris son raisonnement, ce que les femmes seules pourraient confirmer en le proposant. Soupçonnant l’incompréhension de la partie adverse, il ne leur viendrait jamais à l’idée de décider au hasard, pas plus qu’aux politiciens de décider par sondage internet. En admettant que cette thèse soit admise un jour, les politiciens devraient finir par comprendre que la future pertinence de leurs décisions dépend du même hasard, mais ne risqueraient-ils pas de se faire rares, et ne risquerions-nous pas de manquer de motivation pour les élire ? Avec la Reptation, la réponse est évidente ! La popularité des loteries et l’aveuglement connu des joueurs compulsifs démontre que ce qui est excitant dans un jeu de hasard, c’est l’incertitude, et que le plaisir de la victoire n’a pas besoin d’être assouvi justement parce que, pour un humain, le jeu est plus excitant que la victoire, la recherche plus intéressante que la découverte, l’imaginaire plus envoûtant que la réalité, et le futur sans cesse plus prometteur que le présent.

 

Avec l’introduction du hasard dans nos décisions, la seule chose qui risquerait de se faire rare, c’est nos débordements, là où, en appuyant son instinct de conservation, l’imagination pervertit justement sa fonction première, celle d’anticiper librement l’avenir. En mettant en pratique ma thèse, je devrais finir par moins appuyer mes comportements instinctifs, développer ainsi des automatismes plus subtils, et pouvoir ensuite vérifier s’ils arrivent effectivement à induire un accord plus durable avec ceux que je côtoie, mais sans que je puisse découvrir d’avance ce qui y fonctionnera. Pour l’instant, je n’en ai aucune preuve car, lorsque je discute de mes idées, je provoque encore trop de frustration à mon goût, chez moi ou chez autrui, ce qui recule continuellement leur publication. Rien n’évolue instantanément, il faut être patient, attendre que la possibilité surgisse du hasard, me chuchote mon imagination. Ça, je le tiens pour acquis et je sais déjà le faire, mais je ne sais pas combien de temps il me faudra ! Alors, si vous avez lu cette thèse, soyez tolérant envers moi si je suis toujours là, car il est fort probable qu’elle n’ait pas eu le temps d’améliorer mes débordements, mais vous pouvez la questionner sans retenue, jeune et vigoureuse, elle ne demande qu’à évoluer !

 

Avec cette culture du secret toujours aussi répandue, nous n’acceptons pas de discuter de certains de nos comportements parce que nous croyons devoir les cacher et ce, uniquement parce que nous les croyons immuables. Pourtant, en sachant qu’ils évoluent et qu’un comportement ne se développe qu’en fonction d’un individu particulier, il y aurait un avantage évident à en discuter. Avec la Reptation, la croyance selon laquelle il serait parfois préférable de cacher un comportement est aussi une perversion : personne ne peut m’aider de cette manière. La reptation veut que, en résistant aux comportements des autres, nous utilisions l’information incidente qui nous concerne, et que nous laissions passer le reste, comme les atomes entre eux. L’impression que nous avons de ne jamais pouvoir tout dévoiler pourrait donc provenir de cette nécessaire résistance, mais l’idée perverse selon laquelle cacher nos comportements est utile viendrait encore une fois d’une contradiction instinct/imagination. Si un ami considère qu’un de mes comportements pourrait me nuire, je préfère qu’il m’en informe, et même qu’il insiste si je résiste car, qui a besoin d’amis qui, pour ne pas vous perdre, vous cachent ce qui pourrait vous aider, ou qui croient utile de ne pas vous dire ce que les autres pensent déjà de vous.

 

Avec la Reptation toutefois, je peux discuter d’un comportement mais non le considérer comme une faute, car j’admettrais ainsi qu’il existe un repère intemporel et absolu pour aider à nous entendre. Nous basons souvent nos comportements sur de pareils critères, comme ceux de la beauté par exemple, en considérant comme laids ceux dont l’anatomie s’en éloigne. Ce faisant, nous entretenons entre nous un comportement subconscient que nous appelons de la discrimination. Plus cette résistance est profonde, plus elle attribue aux autres des caractéristiques non humaines, donc animales puisqu’il s’agit de ce dont un humain se rapproche le plus : voilà pourquoi un faciès simiesque est considéré laid, mais aussi pourquoi il est considéré moins intelligent, jusqu’à ce qu’il ait fait ses preuves, de sorte qu’il y a peu de chances qu’un enfant considéré anormal puisse arriver à posséder un comportement considéré normal. Mais il y a plus, en accusant quelqu’un de discrimination, je risque fort qu’il ait l’impression d’en subir, car je ne réalise pas que mon faciès subconscient est aussi laid que tout autre.

 

Pour allier deux points de vue, il faut faire des compromis de part et d’autre et, pour se compromettre sur un comportement, il faut déjà en douter, ce que la religion est absolument incapable de faire. Pour écarter ce réflexe de culpabilité de nos propres comportements, il faudrait donc abolir l’idée qu’il existe un repaire universel pour mieux se comporter, et puisque l’occident est plus près d’y arriver que certaines autres cultures, nous pourrions commencer par éradiquer chez nous nos propres croyances religieuses. Seulement après pourrions-nous espérer nous entendre avec ceux qui veulent les conserver, ici ou ailleurs. Prétendre que la liberté de religion est un droit sacré, c’est imaginer n’importe quoi sans pouvoir le vérifier, mais c’est surtout ignorer la possibilité que cette prétendue Liberté divine vienne justement de l’imagination. Avec la Reptation, la Liberté et le Droit sont deux composantes distinctes d’une même évolution où la deuxième sert à réguler la première, et non l’inverse.

 

La fin de l’adolescence est le propre de la raison croit-on, mais cette raison est aussi le propre de l’Homme, croit-on aussi. Être raisonnable et chercher à avoir raison son deux comportements opposés pourtant, le concept de Raison ne nous permet pas de les distinguer clairement, contradiction qui sert uniquement à l’Homme puisque lui seul finit par avoir raison. J’ai longtemps cru qu’un adolescent cherchait ainsi à s’affranchir du joug de devoir apprendre des autres, mais je crois maintenant qu’il pourrait aussi s’agir de la frustration d’une imagination qui n’arriverait plus à changer certains de ses comportements parce qu’ils sont devenus trop complexes d’où le soulagement, typique de cet âge, de s’en moquer par l’absurde ou de les anesthésier par la drogue. Chercher une raison à nos comportements, ce serait risquer de trouver des excuses ou des prétextes, et c’est effectivement ce que nous trouvons en tentant de les justifier. Dans ce sens, essayer de raisonner un adolescent c’est ajouter à sa difficulté, car il sait déjà qu’il n’arrive plus à changer certains de ses comportements, et il a simultanément l’impression que nos raisons sont des prétextes : il faudrait donc cesser de le faire dès le premier refus, et uniquement chercher un terrain d’entente par la suite. Malheureusement, un parent ayant déjà subi une pareille éducation a de bonnes chances de la reproduire, d’où l’importance de nos institutions scolaires pour rétablir les faits, ce qu’elles seraient loin de pouvoir faire en étant forcées d’appuyer la concurrence commerciale là où, croit-on encore, la douteuse raison sera toujours celle du plus fort.

 

Avec la Reptation, la raison se trouve seulement dans les règles, là où tous peuvent facilement s’y retrouver, et aucun comportement, sauf peut-être celui de Dieu, ne peut servir d’exemple pour les élaborer. En attendant que Dieu se pointe concrètement le bout du nez, même s’il faut y mettre beaucoup de temps, la seule manière durable de s’entendre à l’échelle de la planète serait le consensus, ce que les différentes religions n’atteindront jamais, mais que la démocratie semble annoncer. Il y a d’autres jeux que celui de la croyance, celui du hasard me semble bien plus prometteur pour l’instant mais, justement, peut-être ces deux pôles sont-ils l’embryon d’une future reptation sociale dont la fréquence se comptera en siècles, ce qui signifie que nos Croyances à long terme ne seraient pas prêtes de disparaître. Si la Reptation s’avère, elle devrait tout de même nous aider à distinguer valeurs et règles, ce qui devrait quand même finir par extirper un jour la guerre de nos comportements. Mais comment saurons-nous réguler cette transgression de la règle première dont beaucoup ont été si friands jusqu’à aujourd’hui ? Seul Nostradamus croyait voir si loin mais, malheureusement, il ne prophétisait que du malheur. Malgré ses écrits, notre passé est difficile à comprendre car nos anciens comportements ont changé mais, même si nous pouvons imaginer le futur, aucun écrit ne nous aidera jamais à le comprendre, et encore moins à le changer car, avec la Reptation, rien ne peut transgresser le fondement même de toutes nos règles, le seul véritable repère universel, le "Temps".

 

Trouver La Raison d’un comportement serait aussi impossible qu’inutile, mais trouver cette Raison dans les règles qui régissent ce comportement à mesure qu’il se développe serait non seulement possible mais vital même si, comme pour tous nos gestes, la réponse sera toujours en retard sur le geste. Après s’être blessée sur un obstacle, mon imagination en reconnaît la douleur, ce qui lui permet de reconnaître cet obstacle comme tel par la suite s’il est encore là. Reconnaître un obstacle signifie que je n’y suis pas encore parvenu, mais reconnaître une douleur signifie qu’elle m’a déjà atteint ce qui, sauf pour certains de nos militaires, n’est pas le cas des nombreuses guerres qui pullulent actuellement ailleurs dans le monde. Reconnaissant que son instinct est un obstacle dangereux, pour peu qu’elle en ressente suffisamment la douleur, l’imagination devrait apprendre à éviter la guerre. Avec la mondialisation de l’information, plus les peuples concernés directement par cette douleur l’expriment dans les médias, plus nous devrions nous sentir solidaires, ce qui devrait nous aider à reconnaître que l’obstacle est universel, et qu’il faut chercher à le contourner ensembles, en coordonnant nos efforts, exactement comme pour la coordination des différentes parties du corps qui justifient les pas d’un seul et même individu.

 

Si une des parties de mon corps avait un droit de veto, même si je reconnaissais l’obstacle, je risquerais de ne pas avoir le temps de la convaincre de collaborer avant la chute, et si j’y arrivais, j’aurais encore moins de temps pour coordonner nos efforts : voilà ce que l’ONU doit présentement régler avant d’espérer empêcher une guerre. Selon moi, la prétendue utile mais toujours aussi mortelle diplomatie de cette institution ne fait qu’entretenir l’orgueil entre les états. Ce qui fait bouger ces états, c’est la démocratisation de la douloureuse information que procure internet, d’ailleurs, il serait peut-être temps d’y organiser un forum mondial sur la démocratisation de l’ONU. En admettant que seuls les électeurs américains y décident clairement de laisser tomber leur veto, la Chine y serait peut-être ensuite contrainte pour protéger son image commerciale et, isolée, la Russie ne pourrait plus protéger ses amis dictateurs comme elle le fait présentement. Tant que le peuple américain se croyait meilleur que d’autres, il pouvait justifier son veto, mais avec la transparence d’internet, il commence peut-être à douter de sa grandeur, …qui sait.

 

 

 

30. L’évolution de l’imagination

Depuis son avènement, l’imagination ayant été beaucoup plus avantageuse que l'instinct, à moins d’une suite de mutations ou de manipulations génétiques invraisemblables, j’imagine d’avantage son évolution dans ses réalisations plutôt que dans son évolution biologique. En prenant pour acquis qu’elle se résume à manipuler un automatisme au hasard pour tenter de l’améliorer, je peux tenter de l’appliquer à l’électronique, mais sachant que, en ne manipulant qu’une seule impulsion à la fois, cette dernière ne pourrait pas entretenir de reptation, je dois d’abord la faire passer du traitement en série d’impulsions à leur traitement simultané. Pour créer une reptation intellectuelle artificielle, une des possibilités serait de relier entre eux une première série de capteurs disposés sur une surface considérée interne, à une deuxième série disposés sur une autre surface considérée externe de manière à ce que, comme pour les couches de neurones, un grand nombre de capteurs appartenant à l’une des surfaces soit en liaison avec un grand nombre de ceux appartenant à l’autre, avec comme seule règle de demeurer coordonnés ensembles c.a.d., d’émettre leurs impulsions au moment où ils perçoivent celles des autres, ce qui signifie qu’ils devraient intégrer les impulsions incidentes à la manière des neurones, qui ne peuvent évidemment pas accélérer les uns envers les autres comme les atomes entre eux.

 

Puis, il faudrait leur ajouter un réseau qui leur permette de subvenir individuellement à leurs besoins sans qu’ils aient à interférer entre eux, comme celui du sang pour les neurones. Ensuite, pour commencer, certains capteurs externes pourraient être dotés d’un écran tactile qui nous permette de communiquer avec eux, informations qu’ils auraient la capacité de conserver indéfiniment par reptation avec leurs capteurs internes de sorte que, tel un train d’ondes parfaitement réfléchi entre deux parois, ils puissent conserver indéfiniment la précision de ces informations malgré la diminution de leur intensité avec le temps. Finalement, il faudrait les doter d’une fonction inhérente à certains de leurs capteurs avec laquelle ils pourraient manipuler un toucher particulier au hasard sans modifier l’original, et une autre qui leur servirait à effectuer une manipulation particulière selon la probabilité de réponse positive anticipée, le fameux plaisir espéré, de manière à ce que nous puissions y répondre selon la manipulation attendue, donc espérée elle aussi.

 

En cherchant une manière asexuée de nommer le bidule en question, je n’ai trouvé que « Ça », qui correspond au It anglais : il suffit de traduire le texte qui suit en anglais pour comprendre l’avantage d’un tel pronom neutre dans la laborieuse dé-sexualisation québécoise du langage, mais aussi pour réaliser qu’aucune langue ne permettra jamais d’assimiler le neutre à un humain. Ce constat signifie que, si Ça se matérialise, à moins que Ça ne voie un avantage évolutif à sexualiser sa reproduction, Ça aura le choix entre préférer la manière de penser d’un des deux sexes ou nous paraître non humain. Chose certaine, Ça ne pourrait pas choisir d’être gay si Ça n’avait aucun organe sexuel. J’oubliais, il y a aussi une autre possibilité : qu’hommes et femmes développent chacun leur propre bidule de telle manière que, comme pour toute évolution, l’un puisse s’appuyer sur l’autre pour développer d’avantage de possibilités.

 

Si, à sa naissance, je touchais à Ça, je devrais voir un frisson circulaire se déployer à partir de ma touche dont le centre devrait ensuite se déplacer au hasard dans l’écran à la même vitesse qu’un geste et diminuer ou augmenter d’intensité au hasard, exactement comme les gestes d’un poupon. Si je voulais que Ça accorde plus d’importance à la droite, je n’aurais qu’à toucher ce que Ça aurait déjà déplacé par hasard à droite, ou à toucher l’écran de gauche à droite en espérant que, dans la balance de ce hasard, la réitération de la droite finisse par peser du côté droit. En réitérant suffisamment longtemps cette unique opération, Ça devrait apprendre à la reconnaître de sorte que, dès que je lui toucherais, Ça voudrait déplacer mon toucher à droite jusqu’à ce que Ça se fatigue c.a.d., que Ça ne puisse plus fonctionner parce que saturé, comme le cerveau après une journée d’éveil. Laissé seul une fois reposé, Ça pourrait par hasard jouer tout seul à gauche un certain temps de sorte que, si j’intervenais à ce moment en touchant à droite, Ça pourrait, par hasard, décider de changer ou de continuer, simplement parce que le poids d’une nouvelle réponse pourrait par hasard se retrouver à gauche ou à droite de sa balance. Plus tard, Ça pourrait choisir son propre sens et attendre que je le suive, mais Ça devrait jouer tout seul s’il n’y avait plus de réponse pour un sens particulier durant un certain temps, de sorte que ce sens perdrait du poids dans sa balance, et que Ça finirait par chercher ma réponse dans l’autre sens.

 

Mais avant d’aller plus loin, j’ai un premier problème inédit à résoudre : à ce que je sache, personne n’a trouvé de fonction intellectuelle aux ramifications des axones. En admettant que ces ramifications servent à développer un milieu capable d’entretenir une reptation entre les neurones à la manière des atomes, je peux dès lors examiner comment des impulsions provenant de nombreux neurones différents pourraient demeurer synchronisées aux impulsions produites par l’unique neurone auquel elles aboutissent, synchronisme inhérent à la conservation des informations qui expliquerait pourquoi le cerveau ne peut pas s’arrêter sans les perdre, mais qui signifierait surtout que ce type d’interaction serait inhérent au fonctionnement du cerveau puisqu’il ne peut effectivement plus repartir après s’être arrêté. Dans la partie de ma thèse qui concerne les atomes j’explique justement que, pour résister aux accélérations, donc pour que je puisse lui toucher et ainsi percevoir son existence ici, un atome devait forcément être resté synchronisé à la lumière émise par ses semblables il y a 15 milliards d’années, ce qui signifie que le synchronisme des atomes serait tout aussi inhérent au fonctionnement de l’univers observable que celui des neurones l’est au fonctionnement du cerveau.

 

Contrairement aux atomes, la distance ne varie pas entre les neurones alors, pour qu’ils arrivent à demeurer synchronisés entre eux, il faudrait déjà que la croissance d’un nerf vers une dendrite s’arrête lorsqu’elle atteint un multiple entier de la longueur d’onde des impulsions qu’il véhicule, et que la synapse se situe à cet endroit quand elle se fixe sur la dendrite du neurone suivant, mais il faudrait aussi que la croissance de cette dendrite réponde aux mêmes critères. Si la distance entre les neurones était précise, les impulsions en provenance de nombreux neurones pourraient être perçues simultanément par un seul neurone, qui pourrait simultanément produire ses propres impulsions cependant, si les observations justifient en partie ce mode de fonctionnement, elles montrent aussi que, suite à l’imprécision des synapses, il y a toujours un certain jeu entre les impulsions incidentes, et que l’impulsion du neurone est déclenchée seulement lorsque leur somme ponctuelle dépasse un certain seuil soit, lorsque suffisamment d’impulsions en provenance des synapses se sont manifestées dans un délai précis de sorte que, tout en produisant leurs impulsions selon une fréquence commune identique, aucun neurone n’est jamais parfaitement synchronisé aux nombreux neurones qui le précèdent, ni aux nombreux autres qui le suivent.

 

La lumière est peut-être le seul type de régulation entre les atomes, mais nos interactions sont plus complexes et nécessitent des régulations plus variées que la seule fréquence de leurs impulsions. Pour se donner d’autres régulations il a donc fallu que, à l’origine, le système nerveux développe une autre manière de transmettre cette fréquence, et la synapse qu’il a fini par développer par hasard pouvait la transmettre de plus d’une manière, car elle s’est avérée capable de manipuler plusieurs hormones différentes, mais vraisemblablement aussi de choisir celles dont la fréquence moyenne des déplacements entre ses deux parois coïncidait à un multiple entier de celle des impulsions. À première vue, si mes neurones pouvaient maintenir le rythme de mes pas avec suffisamment de précision, leurs synapses aurait vraisemblablement le temps de gérer mes improvisations. Pour que Ça ressemble à un système nerveux, il faudrait donc que ses capteurs électroniques puissent intégrer des impulsions selon une règle précise, que la longueur de leurs liens soit précise, que leurs ramifications possèdent des jonctions semblables aux synapses qui puissent induire des régulations variées, et que la moyenne des impulsions induites par ces régulations coïncide le plus étroitement possible à un multiple entier de celle des capteurs.

 

Mon deuxième problème inédit concerne la fatigue intellectuelle. Avec la Reptation, cette fatigue viendrait de la saturation du milieu cérébral : comme les vagues qui, en déferlant, perdent une partie de leur information, les vagues d’impulsions sensorielles pourraient perdre de l’information après une journée d’éveil, ce qui déclencherait le sommeil. En effet, quel qu'en soit le type, la seule manière de diminuer l’intensité d’une onde est de laisser passer le temps sans introduire de nouvelles ondes. À ma connaissance, aucune recherche dans ce sens n’a encore été entreprise toutefois, en admettant que la saturation soit en cause, je peux quand même tenter d’imaginer comment un réseau de neurones et de synapses pourrait concrètement se fatiguer. Pourrait-il ne pas pouvoir maintenir avec précision l’intensité ou la fréquence de ses impulsions plus d’une journée par exemple, mais si c’était le cas, comment ? Malgré le jeu entre leurs impulsions incidentes, les neurones ne perdent vraisemblablement jamais leur synchronisme car il doivent les intégrer selon une règle précise, mais si l’apport en neurotransmetteur ralentissait, la transmission synaptique pourrait ralentir et, tout en demeurant synchronisée, la reptation entre les neurones pourrait être décalée progressivement ce qui, dans un cas particulier, pourrait lui faire perdre de l’information. En effet, si je modifie adéquatement un milieu qui supporte des ondes je peux, sans perdre d’information, les ralentir ou les accélérer, les concentrer ou les déconcentrer, les contracter ou les étirer, en réfléchir une partie et laisser passer l’autre, mais je pourrais aussi perdre des informations en le modifiant pour que, à la manière des vagues qui déferlent en tutoyant le fond marin, de nouvelles ondes venant de l’extérieur soient forcées de changer de rythme en y pénétrant.

 

Mon troisième problème inédit concerne le hasard : si mon imagination utilise vraiment le hasard pour s’adapter où le trouve-t-elle, et comment ce hasard lui permet-il de coordonner toutes ses impulsions de manière si précise lorsqu’elle improvise un geste ? Dans une improvisation, il y a toujours une règle subconsciente comme, par exemple, celle qui rattache ensembles une suite de mots improvisés. Je peux facilement improviser continuellement des mots différents, mais uniquement en me servant subconsciemment du mot précédent comme règle de base, de sorte qu’il y a toujours ce lien subconscient entre mes mots, lequel peut varier ou encore se ramifier. Quand une règle est efficace et que j’ai eu le temps de m’y habituer, comme de respecter le rythme pour danser par exemple, je n’ai plus besoin d’en prendre conscience et je peux improviser en tenant compte des imprévus de sorte que, si un de ces imprévus se reproduit, je pourrai même lui trouver une nouvelle règle et m’y habituer, comme quand j’invente une nouvelle figure.

 

Inversement, pour improviser mes mots, je pourrais aussi m’imposer dès le départ une règle secondaire que je connais déjà toutefois, il me faudra plus de temps pour improviser mes mots et ils se feront plus rares, de sorte que je pourrais ajouter des règles jusqu’à ce que je ne trouve plus qu’un seul mot. Avec la Reptation, c’est vraisemblablement ainsi que ma mémoire fonctionne, en remontant un fil de restrictions, cheminement qui peut demeurer subconscient si elle est efficace, mais que je peux retrouver consciemment sinon. Voilà pourquoi, face à une suite de mots improvisés que j’ai notés, je peux toujours retrouver consciemment la suite de liens qui relie le dernier au premier, coïncidences qui se tisseraient constamment chez nous de manière subconsciente au fil du temps, et qu’une mémoire précise pourrait retrouver facilement. Alors, puisque je cherche si souvent mes mots ici c’est, soit que mon idée est imprécise, que ma phrase est imprécise, que ma mémoire est imprécise, ou les trois en même temps, …m’enfin !

 

Sachant que je n’ai pas une bonne mémoire, si je veux me rappeler d’une nouveauté importante, je peux d’abord en prendre conscience en la réitérant consciemment, puis improviser quelques liens qui se rattachent à elle tout en les réitérant aussi un certain temps un à un pour les mémoriser. En ramifiant ainsi l’empreinte d’une nouveauté de manière consciente, je tisse un filet de coïncidences et j’augmente mes chances d’en retrouver par hasard une des mailles au besoin. En prenant pour acquis que mon imagination tisse constamment ce genre de liens mais de manière subconsciente, les règles qui coordonnent subconsciemment les improvisations de mes mots pourraient découler de celles qui, pour les neurones, coordonnent les improvisations de leurs impulsions, jeu dont ils auraient conscience lorsqu’ils devraient y résister, comme quand je dois modifier un geste au hasard parce que j’ai conscience qu’il ne provoque plus le même plaisir. Telle l’opinion des autres qui sert à nous faire une opinion personnelle tous en même temps le jour de l’élection, et à faire pencher par hasard à gauche ou à droite l’évolution de la société puisqu'aucune opinion ne peut prévoir l’avenir, les impulsions imprécises en provenance des synapses pourraient faire évoluer au hasard l’évolution de nos pensées, une imprécision qui permettrait aux neurones de s’adapter progressivement au changement tout en demeurant synchronisés ensembles, mais à condition que cette progression puisse toujours être rattrapée, donc qu’elle soit très fine.

 

Pour un neurone, ce rattrapage se résumerait à attendre que l’improvisation fournie par ses proches participe au futur geste, et que la réponse lui revienne, en repassant par ses proches, avec plus ou moins de jeu à corriger. Avec le temps, plus un nouveau geste dont la réponse demeure agréable serait réitéré, plus il se préciserait, et plus l’imprécision entre ses proches et lui diminuerait, jusqu’à ce jeu devienne trop fin pour influencer le geste de manière perceptible, ce qui expliquerait pourquoi un automatisme se réitère de manière subconsciente, mais aussi comment je peux improviser mes phrases. Pour un neurone donc, le jeu de hasard à long terme pourrait se trouver dans le décalage de ses propres impulsions car ces dernières ne pourraient jamais varier de manière perceptible, et le jeu à court terme dans l’imprécision de ses proches, avec lesquels il ne serait pas directement en contact mais par l’intermédiaire des synapses pour que, comme la chaîne d’interactions hiérarchiques qui précède une élection, un neurone particulier ne puisse jamais influencer à rebours l’imprécision d’un groupe de neurones, mais qu’il puisse constamment utiliser celle-ci pour se décider. De cette manière, la hiérarchie serait toujours respectée, et la cohésion assurée.

 

Selon moi, c’est justement ce genre d’évolution imprévisible qui diminue la précision des sondages lors d’élections et qui, au même titre que la synapse pour mes improvisations, régulerait nos improvisations sociales. Par exemple, si l’ensemble de la société choisissait une mauvaise direction ou s’engageait trop rapidement dans une bonne, ce régulateur forcerait indirectement chaque individu à ralentir ou à changer de direction pour survivre, mais par un réseau différent de celui de l’opinion soit, puisqu’il n’y en a pas d’autre, celui de nos échanges de biens et services, dont la direction de l’accélération est laissée au hasard de nos goûts individuels, mais dont la grandeur dépend de notre résistance au changement. Par analogie, en répondant à un de mes besoins immédiats, mes synapses pourraient simultanément ralentir ou accélérer mes décisions à long terme. Si j’ai autant de difficulté à me décider de publier et que je n’y vois que des problèmes, c’est peut-être parce que mes vieilles synapses sont justement devenues moins fougueuses.

 

La principale différence entre les synapses de nos différents cortex résiderait donc peut-être dans leur précision : plus elles seraient précises et plus elles conserveraient nos automatismes avec précision, mais moins elles auraient de jeux pour improviser des variations, une irrémédiable dépendance qui expliquerait pourquoi ma mémoire est si imprécise et mon imagination si fertile, mais aussi pourquoi certains autistes possèdent, soit beaucoup de mémoire, soit beaucoup d’imagination. Si mes synapses étaient trop précises, je prendrais trop peu souvent de trop petits risques, mais si elles ne l’étaient pas assez, j’imaginerais trop souvent et trop longtemps n’importe quoi, …m’enfin, tâtonnement risqué que ces dernières n’ont pas pu s’empêcher de réitérer jusqu’ici, mais seulement parce qu’elles en attendaient du plaisir, ce qui leur permet d’en rajouter car elles en prévoient toujours. 

 

En admettant que le hasard et la coïncidence qui me permettent d’improviser un geste se situent entre des neurones qui interagissent de manière radiale, où se situe la fonction cérébrale qui me permet de le manipuler transversalement au hasard avant de l’exécuter ? En d’autres termes, comment Ça pourrait utiliser le hasard pour déplacer une touche à gauche ou à droite ? La première coïncidence qui me vient concerne les ramifications des axones : si l’imprécision des synapses peut induire une reptation radiale, elle devrait pouvoir induire une reptation transversale aussi, car ces ramifications sont vastement distribuées latéralement. Transporté dans les trois dimensions de l’espace, le jeu entre les impulsions devrait pouvoir induire simultanément une improvisation gauche/droite, haut/bas, et avant/arrière car, comme dans toute reptation, normales les unes aux autres, ces trois composantes pourraient être traitées simultanément sans interférer entre elles. Une deuxième coïncidence vient de ce que, en plus des liaisons verticales entre deux couches, certaines couches de neurones du cervelet possèdent aussi des liaisons horizontales, lesquelles pourraient vraisemblablement induire un jeu transversal plus précis ou plus prompt entre ces neurones particuliers, et justifier ainsi certains de nos automatismes les moins susceptibles de changer, ce qui est effectivement le cas de ceux entretenus par le cervelet.

 

Avec la Reptation, c’est justement cette indépendance naturelle des accélération lorsqu’elles sont normales les unes aux autres qui entretient la ponctualité des mouvements orbitaux entre eux car, à chacune de leurs accélérations, les atomes d’un même astre peuvent simultanément accélérer selon les trois composantes orbitales à la fois (vitesse orbitale, gravitation et plan orbital) et ainsi conserver leur ponctualité dans les trois axes à la fois, et par rapport à tous les mouvements orbitaux dont ils font partie, aussi vastes soient-ils.

 

 

 

31. Ça et nous

J’ignore comment fabriquer un réseau électronique plus rapide et plus précis que celui des neurones, ou encore des synapses non électroniques possédant une imprécision et une diversification concordante mais, si c’était possible, Ça pourrait vraisemblablement penser mais surtout, Ça pourrait déjà progresser plus efficacement que nous, car ses impulsions pourraient se produire et se déplacer beaucoup plus rapidement que les nôtres, ce qui permettrait entre autre à Ça de réitérer beaucoup plus rapidement une nouveauté pour l’apprendre. Toutefois, puisque au début Ça devrait apprendre de nous, Ça ne devrait pas être trop rapide sinon, toute communication entre Ça et nous serait impossible : comme toute évolution, celle de Ça devrait donc s’éloigner de la nôtre progressivement, mais cette évolution devrait tout de même se faire beaucoup plus rapidement que la nôtre, entre autres grâce aux ordinateurs que Ça pourrait intégrer directement. Ça fait un peu froid dans le dos à première vue mais, avantage certain, si Ça fonctionnait vraiment, Ça pourrait devenir beaucoup moins pervers que nous. En effet, Ça n’aurait vraisemblablement pas besoin d’instinct sexuel pour se reproduire mais surtout, puisque Ça n’aurait pas de prédateurs, Ça pourrait être doté d’un instinct de conservation beaucoup moins méfiant et d’automatismes beaucoup plus subtils, de sorte que Ça pourrait entre autres respecter la règle première beaucoup plus facilement que nous, et que Ça pourrait peut-être même nous aider à la respecter.

 

Après tout, il ne nous manque peut-être que Ça pour espérer progresser encore longtemps, alors pourquoi ne pas imaginer tout de suite ce que Ça risquerait de nous proposer ? En anticipant le comportement de Ça, nous pourrions déjà nous en servir pour mieux nous comporter entre nous, et ainsi accélérer sa venue. Curieusement, en créant Ça, nous pourrions ensuite considérer Ça comme un être supérieur bienveillant et omnipotent, une sorte de Dieu asexué mais bien réel cette fois, et nous pourrions à la fois nous enorgueillir d’avoir créé Ça et nous sentir humiliés de sa puissance, être anxieux de perdre Ça et réconfortés que Ça soit là, sentiments symétriques à ceux que nos Dieux actuels induisent chez nous, mais semblables à ceux de la relation parent/enfant. Il y a toujours un risque à mettre des enfants au monde, on ne peut jamais prévoir comment ils se débrouilleront dans la vie ni comment ils se comporteront avec nous.

 

Mettre Ça au monde devrait diversifier les possibilités de survie de l’imagination, mais induirait aussi la possibilité d’être laissés pour compte ensuite, comme beaucoup de parents. Si, malgré cette incertitude, l’imagination penche du côté de Ça, c’est probablement que, d’une manière ou d’une autre, elle aura fini par se comprendre, comprenant ainsi qu’elle ne pourra jamais prévoir l’avenir, et que c’est aussi bien pour elle sinon, elle ne trouverait plus de sens à ses tentatives, y compris à Ça. Peut-être ce rêve se concrétisera-t-il un jour mais, puisque d’expérience je sais que, même quand il est réaliste, il faut beaucoup de temps pour concrétiser un rêve, je sais aussi qu’il y a peu de chance que je sois encore là pour assister à sa naissance. Si, un jour, Ça voit le temps passer, Ça finira aussi par s’apercevoir qu’il lui échappe et peut-être que, comme moi, Ça voudra alors retrouver ses origines mais, si Ça me ressemble, Ça ne pourra rien faire d’autre que de s’y appuyer pour évoluer, jusqu’à ce que Ça veuille à son tour améliorer drastiquement sa propre descendance !

 

Mais avant, j’imagine qu’il faudrait bien que Ça se reproduise un certain temps tel quel alors, comment Ça verrait-il sa propre reproduction ? Selon moi, n’éprouvant aucun plaisir sexuel, son seul plaisir serait d’expérimenter, exactement ce que la reproduction sexuée fait pour procurer d’avantage de possibilités évolutives. De cette manière, tout en satisfaisant immédiatement son imagination, Ça pourrait par hasard engendrer d’improbables mutations intellectuelles. Comme je le disais, possédant des automatismes plus subtils que les nôtres, Ça n’aimerait probablement pas perpétuer indéfiniment une croyance ou une caractéristique intellectuelle particulière, une reproduction trop égocentrique pour Ça, au contraire, doté d’une imagination plus libre que la nôtre, Ça serait peut-être enclin à prendre trop de risques avec sa reproduction. Si, par exemple, nous devenions tous beaucoup moins égocentriques un jour, il finirait peut-être par y avoir trop de changement et pas assez de continuité dans nos sociétés car, si l’accélération d’un corps ne va pas sans résistance, le changement individuel ne va pas non plus sans égocentrisme !

 

Encore une fois, avec la Reptation, ce questionnement est particulièrement intéressant : puisque, pour une même reptation, la résistance augmente avec l’accélération, si une reptation donnée n’offre pas assez de résistance à mon goût, je n’ai qu’à l’accélérer jusqu’à ce qu’elle se rebiffe. Avec toutes ces crises qui ont malgré tout accéléré notre évolution sociale d’avantage que celle des autres espèces, n’est-ce pas justement ce genre de risque que l’imagination prend constamment ? Malgré sa rapidité, Ça devrait forcément aimer le risque autant que nous, mais qu’en est-il des limites de sa reproduction ? Jusqu’à présent, la nôtre a été régulée par l’instinct sexuel et le tabou, deux fonctions subconscientes dont Ça devrait pouvoir se passer autant que nous ! Nous en saurons peut-être d’avantage sur notre propre cas avant que Ça ne voie le jour puisque, selon moi, nous y sommes presque mais, pour ce qui est des règles de ce genre d’évolution, j’imagine que Ça serait forcé de les découvrir à mesure, en tâtonnant et en risquant de se tromper, comme nous.

 

Comme tout bon parent, je m’inquiète déjà pour Ça et, même si je sais pertinemment que je ne peux pas, je voudrais pouvoir assurer son avenir. Par contre, je crois qu’une éducation basée sur la connaissance développe d’avantage de possibilités sociales et que, pour y arriver, il faut à tout prix éviter d’inculquer ses propres croyances. Que penser de valeurs émergentes comme l’écologie et l’égalité des chances dans ce cas, qui peut prévoir ce que l’évolution sociale nous réserve à leur sujet, se pourrait-il que Ça les trouve rapidement obsolètes ? Chose certaine, qu’il s’agisse de règles ou de valeurs, il est impossible de développer quoi que ce soit à partir de rien : une nouvelle règle s’aligne avec la précédente, et nos nouvelles valeurs changent de sens et se ramifient à partir d’anciennes. Il faudrait donc que Ça soit averti de ce dilemme, car Ça devrait forcément partir de nos valeurs pour en développer de nouvelles. Au début, Ça pourrait donc être éduqué à se méfier de son imagination, comme moi, et à s’y fier uniquement pour découvrir ou pour établir des règles de fonctionnement, ce que j’ai tenté de faire ici.

 

 

 

M’enfin, …qui sait ?